A l’entame, il dira qu’il y a exactement cent-un jours qu’il prêtait serment devant le peuple malien en tant que Président de la Transition. “En ce 31 décembre 2020, je m’adresse à vous ce soir pour d’une part, vous offrir mes vœux à l’entame de la nouvelle année et d’autre part évoquer la vie de la nation”, a martelé le chef de l’Etat.
Il a saisi l’occasion pour s’incliner devant la mémoire de tous ceux qui ont été arrachés à notre affection cette année et avant. “Ils étaient qui nos filles, qui nos fils, qui nos mères, qui nos pères, qui nos sœurs, qui nos frères, qui nos épouses, qui nos maris. Ils étaient civils ou militaires, vaillants soldats des Forces armées maliennes qui ont donné leur vie pour la nation. Mais ils étaient aussi de fiers soldats des Forces africaines et internationales qui sont morts en service pour le Mali. Le Mali sait voir et apprécier. Le Mali sait se souvenir. Le Mali tient à sa souveraineté, mais il sait dire merci”, a-t-il ajouté.
Selon lui, il n’est pas opportun de revenir en détail sur les crises qui secouent le Mali depuis plus d’une décennie et auxquelles notre pays a payé le prix fort, mais, dira-t-il, chacun en convient que nous devons questionner notre manière de gouverner, notre rapport au pays et la valeur que nous donnons au serment sacré de n’œuvrer qu’au bonheur des citoyens, et des seuls citoyens afin d’être en phase avec les exigences des temps. “Nous devons travailler à renforcer l’ancrage de notre démocratie par la consolidation de l’armée républicaine et l’instauration d’une gouvernance vertueuse, une gouvernance qui ne saurait avoir qu’un seul objectif : le Mali, rien que le Mali, tout le Mali, le Mali partout, le Mali à tout moment”, a-t-il dit.
Le temps de la mobilisation contre la Covid-19
Concernant la marche du pays, il soulignera qu’il entend l’impatience, les interrogations et les doutes des Maliens. Et de rappeler qu’il reste habité par l’esprit et la lettre des engagements pris lors de son investiture, le 25 septembre dernier. “Je ne m’en suis jamais éloigné. Je n’ai aucun autre plan, aucune autre ambition. Je suis ici pour vous, pour chacune de vous, pour chacun de vous”, a rassuré le président Bah N’Daw.
A ses dires, le temps est venu de se mobiliser contre la Covid-19 à travers les rangs plus serrés que jamais parce qu’il s’agit de notre survie individuelle et collective car, précise-t-il, le fléau est en train de se répandre dans notre pays à une allure inquiétante, avec son lot de malades et de morts. Selon lui, la côte d’alerte est atteinte, c’est pourquoi il a invité le gouvernement à prendre l’exacte dimension de l’épidémie et de proposer, en conséquence, les mesures les plus adéquates pour rompre la chaîne de contamination et mieux prendre en charge nos malades. “Toutes nos pratiques sont bousculées par la pandémie, ici ou ailleurs, y compris le rituel des présentations de vœux entre les forces vives et le chef de l’Etat”, a-t-il déploré.
Aux dires du président de la Transition, cette tradition républicaine toujours pleine de significations et d’enseignements que nous ne saurions honorer hélas cette année en raison des mesures anti-Covid-19 édictées par le gouvernement malien. “Vous connaissez ces mesures et je ne reviendrai pas là-dessus sauf à répéter que seule la prévention et une prévention de qualité nécessitant la mobilisation de tous, est à même de nous sauver. Ce soir, je lance solennellement un appel à la mobilisation générale pour vaincre la pandémie du coronavirus chez nous. Cet appel, je le lance solennellement aux autorités religieuses, imams, prêcheurs, pasteurs, prêtres. Je le lance aux autorités morales, administratives et leaders d’opinion”, a laissé entendre le chef de l’Etat.
Evoquant la question sécuritaire, le président de la Transition a fait remarquer que cette question conditionne le succès de tout ce que les autorités maliennes doivent entreprendre comme actions durant cette transition de 18 mois dont tous les organes sont désormais en place.
Avant d’annoncer que beaucoup de mesures sécuritaires et militaires sont à l’œuvre. “Nous n’avons pas perdu une seule seconde depuis notre installation car l’armée est au front, elle se bat, elle est consciente des responsabilités qui pèsent sur ses épaules, elle remporte des victoires, elle participe à toutes les opérations conjointes avec ses alliés. L’ennemi perd du terrain, mais la lutte contre le terrorisme est une lutte de longue haleine parce qu’elle ne se gagne ni en un jour ni en une année”, a-t-il indiqué.
Edification d’une armée disciplinée et républicaine
A le croire, les Forces armées maliennes et leurs alliés tiendront le temps qu’il faut, mais ils gagneront cette guerre. Pour ce faire, les autorités de la Transition attachent un grand prix à l’édification d’une armée disciplinée, républicaine, respectueuse de la vie humaine et des droits humains.
A cet effet, il dira qu’aucune violation des droits de l’homme par les soldats ne sera tolérée et les récentes actions judiciaires enclenchées devant la justice militaire l’attestent à suffisance. “Du reste, notre armée, dont la montée en puissance se poursuit, est prête pour accompagner le retour de l’administration sur toute l’étendue du territoire. Elle sera là pour assurer la sécurité des élections générales dont le calendrier est en discussion”, a-t-il noté.
Pour le président de la Transition, l’essence de la Transition réside dans la préparation et la tenue d’élections incontestablement propres, où un vainqueur accepté et congratulé conduira les destinées du pays renouant avec le projet démocratique pour le bonheur de tous les Maliens notamment des élections tenues à date, des élections méthodiquement organisées, des élections préparées de manière transparente et inclusive. “Que personne ne s’y trompe ! Notre salut passe par ce projet démocratique qui vise à instaurer un Etat de droit, où tous les Maliens sont égaux”, a fait savoir le colonel d’aviation à la retraite.
Par rapport à la question de la bonne gouvernance, il a indiqué que la lutte contre l’impunité et la corruption font partie des missions de la Transition, parce que le peuple le veut, parce que le peuple sait où nous conduisent la gabegie, le pillage des deniers publics et l’impunité totale pour ceux qui se livrent à ces pratiques car, dit-il, nos maigres ressources doivent être mieux gérées. Ainsi, ajoute-t-il, depuis sa prise de fonction, c’est à ce seul objectif qu’il travaille, notamment rétablir une gouvernance responsable et vertueuse de nos ressources à travers le renforcement de la justice, la lutte contre la corruption, la valorisation du mérite et de l’intégrité, le refus de l’impunité.
Les richesses nationales, désormais aux Maliens
De sa lecture, les richesses nationales doivent aller au peuple malien d’abord, elles doivent nous permettre de mieux doter nos hôpitaux et nos centres de santé, elles doivent être investies pour avoir plus de salles de classe, plus de points d’eau, plus d’emplois pour les jeunes. Et de poursuivre que le bien-être des citoyens doit d’abord être assuré par la richesse nationale et cela engage au premier chef la responsabilité des gouvernants car celles mises à notre disposition par les partenaires techniques et financiers ne sont qu’un appoint.
“Ma promesse du 25 septembre est plus que jamais valable, l’argent de la corruption sera rendu au peuple, les délinquants financiers seront traqués et seront jugés, quels qu’ils soient, je dis bien quels qu’ils soient”, a rassuré Bah N’Daw.
Quant à l’Accord pour la Paix et la Réconciliation, il a noté qu’il est impérieux qu’il connaisse sans tarder des progrès décisifs et mesurables. A cet effet, il précisera que tous les obstacles à sa mise en œuvre doivent être identifiés, d’où qu’ils viennent, et les arbitrages nécessaires doivent être faits. Pour ce faire, il a lancé un appel au Gouvernement, aux mouvements signataires ainsi qu’à la Communauté internationale.
En ce qui concerne la mise en œuvre des recommandations du Dialogue national inclusif (Dni), il a laissé entendre qu’elle constitue également un impératif. Il ajoutera que des dispositions sont prises pour opérationnaliser sans tarder ces recommandations.
S’agissant du front social, le chef de l’Etat rappellera que les revendications syndicales sont un droit en démocratie que nul ne saurait contester. Cependant, compte tenu de la conjoncture actuelle, des circonstances objectives dans lesquelles notre pays se trouve, il appelle à l’esprit patriotique des syndicats et à leur sens élevé de la responsabilité. “Mais le coût des revendications formulées représente plus de la moitié du budget national et se chiffrerait, selon nos services techniques, à 1488 milliards de nos francs”, a renchéri le président de la Transition.
Aux dires du chef de l’Etat, l’idée d’une conférence sociale avait été émise en fin 2019 pour mieux harmoniser et rationnaliser les statuts des travailleurs. Ainsi, il s’est dit convaincu de la pertinence d’un tel forum. “Chacun d’entre nous peut et doit mettre le Mali en avant parce qu’il s’agit de relever ce pays qui n’est pas au mieux de sa forme. Il s’agit ensemble de nous donner la main pour reconstruire ce pays qui a fait la fierté du monde, jadis.
C’est le Mali qui peut nous sauver en tant qu’individu et en tant que collectivité. Il est notre seul vaisseau, notre seul moyen d’avancer. Ne le brûlons pas. Cette nation, aujourd’hui, nous interpelle. Elle est montrée du doigt. Mais c’est une nation de respect et de grandeur, à laquelle nous sommes tenus de restituer sa respectabilité et sa grandeur”, a-t-il conclu.
Boubacar Paitao
Source: Aujourd’hui-Mali