Le cinéma malien a frôlé la honte de peu. Notre pays a failli rater le grand rendez-vous du cinéma africain. Il s’agit de la 26e édition du FESPACO 2019 qui se tiendra à Ouagadougou au mois de février prochain. Il n’y eut été le génie créateur de jeunes cinéastes, le Mali n’allait pas avoir un film en compétition dans la prestigieuse catégorie des longs métrages.
Ce aurait été une première pour notre pays qui a toujours fait une participation honorable au FESPACO depuis la création de ce grand rendez-vous biennal du cinéma et de l’audiovisuel africain en 1969. En effet, notre pays a déjà remporté le prestigieux prix de « l’Etalon d’or Yennega » à trois reprises : le célèbre cinéaste Souleymane Cissé en 1979 et en 1983 avec les films « Baara » et « Finyè » et l’ancien ministre Cheick Oumar Sissoko avec « Guimba » en 1995.
Pour cette 26e édition, le Mali devrait participer au FESPACO avec le film « CHEYTANE » ou Satan. Malheureusement, d’après nos informations, il semble que ce film n’est pas encore prêt. Il est entièrement financé par le budget à hauteur de 800 millions de nos francs. Pourtant lors du premier coup de clap de ce film à Siby, le ministre de la culture, N’DiayeRamatoulaye Diallo, avait fait remarqué que le financement de ce film par le budget national est le signe éloquent de la forte volonté et détermination du Président de la République et du Gouvernement à faire de la renaissance du cinéma malien une réalité. Elle avait pris l’engagement ferme de finir le film pour que le Mali soit au rendez-vous de la 26e édition du FESPACO 2019. Lors de ce coup de clap, l’atout charme d’IBK avait annoncé la création du « Fond d’appui à l’industrie cinématographique. Ce fond va recevoir une dotation initiale de 6 milliards de FCFA. Il servira à soutenir les projets des cinéastes et professionnels des métiers du cinéma, à créer des infrastructures adaptées et les doter d’équipement modernes… ». Près d’un an après, rien. Notre pays a failli être humilié. Car, le Mali n’allait pas avoir de film en compétition. Curieusement, selon nos sources, presque la moitié du budget alloué pour la réalisation de ce long métrage s’est évaporée. Selon nos sources, cet argent aurait été dépensé dans la location du matériel de production du film et dans des billets d’avions entre Bamako et Paris. Conséquence, les comédiens et les artistes courent toujours derrière leur argent. Ils ne savent plus comment se faire payer. Où sont donc passés les 800 millions mobilisés par l’Etat ? Ou la ministre Diallo a-t-elle incapable de mobiliser les 800 millions pour finir le film dans le délai ?
Heureusement que dans notre pays, nous avons des jeunes dont le génie créateur est fertile. En effet, notre pays sera honoré au FESPACO 2019 par deux jeunes maliens qui ont réalisé un long métrage à moins de deux millions de nos francs. Il s’agit de ‘’Barkomo’’ est un film d’une heure 15 minutes, réalisé dans un petit village éponyme, dans le cercle de Bandiagara, région de Mopti. Il est réalisé par Aboubacar Draba et Bocari Ombotimbé, deux jeunes qui croient en leurs génies créateurs. Le scénario est coécrit par Bocari Ombotimbé et Erica Pomerance. Il est produit par DARK FACE FILMS. L’originalité de ce film réside dans ses conditions de réalisation. Ses auteurs racontent qu’il a été tourné avec presque zéro franc. Car, les comédiens et acteurs étaient volontaristes. Ils sont de Bamako et du village de Barkomo. Aboubacar Draba raconte que tous croyaient en l’aventure et ont donc travaillé sur la base de la confiance. Il rassure qu’aucun financement n’accompagne la production à part une contribution matérielle de Koriam Médias Prod. Tourné en 14 jours, le réalisateur estime le budget à un million et demi de francs CFA.
L’histoire du film
Barkomo ou la grotte est une fiction tirée d’une histoire réelle. Il retrace la création d’un village du nom de Barkomo. Elle met en scène SalimataTapily dans le rôle d’actrice principale, avec le surnom de ‘’Yamiyo’’. Cette femme n’avait toujours pas d’enfant après dix ans de mariage. Alors, elle proposa à son mari de prendre une seconde épouse pour assurer sa postérité. Le mari épousa une seconde femme qui donna naissance à un garçon. C’est alors que tout le malheur de la première a commencé. Yamiyo subit régulièrement des insultes et des humiliations de la part de son mari et de sa coépouse parce qu’elle n’avait pas d’enfant. Ainsi, un jour elle se disputa avec sa coépouse, son mari l’a battue. Lasse de supporter cette situation, elle décida de mettre fin à sa vie en se jetant du haut d’une falaise. Elle survit par miracle. Elle se dirigea vers un autre village qui ne connaît que des malheurs. Ici, il ne pleut plus depuis longtemps, la famine et la pauvreté sont le quotidien des habitants. C’est alors que Yamiyo fut accueillie et hébergée. Elle se rendit compte qu’elle était enceinte d’un garçon. A sa naissance, l’enfant rapporta le bonheur et la joie de vivre dans le village qui a décidé de le baptiser ‘’ Anabalé’’ (gaucher). Ce garçon était choyé de tous. Grandi, il tomba amoureux de la fiancée du prince. Anabalé n’avait d’autres choix que de fuir avec sa dulcinée pour fonder le village de Barkomo.
C’est ce film qui représentera la Mali en compétition au FESPACO dans la catégorie long métrage. Bonne chance donc aux jeunes réalisateurs patriotes.
Aux dernières nouvelles, il semble que le film Cheytane serait toujours à la Maison de production à Paris.
Youssouf Diallo
Source: La Lettre du Peuple