Si autrefois, on l’appelait la grande muette, les temps ont bien changé. Mardi, à Saverdun, le public de la journée du combattant a pu le vérifier. Il a pu écouter les militaires relater les interventions de l’armée française sans langue de bois. Ces derniers n’ont pas caché les doutes et les problèmes rencontrés lors des opérations extérieures. Le colonel Chenebeau, à travers un passionnant exposé, a dressé un tableau du combat de contre-insurrection en Afghanistan. Une guerre qui a marqué une coupure pour l’armée française. La fin de l’interposition (Liban, Balkans…) et le retour au combat. C’est d’ailleurs à ses yeux, l’expérience afghane, «un laboratoire», qui a permis d’être si efficace au Mali quelques années plus tard.
Plusieurs facteurs à cela : le bond technologique, la coopération interarmes, le retour du renseignement et de la communication avec la population. En Afghanistan, les Américains ont d’ailleurs redécouvert les écrits du colonel Trinquier, disciple de Lacheroy, un des théoriciens de la guerre révolutionnaire.
Le chef de corps du 1RCP a expliqué pourquoi l’insurrection n’avait jamais été éteinte malgré la supériorité militaire de la coalition. De son exposé, on comprend que la principale erreur a été de vouloir imposer nos standards occidentaux à une population qui en est très éloignée. «Nous avons raté une étape, nous n’avons pas compris la réalité de ce pays. L’Afghanistan est incompréhensible pour des Occidentaux», souligne-t-il. Pour lui, si la population a été contente de voir partir les talibans, la coalition n’a pas su derrière en profiter. «N’avons-nous pas rompu les équilibres en tentant de moderniser le pays trop vite et en mettant en place une administration centralisée incompréhensible pour les Afghans ?», s’interroge-t-il. «Nous avons essayé de gagner les cœurs mais il y avait trop de pesanteur occidentale dans notre façon de faire». Plus la barrière de la langue. Le colonel a également rappelé que les politiques n’avaient jamais fixé «d’état final recherché». Sans compter que les élections présidentielles en plein engagement n’ont pas aidé.
Suivaient derrière une intervention sur la Centre-Afrique, le Mali, la place de l’aumônier en opérations et le facteur psychologique. Un après-midi pour le moins passionnant.