La ville de Toukoto, située sur le Bakoye dans la région de Kayes, fut fondée vers 1720 par des peuls venus du Macina, avec à leur tête le grand chasseur Sangana Massa Diakité. On trouve cette information dans l’étude d’impact environnemental et social le long du tracé de la piste de Badougou-Toukoto-Bafoulabé réalisée en 2010 par Robert Dembélé dans le cadre du Projet sectoriel des transports. L’expansion de Toukoto, selon cette étude, est consécutive à l’arrivée des Français et précisément d’Archinard qui, de retour d’une mission à Ségou en 1881, amena 11 familles avec lui pour construire le pont de Toukoto sur le Bakoye. Pour ce qui est du développement économique de Toukoto, il est intimement lié à l’histoire de la régie du chemin de fer Dakar-Bamako car c’est là-bas où fut construite la première école des chemins de fer qui a formé beaucoup de cheminots de l’Afrique occidentale française (AOF). L’école était logée dans la Cité administrative qui fut construite en 1928. La même cité abritait le dépôt ferroviaire et la fonderie. Toukoto était, avant l’indépendance, l’atelier le mieux équipé qui assurait la formation des cheminots de l’AOF.
Après l’indépendance, l’école des chemins de fer de Toukoto ferma ses portes. Au fil des années, plusieurs bâtiments de la Cité administrative étaient occupés par les cadres cheminots et autres fonctionnaires de l’Etat. La gare de Toukoto était toujours animée, car c’est là-bas où se croisaient les trains voyageurs qui reliaient au quotidien Bamako et la ville de Kayes. On accordait alors plus de temps aux voyageurs de se dégourdir les jambes ou d’aller manger chez Kadi M’Baye ou chez sa coépouse Yssa Diaby, toutes deux originaires du Sénégal qui savaient bien faire du délicieux plat du riz au gras avec poisson. Le croisement des trains profitait aussi aux vendeuses de boulettes, de poulets rôtis, des produits saisonniers ou aux gamins qui offraient du thé chaud aux voyageurs.
La Cité administrative de Toukoto a aussi abrité les festivités du camp des pionniers jusqu’à la construction d’un camp pour la jeunesse. Faute d’entretien et surtout à cause de l’arrêt du trafic ferroviaire, la plupart des bâtiments de la Cité administrative de Toukoto sont aujourd’hui à l’abandon. Aucune mesure de protection n’a été prise par l’Etat ni par la commune pour les sauvegarder.
Il est à retenir que Toukoto abritait la plus importante base des chemins de fer du Soudan français (actuel Mali). Les syndicalistes de la ville prirent une part active dans la légendaire grève des cheminots de 1947 qui ébranla l’économie coloniale de la sous-région.
Madiba KEITA
Source: L’ Essor- Mali