L’économie verte n’est pas un concept nouveau, mais il a pris véritablement son décollage à partir de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable de 2012 ou « Rio+20 », dont il était l’un des principaux thèmes.
Le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) définit l’économie verte comme étant l’activité économique «qui entraîne une amélioration du bien-être humain et de l’équité sociale tout en réduisant de manière significative les risques environnementaux et la pénurie de ressources ».
Concrètement, l’économie verte est un outil de mise en œuvre du développement durable. Elle constitue ainsi un défi aussi bien pour les pays développés que pour les pays en développement, y compris le Mali.
En effet, le Mali, comme beaucoup d’autres pays africains, est confronté à de multiples défis auxquels l’ancien modèle économique semble avoir du mal à répondre. Malgré les taux de croissance supposés élevés de notre pays, en grande partie basés sur l’exploitation brute de l’or, mais aussi une urbanisation galopante et la création d’une classe moyenne, les inégalités au Mali ne cessent de se développer. La pauvreté demeure florissante, le sous-emploi et le chômage, la norme et l’insécurité alimentaire courante, cocktail favorable au développement de l’extrémisme. D’ailleurs, la crise dans le septentrion de notre pays puise ses sources dans ce breuvage de misères noires longtemps négligé par les pouvoirs publics successifs.
L’importance du travail décent pour parvenir au développement durable est mise en exergue dans l’Objectif de Développement Durable n°8 qui vise à « promouvoir une croissance économique soutenue, partagée et durable, le plein emploi productif et un travail décent pour tous ».
Selon l’Organisation Internationale du Travail (OIT), on estime que plus de 222 mille nouveaux emplois doivent être créés au Mali d’ici à 2030, simplement pour suivre le rythme d’accroissement de la population malienne en âge de travailler.
L’urgence pour les dirigeants maliens est donc de créer des milliers d’emplois pour les jeunes qui arrivent sur le marché du travail. L’économie verte s’avère alors une solution très intéressante. Faire le choix de cette dernière, c’est donc rompre avec le paradigme de l’ancien modèle.
La Communauté internationale l’a bien compris en adoptant en septembre 2015 son Agenda 2030 de développement durable où elle offre une approche holistique et multidimensionnelle aux problèmes communs de l’humanité. Cela se concrétise par les nombreuses cibles qui sont en lien avec ce concept, comme par exemple :
• l’agriculture et la pêche durables ;
• les énergies renouvelables ;
• le tourisme durable ;
• l’industrialisation verte ;
• l’économie circulaire ;
• et les moyens de mise en œuvre à travers la coopération internationale, la propriété intellectuelle et le transfert de technologies.
La situation est paradoxale. Si pour les pays développés la mise en œuvre de l’économie verte passe par une adaptation de leur développement actuel pour le rendre plus durable (tout en prenant en compte les nombreux freins et barrières techniques), les pays africains, eux, ne connaissent aucune entrave importante à ce mouvement. Tout en créant un modèle de développement qui leur est propre, ils peuvent accéder aux toutes dernières technologies et processus en la matière : c’est-à-dire faire le grand saut cantique à l’avant-garde du progrès.
Le Mali s’est fixé 2025 pour atteindre le niveau de statut de pays émergeant.
Et si la solution pour le Mali était le développement de l’économie circulaire ?
Celle-ci promeut une nouvelle façon de consommer, l’identification de nouveaux types de ressources, notamment à travers la valorisation des déchets et des méthodes de production plus respectueuses de l’environnement. Ce nouveau modèle économique apportera une solution au chômage, à l’insalubrité, à la raréfaction des ressources et à la pauvreté au Mali. Seulement, pour y arriver, notre Mali a besoin de former un capital humain suffisant et de pouvoir compter sur la coopération internationale pour assurer le transfert de technologie qui peut être adapté aux réalités locales et répondre ainsi aux besoins spécifiques de ce pays qui peine à trouver sa place dans cette Afrique de plus en plus «émergeante».
Les études de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) indiquent un potentiel de création nette d’emplois verts d’environ 60 millions d’ici 2030. Les opportunités dans les secteurs de l’énergie, de l’agriculture et de la gestion des ressources naturelles sont particulièrement porteuses en Afrique.
Une revue globale des compétences pour les métiers verts menée par l’OIT en 2011 et couvrant 21 pays, dont 4 en Afrique (Afrique du Sud, Egypte, Mali, et Uganda) démontre l’existence d’un fossé entre les politiques sur l’environnement d’une part et, les ressources humaines pour leur exécution, d’autre part. Afin de résorber ces déficits, les Etats se tournent de plus en plus vers la formation professionnelle qualifiante dans les métiers de l’environnement.
A ce niveau encore, le Mali est en retard.
Des leviers pour développer les compétences et l’entrepreneuriat pour la réussite de l’ODD au Mali.
La transition vers le développement durable implique des transformations structurelles profondes des économies et des sociétés, y compris les modes de production et de consommation, afin de les adopter au contexte actuel. De tels changements requièrent des entreprises maliennes capables de réorganiser leurs systèmes de production et des travailleurs disposant de compétences et de qualifications nouvelles. En parallèle, il faut des politiques de l’emploi et des politiques sociales adaptées de la part les autorités. Par ailleurs, il faut aussi des approches par filière pour les secteurs les plus concernés comme l’énergie, l’industrie, le bâtiment et l’agriculture, étant donné que les implications peuvent varier en fonction des secteurs économiques.
Déchets plastiques : des solutions inventives aux quatre coins du monde
Partout dans le monde naissent des initiatives de bonne gestion des déchets plastiques: du constructeur de bateau kenyan à l’entrepreneur colombien en passant par de grandes enseignes internationales, tous se sont donné le mot : ces déchets ont une valeur, transformons-les en nouvelles ressources !
Dans le domaine de l’immobilier : des briques en plastique
Comment servir deux bonnes causes en même temps : utiliser des déchets plastiques en les transformant en matériaux de construction et donner ainsi des murs à ceux qui n’en n’ont pas ?
C’est l’idée d’Oscar Mendez, architecte et entrepreneur colombien : construire des maisons pour les sans-abris en recyclant les déchets plastiques. Propriétaire de Conceptos Plasticos, une petite entreprise de recyclage de déchets, il met au point en 2014, après 12 ans de recherche, une brique composée d’emballages plastiques de toutes sortes, matériau idéal pour la construction de maison à bas coût. Auprès des «recycleurs », il rachète les déchets plastiques qui sont alors broyés et fondus. Renforcé par des additifs conférant aux briques une bonne résistance à la chaleur, ce mélange est alors coulé dans des moules.
Plongées dans l’eau froide, les briques se rigidifient sous l’effet de ce choc thermique. Rien de plus simple alors que de fabriquer ces logements : les briques s’assemblent comme des lego, à la main et sans aucune connaissance en architecture ou en maçonnerie.
L’UNICEF a déjà importé cette technologie en Côte d’Ivoire, où elle construit des salles de classe avec des briques de pastiques recyclés.
Valoriser n’est pas forcément recycler !
Quand il est question de «vie après la poubelle» d’un déchet quel qu’il soit, les spécialistes parlent plus volontiers de valorisation. A cela, il faut distinguer deux types de valorisation : la valorisation matière et la valorisation énergétique. La première consiste à réintroduire la matière dite usagée dans la production d’un nouvel objet. La seconde, quant à elle, revient à produire de l’énergie grâce au pouvoir calorifique du déchet. L’énergie produite pourra ainsi devenir du gaz pour les cuisines urbaines et/ou électricité sur toute l’étendue du territoire. Quels sont les meilleurs choix ? Difficile de répondre à cette question tant ils sont dépendants du contexte et des contraintes économiques, des besoins énergétiques de chaque nation mais aussi… des mentalités des habitants.
Faire du neuf à partir du vieux !
C’est bien là toute la finalité du recyclage ou, pour utiliser un terme plus professionnel, de la valorisation matière. Pour le grand public, c’est la formule magique : la solution !
Un avis que ne partagent pas obligatoirement les experts qui disposent de toutes les données pour savoir s’il est intéressant, tant économiquement qu’écologiquement, de recycler tel ou tel matériau. En premier lieu, tout n’est pas recyclable. Certaines matières complexes, souvent fabriquées à partir de différents polymères, ne le peuvent pas l’être, soit parce que les techniques ne sont pas encore inventées soit, plus simplement, parce que ce serait économiquement irréaliste. Parmi celles-ci, on trouve les papiers paraffinés, le verre contenant du plomb, certains bois traités, les plastiques collés à d’autres supports…
Au commencement était le….tri
Pour les plastiques, le tri est une tâche très exigeante tant il existe de polymères différents. Une fois récupérés, les déchets sont retriés, lavés, séchés et fragmentés par broyage. C’est seulement après ces différentes opérations que ces matériaux seront aptes à être réutilisés. Outre cette valorisation dite mécanique, il existe un autre processus, encore rarement utilisé : la pyrolyse qui permet de valoriser chimiquement les plastiques. Les polymères sont alors dissociés par traitement chimique pour redonner des matières premières. La valorisation chimique s’applique notamment aux matériaux thermoplastiques. Elle a lieu par chauffage et par ajout de réactifs chimiques. Bien entendu, l’ensemble de ces procédés nécessite de l’énergie et de la main d’œuvre. Et tout cela a un coût et une empreinte écologique. Ce sont autant d’éléments que les professionnels du recyclage mettent dans la balance quand il est question de parler de la «vie après la poubelle».
Valorisation chimique : solution de l’avenir ?
L’alchimie fait son grand retour. Il n’est plus question de transformer du plomb en or mais plutôt le plastique en fin de vie en pétrole. Un juste retour aux sources donc … Ce projet fait rêver les chimistes depuis déjà de longues années. Pour beaucoup, il ne s’agissait que d’un serpent de mer, mais il semblerait bien que, cette fois-ci, des entreprises américaines, japonaises et britanniques aient trouvé la bonne formule chimique pour faire de nos déchets plastiques un nouveau gisement d’or. La technique mise au point permet de traiter tous les types de plastiques, quel que soit leur état. En fin de compte, plus de 75% du poids de départ est transformé en pétrole brut de synthèse, prêt à être raffiné. Le reste se partage en gaz et en déchet final (moins de 10%). Il suffit d’une unité d’énergie pour en produire cinq, soit un rendement de 5 pour 1! Au cours actuel du baril, le procédé serait déjà rentable. Les grands groupes pétrochimiques semblent s’intéresser de très près à cette nouvelle technologie. Serait-ce le début d’une révolution ? Une coopérative de pêcheurs du Benin fabrique du carburant sur un petit modèle japonais qui produit 200 litres de gasoil par jour.
1 Kg de plastique = 1 litre de fuel
On l’a vu et, même si on a un peu tendance à l’oublier, le recyclage n’est pas forcément la panacée. Pour certains objets plastiques, il est beaucoup plus intéressant de les incinérer, non seulement parce qu’ils ont un très haut pouvoir calorifique, mais aussi parce que leur recyclage n’est pas toujours rentable d’un point de vue économique. Rien qu’en Europe, si tous les pays décidaient de faire un effort pour mieux valoriser énergétiquement les plastiques plutôt que de les mettre en décharge, ce serait plus de 1 milliard de barils de pétrole qui pourraient être économisés, allégeant ainsi la facture d’hydrocarbures de 80 milliards d’euros. A l’heure de la crise de la dette et de l’envolée des prix du pétrole, ce chiffre ne peut laisser insensible.
Le Mali peut donc être producteur de carburant à partir des déchets qui constituent en réalité de véritables mines urbaines intarissables et exploitables à vie et infinie.
Agri-Plas, une compagnie américaine spécialisée dans le recyclage de plastique, a elle aussi procédé à la transformation de plastique en mars 2009.
«Agri-Plas , en Oregon, a commencé la conversion des déchets de plastique en pétrole brut. Selon Business Wire , « la société a récemment rendu son premier pétrolier complet (8,200 gallons) d’huile d’une raffinerie à Tacoma, Washington, qui se traduit par une livraison finale de 196 barils de pétrole. » La méthode a été développée par Plas2Fuel, un Kelso, société d’énergie alternative Washington » Ourworld. Toutefois, la méthode japonaise semble avoir bien des avantages : des machines exportables et utilisables sur tous les continents et même dans de petites communautés.
Certains sont sceptiques. Mais les expériences faites au Japon paraissent concluantes.
Ce serait là un énorme progrès, car non seulement le plastique pourrait acquérir une certaine valeur, mais selon le PDG, 80% de CO2 seraient éliminés. En plus des tonnes de déchets pour lesquelles on ne trouve plus de place en certains endroits.
Energies renouvelables : la solution ?
Le Mali dispose d’importants potentiels pour le développement des énergies renouvelables (solaire, éolien, hydroélectrique, biomasse, géothermie). Or, ces potentiels sont largement inexploités puisqu’ils n’ont suscité jusque-là qu’un faible intérêt politique et qu’ils nécessitent des niveaux d’investissement non négligeables. Toutefois, leur coût a considérablement baissé et elles tendent à devenir de plus en plus compétitives par rapport aux énergies fossiles. Selon les projections de Bloomberg, certaines énergies comme le solaire pourraient même devenir moins chères que le charbon dans les dix prochaines années.
Compte tenu de l’escalade continue des prix de l’énergie sur le marché mondial, la valorisation énergétique des résidus organiques et des flux de déchets est une proposition de plus en plus attrayante. Parallèlement à la production d’énergies renouvelables stockables, la production décentralisée de biogaz peut non seulement contribuer au développement des régions rurales, mais également à celui des petites et moyennes entreprises.
Abdoul Karim Dramé
Encadré
« Promouvoir la Finance Verte pour une croissance durable en Afrique »
La 5ème Conférence internationale sur la finance verte s’est tenue à l’Hôtel Radisson Blu de Dakar le 3 décembre 2019. Cette conférence était conjointement organisée par l’institution African Guarantee Fund (AGF) et le Fonds Nordique de Développement (NDF). Au nombre des invités, des experts de la finance internationale et de l’écologie.
L’objectif de cette rencontre était de donner aux pays africains, une expertise dans la recherche de financement pour le développement de l’économie circulaire.
En effet, les besoins en financement de ce secteur sont estimés à 12 400 FCFA à l’horizon 2030. «A cette fin, la participation des capitaux privés est nécessaire pour combler le déficit».
Le panel était composé de : banques commerciales, institutions financières spécialisées, micro-finances, banques centrales.
Il faut également souligner la présence des PME/PMI évoluant dans les secteurs de gestion de l’eau, l’assainissement et la valorisation de déchets, tous étaient présents.
AK Dramé
Source: Le Challenger