La mauvaise gouvernance et la corruption au cœur de l’Etat, les négociations avec les groupes armés, la réconciliation nationale, l’école malienne en danger, la sécurité mal maîtrisée, l’épidémie Ebola, l’économie en mauvaise posture, le RAVEC au rabais, la politisation de l’administration avec un relèvement des cadres proches de l’opposition au profit de ceux du RPM ou des partis de la majorité. Ce sont là, selon les explications du parrain de l’Union pour la République et la démocratie (URD), Soumaïla Cissé, quelques maux qui minent la gouvernance malienne sous la direction du président Ibrahim Boubacar Kéita. Au cours de la conférence de presse qu’il a animée hier, mercredi 19 novembre 2014, au CICB, le chef de file de l’opposition malienne a dénoncé la corruption, le favoritisme et la gabegie qui assaillent la gestion des affaires publiques. Avant de regretter le mépris, l’indifférence et l’orgueil dont font montre les gouvernants.
C’est dans une salle Balla Moussa Kéita du centre international des conférences (CICB) pleine à craquer que s’est déroulée cette rencontre de Soumaïla Cissé avec la presse nationale et internationale. Il s’agissait de la première conférence de presse du leader de l’opposition malienne, depuis la fin des élections générales de 2013. Ce qui explique certainement le déplacement de nombreux responsables, militants et sympathisants du parti de la poignée de mains. Certains leaders de partis politiques amis étaient également présents à la rencontre. Le thème de cette conférence était : « Position du parti sur la situation sociopolitique de la Nation ».
Dans sa déclaration liminaire, l’honorable Soumaïla Cissé a touché neuf points essentiels de la vie de la nation : l’épidémie Ebola, la sécurité mal maïtrisée, la réconciliation nationale, les négociations avec les groupes armés, la mauvaise gouvernance et la corruption au cœur de l’Etat, l’économie malienne en mauvaise posture, le favoritisme et le clientélisme au cœur de la gestion des affaires publiques, l’école malienne en danger et le RAVEC au rabais.
Promesses non tenues
Pour le leader de l’opposition malienne, » les généreuses promesses d’hier ne sont nullement concrétisées aujourd’hui. La corruption et la concussion se propagent, le népotisme, le clientélisme et le favoritisme s’accélèrent, la gabegie financière et le gaspillage des ressources prospèrent. La spirale des perversions et malversations en tous genres et en tous lieux semble cyclonique ». Il a expliqué que les problèmes et les crises s’accumulent et des drames couvent sournoisement, minant plus encore le pays, le moral des populations, l’esprit patriotique et la crédibilité internationale des institutions de la République.
Et le conférencier d’ajouter que les interrogations les plus légitimes sur des affaires ou dossiers en cours touchant le cœur du pouvoir, pouvant s’avérer bénéfiques ou catastrophiques pour la nation malienne s’amplifient sans avoir de réponses claires, rigoureuses et transparentes.
Malversations dénoncées par le FMI
Ainsi, sur le plan de la gouvernance au sens strict, Soumaïla Cissé a indiqué que « c’est un lourd constat qui s’affiche aujourd’hui : le président de la République et son gouvernement sont à court de stratégie et d’initiatives salvatrices « . Avant de s’interroger : » où va le Mali ? « .
Pour M. Cissé, chaque acte posé par les gouvernants se révèle catastrophique et mène le pays dans l’impasse. Il a rappelé que l’opposition avait pourtant prévenu les autorités sur les éventuelles malversations qui peuvent être notées à travers les marchés de gré à gré incriminés dans le dossier de l’avion présidentiel et du contrat d’équipements militaires. » Compte tenu de la gravité des faits qualifiés de malversations par le FMI- faits inédits ayant entrainé la suspension de la coopération avec les partenaires- l’URD exige du président de la République de traduire devant la justice toutes les personnes impliquées et d’en tirer toutes les conséquences « , a-t-il martelé.
Et Soumaïla Cissé d’enfoncer le clou en dénonçant » le favoritisme et le clientélisme au cœur de la gestion des affaires publiques « . A le croire, depuis l’élection d’Ibrahim Boubacar Kéita, l’administration malienne » subit un véritable choc lié à une politisation à outrance, qui se traduit par le remplacement systématique des cadres les plus compétents par des militants RPM, au mépris du professionnalisme et de la compétence, et donc au détriment de l’intérêt national et des usagers du service public « .
Politisation de l’administration
Selon l’ancien président de la Commission de l’UEMOA et actuellement député membre du parlement panafricain, les cadres de l’opposition sont systématiquement relevés de leur fonction en violation flagrante de la loi N) 00-047 AN/RM du 13 juillet 2000 portant statut des partis politiques de l’opposition et des critères de rigueur, de compétence, d’expérience et d’honnêteté.
Parlant de l’économie malienne, le conférencier s’est appesanti sur l’absence d’initiatives de relance de la part des pouvoirs publics. Sans passer sous silence les tensions de trésorerie, l’accumulation des impayés des factures des opérateurs économiques avec pour conséquence une dette intérieure exponentielle. C’est pourquoi, l’URD demande au président de la République de faire d’une priorité la mise en œuvre de la loi d’orientation du secteur privé, de la relire s’il en est besoin, d’allouer des budgets conséquents aux secteurs qui améliorent le climat des affaires.
Fermer la frontière face à Ebola
Concernant l’épidémie Ebola, Soumaïla Cissé exige la fermeture de la frontière terrestre avec la Guinée pour une durée d’un mois, le temps de renforcer l’équipement et le suivi médical pour faire face à la menace.
A propos des négociations avec les groupes armés, le parrain de l’URD réitère son invitation au président de la République à consulter la classe politique et toutes les forces vives sur toutes les questions majeures intéressant la vie de la nation.
Et le conférencier de rejeter le document proposé par la médiation comme n’étant pas bon pour le Mali. L’URD, dira-t-il, considère que le document présenté par la médiation comporte des faiblesses. Au fond, les quatre points tels que formulés dans ledit document sont inacceptables : la notion de » zone de développement des régions du Nord « et celle de » régions intégrées », la représentation des communautés du Nord au niveau national, la répartition des pouvoirs entre l’Etat et les régions et la gestion de la sécurité après l’accord
L’école malienne, la réconciliation, la situation sécuritaire ont également retenu l’attention du conférencier qui a conclu ses interventions par une image. Le Mali ressemble, selon Soumaïla Cissé au Titanic, ce navire au naufrage prévisible car fonçant droit sur un iceberg. A la tête de ce bateau « un capitaine et un équipage gonflés d’orgueil, soucieux de privilèges et d’honneurs, incapables de coordonner le pilotage du pays vers un cap d’espérances, appliqués à assouvir les requêtes de courtisans de première classe, sourds aux plaintes et prières de son peuple entassés misérablement dans la soute… « , a-t-il conclu, en invitant à sauver le navire Mali.
Bruno D SEGBEDJI