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Législatives au Mali. IBK président, mais la boussole pointe toujours vers le nord

Bamako (Mali), envoyée spéciale. Le premier tour 
du scrutin législatif qui se tenait hier au Mali a peu mobilisé. 
Le sentiment qu’au nord du pays la ville de Kidal jouirait 
d’un statut particulier préfigurant 
une autonomie 
de la région est largement partagé 
à Bamako, où l’on pointe les ambiguïtés françaises.

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C’est un dimanche comme un autre dans les ruelles de Missira, un quartier populaire du vieux Bamako. Les vieux profitent de la tiédeur matinale autour d’un brasero sur lequel chauffe le thé. Les femmes vaquent à leurs occupations. Assise sur le seuil d’une maison, Aïssata observe, rêveuse, leurs va-et-vient. La jeune femme n’est pas pressée d’aller voter. Elle ira peut-être aux urnes, mais le cœur n’y est pas. « Depuis que le président est assis sur son siège, il n’a rien fait. Il n’a pas tenu ses promesses sur le Nord. Il s’était engagé à rétablir la paix, mais il n’a pas encore trouvé la solution. C’est pour cela que les gens sont découragés », observe-
t-elle. Pour beaucoup, la décision de bouder le scrutin est plus ferme, prise depuis longtemps. Assommés par le chômage, les salaires de misère, les denrées alimentaires aux prix prohibitifs, les soucis de santé que l’on ne soigne plus faute d’argent, les Maliens ne croient plus au « changement » tant espéré. Il y a aussi ce paysage politique désespérant, écrasé par le présidentialisme, miné par ces « transhumants », comme les a baptisés la rue, qui passent d’un parti à l’autre au gré de leurs intérêts. Avec les élus, le lien de confiance est rompu depuis bien longtemps. D’un côté, la corruption généralisée, de l’autre, les difficultés du quotidien. L’abîme est béant. Rien n’y fait, pas même les prêches du vendredi et les appels des mouvements religieux qui ont multiplié les consignes de vote : les Maliens se désintéressent de ces élections.

Dans le Nord, la participation y semblait en nette hausse, à la différence du reste du pays

L’inquiétude et la désillusion portent surtout sur la situation au nord du pays, où les djihadistes qui, chassés des villes, s’étaient fondus dans la nature au moment de l’intervention militaire française n’ont pas déposé les armes. Pas plus que les rebelles touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) et du Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) dans lequel se sont recyclés des djihadistes d’Ansar Dine. À Kidal, ces deux groupes armés ne sont toujours pas cantonnés, comme le prévoyait pourtant l’accord préliminaire de Ouagadougou, signé en juin pour ouvrir la voie aux élections et à un processus de paix. Dans la cité touareg, les électeurs, peu nombreux (39 000 inscrits pour toute la région), avaient boudé les urnes au moment de l’élection présidentielle. Hier, la participation y semblait en nette hausse, à la différence du reste du pays. « La ville est survolée par les hélicoptères de la force française « Serval ». Le MNLA a appelé au boycott, avec une manifestation à l’ouest de la ville, mais ce mot d’ordre est peu suivi. Les électeurs affluent dans les centres de vote, sous la garde des casques bleus de la Minusma et des soldats maliens. Beaucoup voient dans ce scrutin une étape importante pour sortir de la crise », nous confiait hier un Kidalois joint par téléphone.

Peut-être cette mobilisation est-elle due au profil de certains candidats qui se présentent dans la région. Le RPM, le parti du président Keïta, a donné son investiture, dans la circonscription de Kidal, à Alghabass Ag Intalla, transfuge d’Ansar Dine et fils de l’aménokal Intalla Ag Attaher, le patriarche des Touareg Ifoghas. À Abeïbara, c’est Hamada Ag Bibi, un ancien porte-parole de ce groupe islamiste touareg, qui porte les couleurs du RPM. Pour permettre la candidature de ces familiers des arcanes de la politique malienne passés à la rébellion, les mandats d’arrêt internationaux les visant ont été levés le 27 octobre. De quoi nourrir l’amertume de ceux qui dénoncent l’impunité. « Il y a eu un malentendu. Les gens qui ont élu IBK ont compris qu’il allait faire la guerre au MNLA et aux autres groupes armés. Mais il n’a pas d’autre choix que de négocier avec eux, sous l’étroit contrôle de la communauté internationale », décrypte un familier du dossier.

Le sentiment que Kidal jouirait d’un statut particulier préfigurant une autonomie de la région est largement partagé à Bamako, où l’on pointe les ambiguïtés françaises. « Dans une situation explosive, où des acteurs antagonistes se font face, les Français ont opté pour une stratégie de prudence et de normalisation progressive, le temps de conforter une dynamique de réconciliation, analyse un haut fonctionnaire touareg impliqué dans les négociations. Mais les accords de Ouagadougou sont clairs. Il s’agit de rétablir, à terme, l’intégrité territoriale et la souveraineté du Mali. Sur ce point, le HCUA n’est pas dans une logique de bras de fer avec l’État, contrairement à un MNLA déchiré par les divisions, avec une aile militaire dure, constituée de jeunes Touareg revenus de Libye, qui n’avaient jamais vécu auparavant au Mali et qui rêvent toujours d’un État azawadien. »

Si elles ont semblé s’enliser ces dernières semaines, les discussions, en coulisses, se poursuivent. « Malgré la dégradation sécuritaire, les contacts n’ont jamais été rompus. Le problème, c’est Kidal, qui reste une sorte de trou noir, constate un Songhaï qui représentait les populations sédentaires en juin, à Ouagadougou. Il y a un agenda caché, sinon comment comprendre que l’armée française soit en train de faire de cette ville une entité spéciale qui ne dit pas son nom ? Pourquoi cette complaisance française vis-à-vis du MNLA et du HCUA où se fondent et mutent d’anciens djihadistes ? » Interrogations largement partagées, qui nourrissent un sentiment de méfiance vis-à-vis de l’ex-puissance coloniale, applaudie lors du déclenchement de l’opération « Serval ». À Bamako, on a remisé les drapeaux français.

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