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LA RECIDIVE DU BANI 2022/2024 : une masse d’eau à réguler impérativement

Telle une goutte d’eau, les communiqués sur la franche montée de l’eau sur le haut Bani (Bagoé et Baoulé) de 2022 et 2024 se ressemblent en cette fin du mois d’août. Si cette tendance se confirme, les appels à la vigilance seront parfaitement justifiés et les récentes mesures des autorités du pays auront tout leur sens.

 

Bordé au sud par les plateaux gréseux de San et de Bandiagara et partageant au nord les plaines inondables du majestueux fleuve Niger, le Bani est reconnu par les spécialistes comme étant le facteur X des inondations dans la Région de Mopti. Il y approvisionne dans la Mésopotamie ou la zone de l’inter fleuve  les mares et lacs par des méandres et chenaux au fond libre contrairement à l’aval du Débo dont l’alimentation est gouvernée par des seuils. 

Ici d’ordinaire, l’alternance des états secs et inondés régit l’utilisation des terres entre les éleveurs de bétail, la riziculture et la pêche. Cependant, au cours des quatre dernières décennies, plusieurs problèmes ont évolué conduisant à la dégradation des conditions de vie dues entre autres: 

  • aux changements d’utilisation des espaces et des terres
  • au pâturage intensif
  • à la déforestation inconsidérée
  • A la pêche excessive

Bien que ça soient des accords officiels qui déterminent la date et la zone de retour du bétail, les décrues précoces incitent à un retour plutôt que d’ordinaire. Les règles traditionnelles facilitant la coopération entre agriculteurs et éleveurs deviennent de plus en plus difficiles à faire respecter pour gérer une concurrence accrue sur la terre et l’eau.

De plus, les zones humides qui étaient autrefois réservées au bourgou ont été converties à la production de riz mais aussi que les bourgoutières se sont fortement rétrécies par la conjonction de différents facteurs : baisse de la pluviosité, la sécheresse empêchant la germination et la repousse du bourgou avant la crue : s’il est trop petit et fragile, il sera submergé et pourrira. Peu étendue et accessible plus tôt, la bourgoutière a perdu peu à peu son caractère de pâturage de soudure pour le bétail et de source de revenus pour les riverains.
Les ouvrages hydrauliques réalisés sur ce cours d’eau pour palier à ces insuffisances (les seuils de Talo et de Djenné), de par leur capacité et aussi de leur nature, ont été submergés dès les premières vagues de la crue excessive. En matière de régulation du cours de ce confluent du Niger, d’autres réalisations s’imposent.
Avec une crue similaire à celle de 2022, le plus dangereux sera la pression de l’eau sur les habitations qui seront sans nul doute cernées par elle et l’eau potable sera une denrée rare. Les cultures peuvent être noyées et les ouvrages hydrauliques endommagés comme cela s’est produit la dernière fois. Les pâturages seront difficilement utilisables car l’eau sera trop profonde aux dates habituelles du retour du bétail.
Face à ce tableau apocalyptique, toutes les ressources humaines et matérielles ne seront pas de trop à être mobilisées à l’instar de la chaîne de solidarité instituées en 2022 dans le Cercle de Djenné. Les associations de ressortissants de la zone et toutes les bonnes volontés en coordination avec les autorités devront corriger les ratés de la précédente crue.
Parmi ces ressources, ne point négliger les modèles informels de prise de décision qui restent dominants dans ces contrées et basés sur l’autorité traditionnelle existante dont les chefs de village, les chefs des eaux et les Djooros.
Espérons par ailleurs que des dispositions soient prises pour d’une part documenter l’ensemble des  informations recueillies pendant ces crues et celles antérieures et d’autre part qu’un système soit mis en place pour numériser et centraliser ces dernières. Il y va de la pérennisation de notre capacité de riposte aujourd’hui et demain. /. 

Bocary Traoré dit Bayo 

Ingénieur géophysicien 

Source : Le Républicain

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