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Les 9 sages et le contentieux électoral: le Mali va-t-il rater le coach ?

Le projet de Constitution a été remis au Président de la Transition, le 27 février dernier. Parmi les points qui continuent de faire polémique dans les débats, figure en bonne place le rôle de la Cour constitutionnelle dans le processus électoral. Au terme du document rendu public par la commission de finalisation, la Cour Constitutionnelle reste le maître du jeu électoral, et cela, en dépit du fait que ses arrêts aient toujours été à l’origine de la contestation des résultats dans le processus électoral.

Le projet «final» de Constitution remis fin février au Président de la transition fait encore débat sur plusieurs points. Parmi lesquels, le rôle controversé de la Cour constitutionnelle en tant que juge du contentieux électoral. Avec ce projet de Constitution, la Cour constitutionnelle retrouve la plénitude de ses compétences en matière d’élection comme édictées par la Constitution de 1992. Elle reste maîtresse du jeu concernant l’élection du Président de la République, le Référendum et les élections législatives.
Dans le nouveau texte, c’est le Chapitre III qui est consacré à la Cour Constitutionnelle
Au niveau de l’Article 149, il est dit : «La Cour constitutionnelle contrôle la régularité de l’élection du Président de la République et des opérations de référendum. Elle examine les réclamations et proclame les résultats définitifs».
L’Article 150 ajoute : «La Cour constitutionnelle statue, en cas de contestation, sur la régularité de l’élection des députés et de l’élection ou la désignation des sénateurs».
Article 151 : «La Cour constitutionnelle est saisie, en cas de contestation de la validité d’une élection, par tout candidat, tout parti politique ou par l’autorité chargée de l’organisation des élections. Lorsqu’elle fait droit à une requête, la Cour peut, selon le cas, annuler l’élection contestée ou réformer les résultats».
Et la boucle est bouclée avec l’Article 154 : « Les décisions de la Cour constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours. Elles s’imposent aux pouvoirs publics, à toutes les autorités administratives et juridictionnelles et à toutes les personnes physiques et morales».
En termes clairs, la Cour constitutionnelle retrouve la plénitude de ses compétences en matière d’élection comme édictées dans la Constitution de 1992.
A ce niveau, l’Observatoire déplore la suppression de l’article 157 de l’Avant-projet qui stipulait : « Et lorsqu’elle fait droit à une requête, la Cour peut, selon le cas, annuler l’élection contestée ou réformer les résultats provisoires. Lorsque la réformation a pour conséquence l’inversion des résultats proclamés, la Cour constitutionnelle prononce l’annulation de l’élection (article 157) ». Pour ce regroupement, cela montre que peu de leçons ont été tirées de la crise électorale de 2020 par les membres de la Commission de finalisation.
Aussi, de l’avis de nombreux observateurs, les membres de la commission de finalisation ont tenté de résoudre cette épineuse question de la neutralité de la Cour Constitutionnelle dans le processus électoral en modifiant le mode de désignation de ses membres.
Ainsi, l’Article 145 parle de sa composition : «La Cour constitutionnelle comprend neuf membres qui portent le titre de conseillers. Le mandat des conseillers est de sept ans non renouvelable. Les neuf membres de la Cour constitutionnelle sont désignés comme suit : deux, par le Président de la République ; un, par le Président de l’Assemblée nationale ; un, par le Président du Sénat ; deux, par le Conseil supérieur de la magistrature ; deux enseignants-chercheurs de droit public désignés par un Collège constitué par les recteurs des universités publiques de droit ; un, par l’Ordre des avocats. Les conseillers sont choisis à titre principal parmi les enseignants-chercheurs de droit public, les avocats et les magistrats ayant au moins quinze ans d’expérience, ainsi que les personnalités qualifiées qui ont honoré le service de la Nation. Les conseillers ainsi désignés sont nommés par décret du Président de la République ».
Pour rappel, suivant l’Article 91 de la Constitution de 92 : «La Cour Constitutionnelle comprend neuf membres qui portent le titre de Conseillers avec un mandat de sept ans renouvelable une fois.
Les neufs membres de la Cour Constitutionnelle sont désignés comme suit : trois nommés par le Président de la République dont au moins deux juristes ; trois nommés par le Président de l’Assemblée Nationale dont au moins deux juristes ; trois magistrats désignés par le Conseil Supérieur de la Magistrature. Les Conseillers sont choisis à titre principal parmi les Professeurs de droit, les Avocats et les Magistrats ayant au moins quinze ans d’activité, ainsi que les personnalités qualifiées qui ont honoré le service de l’Etat».
Au regard de ce qui précède, on se rend compte que le problème reste entier, malgré le fait que le Projet de Constitution préconise un changement dans le mode de désignation des 9 sages.
Car, de l’avis des observateurs avisés, le rejet des décisions de la Cour Constitutionnelle n’est lié à un à problème de profil et de spécialité ; mais de personnalité, d’intégrité ou de courage.
Car, sous d’autres cieux, on a vu des membres de la Cour Constitutionnelle se faire virer sans jamais changer d’avis sur la chose jugée.
Le dernier cas qui nous vient en tête s’est passé récemment en Centrafrique où le président centrafricain, Faustin Archange TOUADERA, a démis de ses fonctions la présidente de la Cour constitutionnelle dans un décret aussitôt attaqué par l’opposition qui l’accuse de «coup d’Etat constitutionnel» dans le but de l’autoriser à briguer un troisième mandat, en octobre 2022.
A la tête de la juridiction suprême, son seul tort ayant été d’avoir invalidé plusieurs décrets et projets de loi du gouvernement.
Fin août, M. TOUADERA avait installé par décrets un comité chargé de rédiger une nouvelle Constitution mais, le 23 septembre, la Cour constitutionnelle les avait annulés sur saisine de l’opposition qui redoutait une remise en cause de l’interdiction de briguer plus de deux mandats dans l’actuelle loi fondamentale.
Chez nos voisins du Niger, les membres de la Cour se sont opposeés au projet du président Mamadou TANDIA de modifier la Constitution pour pouvoir briguer un nouveau mandat en juin 2009.
Le président nigérien, Mamadou Tandja, a procédé, le lundi 29 juin, à un remaniement de son gouvernement et limogé les sept juges de la Cour constitutionnelle, qui s’opposaient à son projet de référendum constitutionnel. Il s’agit des premières mesures du chef de l’Etat depuis qu’il s’est adjugé les pleins pouvoirs, vendredi dernier, après le refus de la Cour constitutionnelle d’avaliser son projet de consultation sur une nouvelle Constitution devant lui permettre de rester au pouvoir trois années supplémentaires.
En définitive, en donnant le pouvoir à la Cour constitutionnelle, saisi en cas de contestation de la validité d’une élection, par tout candidat, tout parti politique ou par l’autorité chargée de l’organisation des élections, selon le cas, d’annuler l’élection contestée ou réformer les résultats, elle devient de fait un organe où se joue un troisième tour entre les acteurs du processus électoral où dans la quasi-totalité des cas, c’est le candidat du parti au pouvoir qui est déclaré vainqueur.
Si le texte du Projet de Constitution reste en l’état, et en cas de oui au referendum, on peut dire, sans risque de se tromper, que le Mali aura raté le coach. Car, de toute évidence, cette transition était une vraie occasion de rebattre les cartes concernant, précisément, la Cour Constitutionnelle et son rôle controversé dans le processus électoral.

Par Abdoulaye OUATTARA

Source: Info-Matin

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