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Limogeage de Laurent Bigot et de l’ambassadeur Rouyer : IBK perd un allié de poid au Quai d’Orsay

Si c’est le seul départ de l’ambassadeur de France au Mali, M. Christian Rouyer qui a retenu les esprits bamakois, il faudra signaler qu’un inconditionnel du candidat Ibrahim Boubacar Keïta est également concerné par la vague de limogeages décidés par le Quai d’Orsay. Il s’agit de M. Laurent Bigot, le même qui soutient mordicus qu’Ibrahim Boubacar Keïta reste le véritable vainqueur des élections présidentielles maliennes de 2002 et qui s’appliquait jusqu’avant son limogeage, à faciliter les rencontres de M. Keïta dans certains milieux influents parisiens.

Laurent Bigot, sous-directeur pour l’Afrique de l’Ouest au ministère des Affaires étrangères de la France depuis 2008

Laurent Bigot, sous-directeur pour l’Afrique de l’Ouest au ministère des Affaires étrangères de la France depuis 2008

M. Laurent Bigot était précédemment sous-directeur Afrique-Occidentale chargé du Mali. Un «Monsieur Mali» au Quai d’Orsay (Ministère des affaires étrangères de France). Il a été débarqué au même moment que l’ambassadeur de France à Bamako, Monsieur Christian Rouyer, considéré à raison comme un ami du Mali pour avoir anticipé la contre-attaque française contre les jihadistes en janvier dernier.

Si, pour le département de tutelle français, il s’agit d’un simple « mouvement normal dans la vie du Quai d’Orsay », il n’en demeure pas moins qu’il s’agisse de représailles contre le « monsieur le spécialiste du Mali » et de recadrage de la politique française au Mali pour le cas de l’ambassadeur Rouyer.

Christian Rouyer : victime des impératives géopolitiques et stratégiques du moment

Le désormais ex-ambassadeur de France à Bamako n’a certainement rien à se reprocher. Le Mali lui doit d’ailleurs une fière chandelle. C’est bien lui qui a assisté le président de la Transition, le prof.  Dionconda Traoré à concevoir la lettre demandant l’intervention urgente de la France face à l’avancée périlleuse des jihadistes. Et ainsi, à sauver le pays tout entier, voire la sous-région, et pourquoi pas le monde ? Le Mali, plus que la France, lui reste, en tout cas, reconnaissant. Mais voilà : la diplomatie et surtout la géopolitique ont des règles immuables.

Interrogé par la presse française à propos du cas Rouyer, le ministère des affaires étrangères se défend d’avoir sanctionné l’ambassadeur de France au Mali. « Nous entrons dans une nouvelle phase. La phase intensive de combats s’achève. Nous entrons dans un processus de stabilisation de la sécurité qui sera assuré par les forces africaines puis les casques bleus de l’ONU. La France passant progressivement le relais. Il faudra parallèlement gérer les processus politiques, avec des élections à venir, de réconciliation nationale et de développement » (source : le monde.fr). En clair et en croire le ministre français, la situation au Mali exige désormais d’autres compétences appropriées. Toute chose qui incite à ausculter du côté du nouvel élu, M. Gilles Huberson.

Le nouvel ambassadeur de France au Mali est ancien Saint-Cyrien, de la prestigieuse  école militaire spéciale de France. L’École spéciale de Saint-Cyr est un établissement militaire d’enseignement supérieur qui forme des officiers des armes de l’armée de terre et une partie des officiers de la gendarmerie française. Lui (M. Huberson) est gendarme et serait très proche des services spéciaux (secrets). Un «véritable soldat» dit-on, dans le milieu. A propos de sa profession, on note tout simplement qu’il est « Conseiller des affaires étrangères hors classe ».  Allez savoir !

Avant sa nomination, il était conseiller des affaires étrangères, à la tête de la nouvelle mission « Mali-Sahel » (MMS) du ministère des affaires étrangères de France.

Outre son diplôme de l’Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr, il possède une licence d’histoire, un Brevet de l’enseignement militaire supérieur et est auditeur de la 10ème  session nationale de l’Institut des hautes études de la sécurité intérieure de France (1998-1999).

Son parcours est ainsi libellé : « Chef de la mission “Mali-Sahel” (MMS) à la direction d’Afrique et de l’océan Indien du ministère des Affaires étrangères (février 2013- )
Conseiller diplomatique en charge des affaires internationales et européennes au cabinet de la secrétaire d’Etat chargée de l’Outre-mer, puis ministre auprès du ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer, des Collectivités territoriales et de l’Immigration, chargée de l’Outre-mer, Marie-Luce Penchard (juillet 2009-mai 2012)
Sous-directeur de la sécurité des personnes à la direction des Français à l’étranger et des étrangers en France au ministère des Affaires étrangères (2006-2009). Ill a piloté la sous-direction de la sécurité des personnes à la direction des Français à l’étranger et des étrangers en France du ministère des Affaires étrangères entre 2006 et 2009 ».

Au Mali, l’on dira tout simplement qu’«il connait les dossiers ». Ajouter à cela son parcours militaire, l’on est en droit d’affirmer  qu’il a des missions pour le moins spéciales pour le Mali. Après tout, sa profession n’est-elle pas «Conseiller des affaires étrangères hors classe» ?  En somme pour Paris, il serait l’homme de la situation. Ceci pourrait donc expliquer la nouvelle «phase» de l’intervention française au Mali comme annoncée par M. Laurent Fabius. En tout état de cause, M. Rouyer, pour sa part, n’aura été que la victime collatérale d’une nouvelle vision diplomatique et géostratégique.  Ce qui n’est pas le cas de M. Bigot.

Laurent Bigot : inconditionnel d’IBK, pourfendeur du Mali et du Burkina Faso

Laurent Bigot était, jusqu’à ce jour, sous-directeur de l’Afrique occidentale et chargé du Mali au Quai d’Orsay, un «monsieur Mali», en quelque sorte. Dans une sortie médiatique très controversée au mois de juillet dernier, il suscita un débat profond sur le Mali et le Burkina Faso, débat au cours duquel, il soutint au passage le candidat malien Ibrahim Boubacar Keïta (lire encadrés).

La presse française explique aujourd’hui son limogeage par la non-observation de la retenue qui sied à des responsables de son rang, en tout cas, en France. Bref, M. Bigot a été, on ne peut plus, diplomatiquement incorrect.

Et ses amitiés avec IBK alors ? Il nous revient, de sources diplomatiques, qu’il facilitait les rencontres du candidat malien avec certains milieux huppés parisien.

Au même moment, M. Ibrahim Boubacar Keïta, était lui, pour sa part, à tort ou à raison, considéré comme un pro-putschiste, pour avoir sympathisé avec la junte au contraire du FDR (le front anti-putschiste) qu’il a délibérément laissé sur le quai pour faire le jeu des mouvements pro-juntes.  Une insulte pour démocrate !

Et aujourd’hui, comme un château de cartes, tout semble s’effondrer en cascade depuis une dizaine de jours autour d’IBK et de M. Bigot. Tenez : quelques jours auparavant (avant les limogeages), c’est la rencontre du Comité Afrique de l’Internationale Socialiste à Niamey, consacrée à la situation au Mali, qui fait une déclaration dans laquelle il (le comité I.S) se dit « préoccupé » face au « rôle que continue de jouer » l’ex-junte militaire au Mali, craignant qu’elle ne « nuise » au processus de démocratisation à venir dans ce pays en guerre ; une déclaration suivie du limogeage de celui-là même qui défendait la victoire d’IBK à la suite des joutes de 2002.

En somme, autant le Quai d’Orsay a désapprouvé M. Bigot, autant l’International Socialiste a honni l’irruption de la junte dans les affaires politiques visiblement cautionnée par Ibrahim Boubacar Keïta (on parle d’accointances entre son parti et l’ex-junte). Une désapprobation qui se traduit dans les faits, par le largage du premier (M. Bigot) par le Quai d’Orsay et un isolement pour le second par l’International Socialiste (I.S). Dans le communiqué ayant sanctionné la rencontre de Niamey en effet, le comité Afrique de l’I.S «demande à la communauté internationale de prendre les dispositions de nature à faire en sorte que la junte militaire ne nuise pas au processus de réconciliation nationale et à l’organisation des élections». L’International Socialiste va plus loin en exigeant, dans le même communiqué des  «élections libres, transparentes et crédibles  dans  les meilleurs délais avec, le cas échéant, le soutien de la MISMA (Mission internationale de soutien au Mali)». Un message, on ne peut plus clair. Mais ne s’agit-il pas surtout de mettre terme aux accointances aussi bien à Paris qu’à Bamako, qu’entre les deux capitales. Le Quai d’Orsay a, en tout cas, réagi. Curieuse coïncidence.

B.S. Diarra

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