En effet, le ministère de la Sécurité et de la Protection civile avait, dans son communiqué du 26 septembre 2024, alerté sur la situation hydrologique le long des fleuves Niger et Bani qui est marquée par la poursuite de la montée des niveaux d’eau.
Selon le même communiqué, la tendance actuelle est caractérisée par une hausse exceptionnelle. Les seuils d’alerte ont été atteints et dépassés dans certaines localités, ce qui provoque déjà des débordements des eaux du cours normal par endroits. Les seuils d’alerte sont dépassés notamment à Banankoro, Kéniéroba, Bamako, Ké-Macina, Beleny Keny (San), Sofara et Mopti.
Les localités suivantes sont mises en vigilance rouge : Bamako (Kalabancoro sur toute la partie de la station de pompage de la Somagep, Djicoroni-Para, Badalabougou sur toute la zone située entre le palais de la culture et l’ancienne ambassade du Sénégal, Cité du Niger surtout la zone de l’hôtel Mandé, Sotuba zone industrielle, corniche du Cinquantenaire, alentours de la brigade fluviale), Koulikoro (partie aval de la brigade fluviale, le village de Diarrabougou…), Ségou (village de Sékoro et quartier Somono), San (Bélény Kegni, Goukoro), Djénné (Sy, Touara, Soala), Mopti ville (zone périphérique de la confluence Ban/Niger); Diré, Tombouctou (Koryomé); Banankoro; Ké-macina et Diafarabé.
En Commune IV, face à cette montée de l’eau, de nombreuses familles des quartiers Djicoroni, Kalabanbougou et Sébénicoro ont abandonné leur maison pour s’installer dans les écoles, certains ont même quitté. L’eau est montée jusqu’à deux, voire trois carrés à Djicoroni-Para. “Ça fait des années qu’on n’avait pas vu une telle montée de l’eau à Djicoroni”, nous explique Mahamadou Traoré, un résident.
La maison de l’ancien ministre Younouss Hamèye Dicko, située à Djicoroni-Para, n’a pas été épargnée par les eaux. En entrant dans sa concession l’eau atteint jusqu’aux genoux. Une mosquée appelée Bozo Missiri est fermée pour avoir été entièrement submergée par l’eau. Au niveau de l’Usine céramique après Somafrec, il n’y a même plus de passage, les maisons sont déjà inondées.
A côté de l’école du fleuve, dans le quartier de Morobougou, toutes les familles sont dans l’eau. Même constat au niveau du quartier de Flabougou. M. Traoré nous explique également qu’à l’heure où il nous parle, aucune autorité ne s’est rendue sur place. Les familles évacuées ont été installées à l’école du fleuve de Djicoroni-Para. “Ils sont dans des conditions extrêmement difficiles et sont exposées à toutes sortes de maladies”, déplore notre interlocuteur, Mahamadou Traoré.
A Sébénicoro dans la cité Ifa-Baco, même constat : les rues de cette cité sont couvertes d’eau rendant le passage difficile aux habitants. Là-bas aussi, un bon nombre de familles ont abonné leur maison. Mme Konate Djita Cissé, présidente du groupe “Ensemble pour une transition réussie”, et aussi résident de cette cité, témoigne que c’est sa première fois de voir l’eau du fleuve monter jusqu’au niveau de sa maison. “Une large distance sépare ma maison et le fleuve et aujourd’hui, voir l’eau monter jusqu’à ce niveau, c’est vraiment inquiétant“, dit-elle.
Au niveau de la place des exploitants de sable dans le lit du fleuve, les activités sont fortement perturbées et les camions qui étaient stationnés au bord du fleuve ont été évacués.
Ibrahima Ndiaye
Lassana Sereta, responsable des bozos sinistres a l’école Donteme de Djicoroni
“Libérer les classes pour aller où ?”
“La montée des eaux nous a contraint d’abandonner nos maisons de Bozobougou. Nous n’avons d’autre choix que de nous en remettre à Dieu. Nous sommes installés ici à l’école Dontémé et nous sollicitons toutes les bonnes volontés à venir à notre secours. On nous demande de libérer l’école pour la rentrée des classes. Où allons-nous ? On n’a nulle part où aller avec nos familles. Cette annonce fait qu’on n’arrive même plus à dormir pendant des nuits. Nos maisons sont entièrement submergées par les eaux et le niveau de l’eau monte de plus en plus.
Depuis notre installation à l’école Dontémé, nous avons reçu la visite des autorités locales, et aussi des appuis en vivres. Nous sommes aujourd’hui, plus de 60 foyers ici et où allons-nous trouver un lieu pour s’installer ? Avant, cette période du mois trouvera que l’eau du fleuve est descendue mais pour cette année, ça été le contraire l’eau ne cesse d’augmenter à un niveau inquiétant.
A ce stade du niveau des eaux un retour chez nous est devenu impossible pour nous. Nous n’avons aucun moyen, ni de solutions à notre situation et nous demandons au président de la Transition, le colonel Assimi Goïta, de nous venir en aide“.
Toumani Traore, conseiller du chef de quartier de djicoroni et adjoint au chef de quartier donteme
“Soulager des sinistrés”
“On s’est concerté avec le CGS pour ensemble avoir l’autorisation de la mairie en vue d’installer dans les classes, les sinistrés de Bozobougou. Pratiquement toutes les classes ont été occupées par les sinistrés, ce qui démontre à suffisance la gravité de la situation. Nous avons à peu près 60 foyers chez nous ici à l’école Dontémé. Ils ont reçu une enveloppe de la part du Conseil économique et social, El Farouk aussi a donné une aide. Maintenant pour ce qui concerne la rentrée des classes on était vraiment inquiet au regard de l’école qui est déjà occupée par les sinistrés. Nous avons mené des échanges avec la Croix-Rouge pour l’acquisition des tentes à installer dans les espaces publics du quartier qui serviront de lieu d’hébergement pour les sinistrés. Le but recherché est de libérer l’école avant la rentrée tout en trouvant un hébergement adéquat pour les sinistrés. Parallèlement, la Croix-Rouge est en train de recenser les familles sinistrées et aussi les maraîchers qui ont tout perdu avec la crue des eaux pour apporter une assistance. Les dégâts sont sans précédent, les eaux sont montées de plus de deux à trois carrés. Le gouverneur, la délégation spéciale et la chefferie sont à pied d’œuvre pour chercher un nouveau lieu d’hébergement pour les sinistrés.
J’en appelle à l’humanisme de tout un chacun. On ne peut pas voir nos concitoyens dans des difficultés et rester indifférent. Nous avons le devoir de les accompagner dans cette difficulté. On n’y peut rien, c’est une catastrophe naturelle. Ce genre de scénario se déroule fréquemment partout dans le monde. Nous sollicitons nos autorités de prendre en compte ces aspects et revoir la date de la rentrée. Ces sinistrés ont aussi leurs enfants qui sont concernés par la rentrée”.
Ibrahima Ndiaye
Source: Mali Tribune