Une telle question s’étonne et pourrait être condamnée avec rigueur quand on sait qu’elle est balayée par l’article 25 de la Constitution du 25 février 1992 en ces termes : « le Mali est une République indépendante, souveraine, indivisible, démocratique, laïque et sociale ».
Les religions cohabitent pacifiquement depuis longtemps. Elles entretiennent de relations cordiales. Les musulmans vont et prient dans les Mosquées sans obstacle. Les chrétiens et les adeptes des religions traditionnelles en font autant. Les groupements religieux sont nombreux et on est libre de créer et d’adhérer celui de notre choix en toute liberté. Tout va bien. La liberté de la religion, garantie par la Constitution et les textes y afférant, est en parfaite harmonie.
Et puis, le malien au plus profond de lui n’est ni musulman ni chrétien. Son quotidien est toujours influencé par les religions que l’on qualifie traditionnelles. Il a beau prier dans la Mosquée, dans l’Eglise, il ne peut s’empêcher de pratiquer les traditions ancestrales pour subvenir à ses besoins. Cette magnifique histoire dans laquelle chaque ethnie avait sa propre religion qui la servait de protection et abondance des cultures, est toujours vivante dans l’individu malien. Il s’en sert souvent sans même se rendre compte par le terme : « ils ont… ». Alors OUI, le Mali est bel et bien un pays laïc.
Pourtant, il serait intéressant de voir tout près d’une œil éclairée pour être convaincu que depuis quelque temps cette laïcité s’abandonne au profit de l’islamisation du pays.
En effet, pour accéder au pouvoir, le régime actuel semble promettre aux chefs religieux des choses compromettant les fondamentaux de notre République. On se souvient de la présence remarquée du chef d’Etat dans tous les grands rassemblements religieux avant son accession au pouvoir. Ces promesses semblent être une réalité depuis son arrivée sur le trône à travers ses discours où il ne manque pas d’afficher sa religion. Aussi, presque tous les services publics du pays abritent des Mosquées. Les jours fériés deviennent multiples au profit de la religion. Certains chefs religieux sont plus puissants que l’Etat. Ils nomment les ministres et les forcent à la démission. Ils parlent comme ils veulent sans s’inquiéter de la justice. Non, tout ne va pas bien. L’islamisation du pays est en marche.
Comme tout cela n’étant pas suffisant, ils veulent tout détruire pour satisfaire leurs intérêts égoïstes. Ils veulent mettre le feu au pays pour arriver à leur fin. Les privilèges ne les suffisent plus, ils veulent tout. Ils veulent et ils peuvent. Car ils ont pu laver les cerveaux de la majorité des citoyens. Les politiques ont contribué à renforcer leur domination sur le malien. Celui-ci est prêt à se sacrifier pour la religion plus tôt que pour son pays. Les jours, les semaines qui viennent s’annoncent alors difficile. Un pays islamique, nous en sommes.
Nous avons donc une raison de conclure malgré que ce régime ait échoué sur tous les plans du développement, il doit être défendu contre les chefs religieux. Car ceux-ci ne sont pas motivés par le changement que nous aspirons. Ils ne défendent que leurs propres intérêts en se cachant derrière la religion.
Denis KAMATE
Spécialiste en Droits de l’homme et Justice internationale