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La présence de mercenaires aggrave les conflits et menace la stabilité de l’Afrique (ONU)

Le Conseil de sécurité a tenu lundi matin un débat de haut niveau sur la menace du recours aux mercenaires pour la paix en Afrique. Devant les quinze, le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, a souligné que la présence de mercenaires et d’autres combattants étrangers aggrave les conflits et menace la stabilité du continent africain.

Notant que les rapports suggèrent une augmentation de l’utilisation de mercenaires et d’autres combattants étrangers, le chef de l’ONU a fait valoir que ces activités de mercenaires sapent l’Etat de droit et perpétuent l’impunité et encouragent l’exploitation illégale et inéquitable des ressources naturelles d’un pays. De même, ils provoquent des déplacements à grande échelle et des tensions intercommunautaires.

Selon le Secrétaire général, la nature des activités mercenaires a évolué au fil des ans. Aujourd’hui, ils exploitent et se nourrissent d’autres fléaux, tels que le crime organisé transnational, le terrorisme et l’extrémisme violent.

« En Afrique, au centre des discussions d’aujourd’hui, les activités des mercenaires demeurent un grave sujet de préoccupation », a insisté M. Guterres. « Ainsi, nous avons assisté à des activités illicites et à des trafics de groupes terroristes et mercenaires opérant au Sahel, ainsi qu’à une implication présumée de mercenaires dans les violences postélectorales en Côte d’Ivoire en 2010 ».

Rappelant aussi les violations des droits de l’homme et du droit humanitaire contre des civils en République centrafricaine, le Secrétaire général a noté que la Guinée équatoriale elle-même a fait état de tentatives sérieuses contre son propre gouvernement. Autant d’exemples, qui soulignent selon lui la nécessité de mener trois types d’actions pour relever ce défi.

Trois types d’actions à mener

Premièrement, il faut renforcer les régimes juridiques, aux niveaux mondial et national. Seuls 35 États sont parties à la Convention internationale contre le recrutement, l’utilisation, le financement et l’instruction de mercenaires, adoptée par l’Assemblée générale en 1989. La Guinée équatoriale a récemment adhéré à la Convention et en deviendra la 36ème partie plus tard ce mois-ci. Seuls trois membres actuels du Conseil de sécurité l’ont fait. M. Guterres a donc appelé les États qui ne sont pas parties à la Convention à y adhérer ou à le ratifier sans délai.

Ce cadre juridique, a-t-il poursuivi, comprend également d’importants instruments africains, notamment la Convention de l’OUA sur l’élimination du mercenariat en Afrique et la Convention de l’Afrique centrale sur le contrôle des armes légères et de petit calibre.

António Guterres a ensuite prôné le renforcement de la coopération bilatérale, régionale et internationale, notamment la coopération en matière de gestion des frontières qui sera cruciale pour enrayer le flux de libre circulation d’armements et d’acteurs étrangers armés en Afrique centrale.

Il s’agit par exemple de prendre des mesures instituant des commissions frontalières mixtes, des mécanismes conjoints de surveillance de la sécurité aux frontières et un partage régulier des renseignements entre les forces de défense nationales. Dans ce contexte, le partenariat stratégique entre les Nations Unies et l’Union africaine, la Communauté économique des États de l’Afrique centrale et les pays de la région est essentiel, a dit le chef de l’ONU.

Enfin, le Secrétaire général a appelé à examiner les facteurs politiques, économiques, sociaux et psychologiques à l’origine des activités mercenaires. Le Groupe de travail des Nations Unies sur les mercenaires a recommandé un large éventail de mesures, notamment la lutte contre l’exclusion, l’amélioration de l’engagement civique, la bonne gouvernance, la fourniture de services publics équitables et la protection des minorités et autres groupes vulnérables.

Des efforts accrus pour créer des opportunités pour les jeunes seront essentiels pour réduire l’attrait des mercenaires et la menace de radicalisation, a noté M. Guterres. Il a aussi appelé à faire plus pour autonomiser les femmes et prendre en compte les dimensions sexospécifiques des activités de mercenaires.

Mieux connaître les sources d’insécurité et d’instabilité

De son côté, le Président de la Commission de l’Union Africaine (UA), Moussa Faki Mahamat, a jugé essentiel, au moment où le continent africain intensifie ses efforts de promotion de la paix et de la sécurité, que la réflexion porte sur toutes les sources d’insécurité et d’instabilité, pour faciliter l’articulation de réponses appropriées par la communauté internationale. M. Mahamat, qui intervenait par visioconférence, a précisé que l’un des défis à relever est assurément la question du mercenariat.

« L’histoire du continent africain est jalonnée d’exemples de mercenaires impliqués dans des actions de déstabilisation, y compris des coups d’État, des interventions dans les conflits armés et des tentatives de prise de contrôle des ressources naturelles des pays concernés », a-t-il constaté à regret. Dès les années 60, alors que l’Afrique s’employait à consolider ses indépendances, certains pays furent confrontés à ce phénomène aux conséquences dévastatrices en termes de violence, de violation des droits de l’homme et de menaces supplémentaire sur la sécurité et la stabilité des pays affectés.

Cet état de fait a clairement constitué une grave menace pour l’indépendance, la souveraineté, l’intégrité territoriale et le développement harmonieux des États africains, a remarqué M. Mahamat, ce qui a amené l’Organisation de l’unité africaine (OUA) à adopter en 1977 la Convention sur l’élimination du mercenariat en Afrique, entrée en vigueur en 1985. Cette convention a permis d’établir des normes pour le continent sur ces activités. Elle a également incité à prendre des initiatives de coopération en Afrique.
Malgré ces efforts, le fléau du mercenariat a toutefois persisté, a reconnu le représentant de l’UA, citant l’exemple de la récente tentative de coup d’État en Guinée équatoriale.

M. Mahamat a souligné le caractère quelquefois poreux des frontières africaines et la nature transfrontalière des défis sécuritaires auxquels le continent est confronté et qui ont favorisé la mobilisation de combattants étrangers pour servir de mercenaires. À ces évolutions, s’ajoute l’apparition de compagnies privées de sécurité qui méritent une attention particulière, selon le représentant.

C’est dans ce contexte que le deuxième Forum sur la Réforme du secteur de la sécurité, organisé le 18 octobre 2018 par la Commission de l’UA, a recommandé la révision de la Convention de 1977 en vue d’adapter cet instrument aux évolutions intervenues depuis son adoption et de le doter d’un mécanisme de mise en œuvre et de suivi.

S’agissant plus précisément des compagnies privées de sécurité, le Forum a recommandé l’élaboration d’un cadre continental de régulation et de supervision. La Commission de l’UA travaille actuellement au suivi de ces recommandation et consultera à cet égard différents partenaires internationaux, notamment l’ONU, a précisé le représentant qui a jugé important de renforcer les instruments internationaux relatifs au mercenariat, en les signant, en les ratifiant et en les mettant en œuvre. À cet égard il a regretté le nombre limité d’États Membres des Nations Unies à l’avoir fait pour la Convention internationale contre le recrutement, l’utilisation, le financement et l’instruction des mercenaires.

M. Mahamat a enfin plaidé en faveur d’une coopération renforcée entre les États, y compris en matière de renseignement, de poursuites pénales, de gouvernance du secteur de la sécurité et, s’agissant des pays émergents de conflits, sur les processus de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR).
Un.org

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