«L’exploitation des ressources minières au Mali : Comment assurer un partage juste et équitable pour une majorité de maliens» ? Telle était le thème d’une communication présentée par Soumaïla Lah et Moussa Bagayoko lors d’un colloque organisé à Bamako du 3 au 4 juillet 2023. Les présentations et les débats ont porté sur l’État des lieux des ressources minières au Mali et le rôle des différents acteurs ; les propositions pour l’amélioration des revenus de l’État dans l’exploitation des ressources minières ; les conditions d’un partenariat gagnant-gagnant entre les investisseurs du secteur et l’État du Mali, des pistes pour la régulation de l’exploitation artisanale des ressources minières, l’établissement d’un RSE minimum (Responsabilité sociale des entreprises) à mettre en oeuvre pour un développement local renforcé, des propositions pour la minimisation des impacts environnementaux et sociétaux de l’exploitation des ressources minières au Mali et des recommandations pour l’accroissement de la part nationale dans l’exploitation de ce secteur.
Lors de sa présentation, M. Biheng Bi, administrateur et Président directeur général de BISY Group a rappelé que «le secteur minier du Mali est un segment important de l’économie malienne avec un énorme potentiel». Et pour lui, avec la découverte récente du lithium dans notre pays, «un monde de possibilités s’est ouvert». N’empêche que pour saisir cette opportunité, a conseillé l’expert, «le Mali doit développer ses capacités de raffinage pour augmenter sa part de matières premières raffinées. Avec un marché mondial du lithium dynamique, les avantages pour le Mali peuvent être énormes».
«La collaboration minière avec la Chine dans ce projet de lithium permet au Mali de s’associer à une société minière de renommée industrielle et lui permettra de capturer une partie plus importante de la chaîne de valeur, générer plus de revenus, créer des emplois et stimuler le développement économique local», a souligné M. Biheng. Ingénieur chimiste qualifié et président de «Fateel Technologies», Dr Al Shedia axé sa communication sur les opportunités qui se présentent non seulement au Mali, mais à l’ensemble du continent africain.
Et le potentiel que le secteur minier offre à notre continent est considérable. «L’Afrique a l’opportunité de prendre les devants dans l’industrie minière mondiale en créant un environnement propice, en favorisant l’expertise locale et en assurant une utilisation équitable des ressources naturelles», a souligné cet expert. «L’Afrique regorge de ressources naturelles abondantes et abrite des esprits brillants qui ont le potentiel de propulser l’industrie vers de nouveaux sommets. Il ne suffit que d’une véritable et sincère volonté pour libérer la grandeur qui réside au sein du continent», a indiqué Dr Al Shedi. Cependant, a-t-il regretté, «il est crucial de reconnaître que le secteur minier mondial ne tire pas pleinement profit de la contribution africaine. Le potentiel de l’Afrique et les opportunités associées à ce secteur ont été relativement modestes par rapport à ce qu’ils pourraient être».
Une batterie de recommandations pertinentes
A la lumière des présentations et des débats, les participants ont formulé de nombreuses recommandations pour accroître la part nationale dans nos industries extractives. Ainsi, les discussions autour de la recherche d’un modèle qui pourrait assurer au Mali sa propre «success-story» ont été sanctionnées par des recommandations comme, entre autres, sponsoriser 10 à 15 talents maliens par an, établir des partenariats avec les universités pour des formations spécifiques, nouer des partenariats avec les compagnies pour des expositions stratégiques, mettre en place un conseil minier stratégique indépendant, développer un mode d’investissement minier adapté au Mali.
Il a aussi été recommandé de faire de l’Ecole africaine des mines une réalité ; de redynamiser toutes les structures d’encadrement du secteur minier afin de relever les nombreux défis de l’heure ; créer un holding qui prend en charge l’ensemble des participations de l’Etat pour les fructifier ; mettre à profit les sources d’énergies (l’uranium, le soleil, le vent, les cours d’eau…) pour investir dans les infrastructures spécifiques au secteur minier (énergétique, locomotive, fluviales, aéronautique…) ; investir dans la formation des talents nationaux pour atténuer les coûts de recherches…
Maintenir la conformité de l’enregistrement des flux financiers aux normes de l’ITIE (Initiative pour la transparence dans les industries extractives) ; créer un compte d’affectation spécial des ressources tirées du secteur minier (dividendes, TVA) pour financer le développement ; renforcer la synergie entre les secteurs miniers et énergétiques ; prendre en compte l’intérêt national dans la rédaction et dans l’application de nos textes juridiques, particulièrement le Code minier ; recadrer et suivre de façon rigoureuse la question de l’environnement…
Les participants ont également recommandé la révision et l’amélioration de la cartographie et des bases de données pour une gestion rationnelle des titres miniers (cadastre minier) et un meilleur contrôle et suivi des activités minières ; la mise en place d’une station pilote de traitement/séparation sans mercure (Projet Pro.SM, ambassade américaine) ; l’évaluation des couloirs existants ; la sensibilisation de la population sur les lois et règlements miniers ; la sensibilisation sur le rôle social des sociétés minières (RSE)…
Des recommandations pertinentes dont la mise en œuvre progressive va sans doute permettre à notre pays de faire des mines un atout de développement économique et social !
Moussa Bolly
Source: Le Matin