Cette «tueuse de plantes très mobile» peut faire perdre jusqu’à 80% de la récolte, voire plus
La culture du blé, à l’instar des autres céréales ou légumineuses, est su-jette à certaines maladies,dont celle de la rouille. Sa propagation a, ces derniers mois, donné du fil à retordre aux chercheurs des pays touchés. Les maladies de la rouille sont au nombre de celles qui sont les plus courantes et constituent une source constante d’inquiétude pour les producteurs de céréales. Suite à la détection en mai dernier, de cette « tueuse de plantes très mobile » qu’est la rouille, les chercheurs maliens se tiennent aux aguets. Bien que les conditions climatiques des zones tropicales (auxquelles le Mali appartient) soient jugées défavorables à la propagation de la maladie chez nous, les chercheurs appellent à la prudence. Cela afin de préserver le blé, cette importante culture qui mobilise quelque 2500 producteurs particulièrement dans la partie septentrionale de notre pays. En effet, pour le responsable de recherche sur le blé, de l’Institut d’économie rurale (IER), Oumarou Goïta, les basses températures et les rosées sont des conditions climatiques favorables à l’existence et à la propagation de la rouille. Pour l’instant, la rouille n’a pas été détectée au Mali, on peut s’en estimer heureux. Les conditions climatiques ne s’y prêtent pas. Les zones de production de blé au Mali sont des zones, où il y a une situation de température extrême. En effet, dans ces zones le thermomètre peut afficher jusqu’à 40 °C. Cette condition ne favorise pas la propagation de la rouille, a précisé Oumarou Goïta. Il ajoute cependant qu’un programme de surveillance approprié des cultures est un impératif pour la lutte contre la rouille. Cela permet une détection rapide afin de prendre promptement les mesures appropriées pour contenir la propagation.
Malheureusement le système de contrôle n’est pas bien développé chez nous, à en croire le chercheur de l’IER sur le blé. Il faut signaler, par ailleurs, que la rouille peut aussi s’attaquer au maïs, au sorgho etc. une culture d’avenir. Si pour les chercheurs, les conditions climatiques de notre pays ne favorisent pas le développement de la rouille, ils pensent tout de même que la prudence doit être de mise. Car, la capacité de nuisance de cette maladie est très élevée, en plus certains aspects d’ordre climatique ne sont pas encore maitrisés. Des études ont montré que dans des conditions favorables, un producteur peut perdre jusqu’à 80% de sa récolte et même plus suite à l’infection liée à la rouille. Cette réalité nous oblige à rester attentifs pour la sauvegarde de la culture du blé que nous devons développer », a assuré M. Goïta. Les échanges semenciers entre les pays (sur le marché) pour ce dernier constituent une autre brèche, car on peut introduire chez nous, des variétés exposées à la rouille. La maladie pourrait s’adapter à notre environnement, prévient le chercheur. Les producteurs doivent se procurer les semences certifiées et éviter de tomber dans les facilités d’acquisition de semences d’origine inconnue.
Les semences infestées pourraient bien développer des capacités d’adaptation à notre climat, par conséquent, on ne parlera plus au Mali de conditions climatiques défavorables à la propagation de la rouille. Nous n’avons pas heureusement de problème majeur à ce niveau car, le transfert des semences est suivi de façon rigoureuse par les services phytosanitaires de l’Etat, rassure le spécialiste. L’accessibilité des semences au niveau national se fait à travers l’Institut d’économie rurale (IER) ou à travers d’autres structures étatiques ou internationales », a t-il rappelé. Pour circonscrire la maladie, le spécialiste fait appel au sens de l’observation des producteurs face aux symptômes de la rouille. «Il très important pour les producteurs de savoir détecter rapidement la rouille. Cette étape est capitale, si on veut limiter les pertes en cas de contagion. On sent la rouille par le jaunissement des feuilles. Ce que certains producteurs ignorent. Il y en a qui pensent que c’est une carence d’engrais, sur la base de ce mauvais diagnostic, ils procèdent à une fertilisation du champ, laquelle va s’avérer inutile. Ce geste est en fait dangereux, car, si l’infection d’une plante du périmètre n’est pas immédiatement prise en compte, c’est tout le champ qui risque la perte. Le jaunissement ce n’est pas forcément une carence en engrais, il peut être le résultat d’une maladie », a fait remarquer Oumarou Goïta. Il précise aussi que la rouille peut s’attaquer aux feuilles, à la tige et aux racines.
Selon lui, il est nécessaire de faire des formations aux producteurs afin qu’ils aient le maximum d’informations sur la rouille. Le Mali dispose de plusieurs avantages pour la culture du blé. On peut citer un potentiel important en terres irrigables dans la région du nord, le climat mais aussi un marché potentiel. Selon M. Goïta «le blé est une culture stratégique et d’avenir, il importe que les autorités s’impliquent davantage pour son développement. Le blé occupe une grande place du point de vue de la sécurité alimentaire. et donne plusieurs sous produits. Dans notre pays, les importations sont de 100.000 tonnes de blé graine par an avec une valeur de 17 milliards de Fcfa et 20.000 tonnes de farine de blé par an d’une valeur estimée à plus de 5 milliards de Fcfa.»
K. DIAKITE
Source: Essor