La traditionnelle cérémonie de présentation de vœux au chef de l’Etat n’est pas seulement l’occasion d’un échange de civilités entre le président de la République et les premiers représentants des différentes couches socioprofessionnelles et institutionnelles du pays, elle est surtout le lieu de faire un bilan du chemin parcouru, l’évocation des défis et enjeux actuels et futurs et l’annonce des solutions envisagées.
Pour un premier exercice, le président de la République a bien profité de l’opportunité pour fixer le cap de son mandat en général et les priorités pour cette année en particulier pour notre pays qui est en train de tourner définitivement les pages sombres d’une crise institutionnelle qui, pendant près de 18 mois, a mis à mal les principes républicains qui faisaient la fierté du Mali souverain.
Honneur redonné aux autorités religieuses et traditionnelles
Comme d’habitude, ce sont les représentants des familles fondatrices qui ont ouvert le bal des présentations de vœux. Leur porte-parole, Modibo Niaré, a félicité le président de la République pour sa brillante élection à la magistrature suprême et a salué le bon déroulement des opérations électorales qui, de son point de vue, témoigne de la maturité d’esprit qui caractérise le Malien, mais aussi son respect des principes républicains.
« Le pays est encore convalescent et les défis sont nombreux. La réconciliation, le recouvrement de l’intégrité territoriale, la reconstitution du tissu social et économique, sont autant de chantiers sur lesquels les Maliens vous attendent Monsieur le président. Puisse le Tout-Puissant guider les actions du président pour que le Mali retrouve son lustre d’antan pour une paix durable entre tous les fils du pays », a-t-il conclu.
Le président du Haut conseil islamique du Mali (HCIM), El hadj Mahmoud Dicko, a, au nom de toute la communauté musulmane, formulé les mêmes vœux de paix et de réconciliation. Il a évoqué la question du Nord qui, de son point de vue, doit être résolue dans le dialogue. « Si nous savons que le Mali est un et indivisible, nous devons nous mettre à table pour discuter. Ceux qui, à un moment donné, étaient égarés sont aussi des Maliens. Nous devons aller vers le dialogue pour qu’ensemble nous trouvions une solution définitive aux divergences. C’est en cela que le Mali parviendra à une paix durable », a-t-il préconisé.
Le président du Haut conseil islamique du Mali a salué les initiatives prises par le président de la République depuis son élection. La tenue des Assises sur la décentralisation et des Concertations nationales sur le Nord est un signe d’espoir pour la paix au Mali, a-t-il souligné.
Par ailleurs, El hadj Mahmoud Dicko s’est félicité de l’initiative partenariale de notre pays avec le Royaume chérifien dont l’un des actes majeurs est l’envoi récent de 500 imams au Maroc pour une formation de deux ans sur les principes de l’islam. Il a souhaité que cette initiative favorise l’insertion des élèves coraniques dans la vie socioéconomique.
El hadj Mahmoud Dicko a quand même regretté la non-application de la loi reconnaissant la légalité du mariage religieux, la faible représentation de la communauté musulmane dans l’organisation des opérations du Hadj, l’octroi d’une parcelle pour la construction du siège de l’organisation et d’une clinique.
Il a réitéré le soutien de la communauté musulmane au président de la République pour lutter contre la corruption dans notre pays. « La tolérance, le respect de l’autre doivent être votre seule arme pour l’accomplissement de votre mission. Monsieur le président, le peuple malien dans son ensemble vous a fait confiance. Soyez à l’écoute de ce peuple. Pour cela, évitez les rancœurs. Car aucun pays ne peut se développer sur des sentiments de méfiance et d’intolérance ».
Pour la restauration de la dignité des Maliens
L’archevêque de Bamako, Mgr Jean Zerbo, a, lui, souligné la situation de déliquescence du pays qui requiert un sursaut d’orgueil auquel il invite le président de la République. « La lourde charge qui vous a été confiée, vous avez accepté sous serment devant Dieu et devant les hommes de la porter. Elle s’appelle redonner au Mali, sa dignité pleine et entière, dignité salie et déchirée au point de nous laisser ou presque à la face du monde par nos divisions et nos combats fratricides », a-t-il rappelé.
Il a dénoncé que le spectacle des déplacés et des réfugiés, les tortures et les flagellations, les amputations, l’imposition du port de la burka, la destruction des monuments dédiés à la mémoire des saints de l’islam à Tombouctou, la profanation des Eglises et des temples, sont autant de graves atteintes aux libertés fondamentales dont la volonté manifeste était de faire basculer le Mali dans une République islamique en bannissant la laïcité, un des principes fondateurs de notre Constitution, a estimé le prélat, qui a réaffirmé l’attachement de l’Eglise catholique à ce principe de laïcité, garant de la liberté religieuse.
Traduire en actes les promesses faites aux Maliens
Le délégué général de l’Association des groupements d’Eglises et de missions protestantes du Mali (AGEMPM), le Révérend Youssouf Dembélé, a exprimé les mêmes sentiments au président de la République, avant de formuler des vœux de paix et de communion de l’ensemble de la communauté protestante de notre pays. Le porte-parole de l’Eglise protestante a souhaité l’émergence d’un Etat de droit, d’une nouvelle classe politique qui sera au service du peuple.
Dans ses réponses, le président de la République, Ibrahim Boubacar Kéita, a réitéré son engagement à traduire en actes les promesses faites au peuple malien. S’adressant aux familles fondatrices, le chef de l’Etat a promis de mériter la confiance du peuple malien : « Tous les actes que nous poserons seront motivés par cette volonté d’assurer le bien-être du peuple malien ».
Le chef de l’Etat a assuré le Haut conseil islamique de la démarche qu’il entend conduire pour lutter contre l’impunité et la corruption. Mais cette lutte, le président Keita la veut sans fioriture, ni fanfaronnade. « Nous n’avons aucun sentiment de rancœur contre qui que ce soi. La lutte que nous mènerons contre la corruption se fera sans règlement de compte. Mais il faut que la justice soit. Nous combattrons l’impunité de toutes nos forces ».
Tous les dossiers relatifs au foncier seront décortiqués à l’aune de la justice et avec toute la rigueur qui se doit, a promis IBK au Révérend Youssouf Dembélé, délégué général de l’AGEMPM victime de spéculation foncière ces dernières années. Le chef de l’Etat a sollicité l’accompagnement de ses interlocuteurs, avant de formuler, à son tour, ses vœux de nouvel an aux familles fondatrices, à l’ensemble de la communauté religieuse et au peuple malien.
Rassemblés par Youssouf Coulibaly