La Constitution du 25 février 92 aussi bien que la charte de la transition issue des trois jours de concertation nationale inféodent totalement le poste de Premier ministre au seul Président de la République dont il tient tout son pouvoir et toute sa légitimité. Ceci étant, la proposition d’un Premier ministre de transition issue du M5-RFP n’est qu’une stratégie de diversion orchestrée par des forces obscures pour affaiblir davantage ou discréditer ledit mouvement. D’ailleurs, il n’existe aucune contrainte dans la charte ou la loi fondamentale qui exige que le nom du Premier ministre proposé par le M5-RFP soit retenu par le Président Ba N’DAOU quand on sait que l’article 38 lui confère toutes les prérogatives pouvant lui permettre de designer le Chef du Gouvernement de son choix.
De juin 92 à Août 2020, tous les présidents successifs du Mali démocratique ont utilisé cette disposition constitutionnelle pour choisir le Premier ministre pour ne pas dire Premier des ministres de leur choix au détriment des propositions de choix souvent faites par les forces politiques qui les ont aidé à accéder à la tête de la magistrature suprême. Ba N’DAOU fera-t-il exception à cette règle ? Je ne le pense pas sachant que les militaires du CNSP veulent avoir la mainmise sur l’appareil d’État durant tout le long des 18 mois de la transition.
Le rejet des dossiers de candidature du M5-RFP ou une éventuelle démission forcée du Premier ministre issue de leur rang pourrait amener les responsables politiques de ce mouvement à entreprendre des actions de contestation contre les dirigeants de la transition. Ces actions de contestation peuvent être présentées comme un bon alibi pour montrer à l’opinion publique nationale et même internationale jusqu’à quel niveau peut arriver la nuisance desdits responsables politiques dans leur lutte pour la conquête et l’exercice du pouvoir, ou plus simplement pour les postes au mépris de l’intérêt général, de l’intérêt supérieur de la nation. En conséquence, il pourrait y avoir une forte répression avec à la clé des emprisonnements au nom du respect de l’autorité de l’État. N’oublions pas que le combat politique est essentiellement un combat de rapport de force.
Le M5-RFP a conquis le cœur de beaucoup de Maliennes et de Maliens parce qu’il a su dénoncer à temps et avec méthode les tares du régime d’IBK. Ces dénonciations doivent continuer jusqu’à ce que le Mali devienne celui de nos «rêves». Ce mouvement insurrectionnel doit désormais s’ériger en mouvement de veille citoyenne car l’absence d’opposition crédible a terni l’image de notre jeune démocratie. M5-RFP a suscité un nouvel espoir dans ce pays qui fera en sorte que le débat politique ne sera plus le monopole d’un camp ou d’un clan. Cet espoir doit être maintenu si nous voulons réellement un nouveau Mali et un nouveau type de dirigeant politique malien. La politique ne doit plus être un dîner de «partage de gâteau».
Le «consensus» a paralysé notre démocratie pourtant chèrement acquise. Le fait que toute la classe politique s’est mise à obéir aux désidératas du Prince du jour a amené les maliens à considérer tous les responsables politiques comme des courtisans («na-min») ou des pervers («ma-langolon»). La politique doit retrouver ses lettres de noblesses au Mali si nous voulons que notre pays soit géré par des hommes capables et intègres. La politique du «ventre» et du «bas-ventre» doit être à jamais banni dans ce pays. Le M5-RFP est une chance pour le sauvetage du bateau Mali qui tangue. L’autorité morale de ce mouvement doit convaincre le comité stratégique de sursoir à son projet de proposition de candidature pour diriger la Primature. C’est un piège!
Si les responsables politiques du M5-RFP arrivent à mieux s’organiser au cours des 18 prochains mois ils pourraient diriger ce pays au terme de la transition. Dans le cas contraire, M5-RFP mourra de sa belle mort à cause des querelles de personnes ou de clans.
Que Dieu nous en préserve ! Amina Yarabi !
Sambou Sissoko
Source : INFO-MATIN