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Lettre ouverte au Collectif des députés du « Pays Dogon »

Le 24 février 2020 au même moment que les maliens découvraient le Communiqué du Gouvernement décidant de la fermeture des check points tenus illégalement par la milice Dana Ambassagou sur les principaux axes routiers de la zone exondée de la Région de Mopti, un Collectif des députés du « Pays Dogon » publiait une lettre adressée au Premier ministre du Mali. Dix députés dont la liste est jointe, venant des quatre cercles du dit « Pays Dogon » auraient  signé cette lettre. L’essentiel de la lettre est contenu dans deux phrases : « Nous ne saurons donner notre approbation  à votre décision. Nous vous conseillons de privilégier la voie du dialogue ». La remise de la lettre à la presse indique que ses auteurs ont intentionnellement voulu la rendre publique.  Ce qui veut dire qu’elle nous est adressée à nous tous, maliens. C’est pourquoi nous intervenons dans l’important débat qu’elle a suscité.   .

Honorables députés du Collectif des députés du « Pays Dogon » !

La lecture de votre lettre Réf.  N 001/2020  du 24 février 2020, ayant pour  objet  la levée des check-points de la milice DANA AMBASSAGOU sur la Route nationale RN 15 (Route de Poisson), nous amène à vous poser ces quelques questions et à partager avec vous les réflexions qui suivent.

 

Honorables députés !

Nous vous disons sincèrement que la lecture de votre lettre nous a laissé perplexe et quelque peu dubitatif, concernant votre compréhension de votre rôle de député.  Sans être constitutionaliste ou spécialiste en la matière, en observateur de la scène politique nationale, nous constatons, en effet, sur cette question de levée des check points, une grave dissonance  dans la gouvernance de notre pays, entre l’exécutif et le législatif (même si c’est en partie) qui relèvent pourtant du même camp politique.

Nous ne voulons pas nous poser en donneur de leçons, mais nous pensons bien que le rôle du député appartenant à la majorité au pouvoir est de défendre la politique gouvernementale qui l’engage lui aussi en tant que représentant de la nation. Et dans ce cadre, nous voulons attirer votre attention  que jusqu’à preuve du contraire, le décret retirant à Dana Ambassagou son récépissé, donc impliquant son désarmement et son retrait des check points, n’a pas été abrogé. Donc la décision du premier ministre est conforme à la loi. Faut-il rappeler que ces mesures ont été prises avant l’arrivée de l’actuelle équipe aux affaires ? Le Premier ministre Boubou Cissé, disposant certainement de données que nous n’avons pas,  a jugé nécessaire de faire  appliquer la loi de la République.  Le rôle de tout député  de la majorité n’est-il pas, dès lors,  d’aider à l’application de la loi ?

Dans ce cadre et dans cette perspective, nous voyions votre rôle, honorables députés du Collectif des députés du « Pays Dogon » dans l’appel à la modération, dans le conseil à Dana Ambassagou et aux organisations qui lui sont proches de ne pas aller à l’encontre  de l’application de la loi du pays Si l’Etat décide de s’assumer et d’assurer la sécurité de tous, c’est son droit et c’est de sa responsabilité. Pourquoi ne pas croire à sa bonne foi et en ses capacités de remplir ses engagements ? L’avenir, comme toujours, jugera des résultats de cette initiative.

Honorables, vous  conseillez la voie du dialogue au Premier ministre. C’est bien. Mais, n’était-il pas tout aussi indiqué d’adresser le même conseil, par la même voie et au même moment à Dana Ambassagou ? Si non on  pourrait interpréter votre démarche comme un oukase (injonction, ordre impérieux en russe). Ou pire encore, comme une menace.  Ce serait impensable que des  députés de la majorité parlementaire n’aient pas d’autres voies, mieux indiquées pour se faire entendre de leur Premier ministre.

Honorables députés,  rien n’est encore perdu ! Vous pouvez contribuer à lever rapidement l’équivoque, à faire en sorte qu’il n’y ait plus d’apparente dissonance Vous pouvez toujours apporter votre contribution aux actions d’apaisement, de modération, d’empathie et d’amour de la vérité et la justice, et à la nécessité du vivre ensemble. Vous pourrez aider à faire comprendre que si l’Etat est obligé  d’en arriver là, c’est que quelque part  les check points tenus par les miliciens  « donso » de Dana Ambassagou  n’ont pas toujours comblé toutes les attentes. Dès lors,  rien n’oblige légalement l’Etat à maintenir le statuquo. Et ce n’est vraiment pas la catastrophe ou la fin du monde.

Honorables, devrions-nous vous rappeler  que vous êtes les députés de tout le Mali et pas seulement d’une région ou d’une zone. Alors défendez, avec

Dr Bouréima Gnalibouly DICKO

énergie et conviction, la paix partout  au Mali, pour tous les maliens, en  respectant rigoureusement, vous-mêmes d’abord, ensuite en contribuant à faire respecter par les autres citoyens, les lois de la République votées à l’Assemblée Nationale.  Ainsi, honorables du Collectif, vous compterez parmi les forces mobilisées pour la sécurisation, le retour de la paix et le vivre ensemble dans notre cher pays.

Fraternelle considération, honorables !

Bamako, le 26 février 2020

Pr Bouréima Gnalibouly DICKO

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