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La Mauritanie mise sur l’aide aux populations pour sécuriser sa frontière

Niché au creux d’une passe menant vers la frontière malienne, le modeste village mauritanien d’Ouad Initi changera bientôt de visage, avec une école agrandie, un centre de soins et un accès accru à l’eau. Objectif: fidéliser la population pour sécuriser cette partie reculée du territoire.

Frêle silhouette drapée de bleu ciel, le chef de village au visage parcheminé vient saluer les visiteurs, talonné par quelques enfants curieux: des coopérants de l’Union européenne effectuent un repérage avant de lancer les travaux d’infrastructure sur ce terrain rocailleux parsemé d’habitations sommaires, où paissent des vaches et des dromadaires.

Les zones reculées, délaissées ou abandonnées par le pouvoir central sont au coeur des préoccupations de l’organisation régionale du G5 Sahel (Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad), qui tient le 6 décembre à Nouakchott une conférence sur le financement de 40 projets privilégiant les régions frontalières.

Dans le cadre du Fonds européen de développement (FED), l’Union européenne a débloqué une enveloppe de 13 millions d’euros pour aider la Mauritanie à conduire une politique d’aménagement du territoire alliant étroitement sécurité et développement.

“Ce type d’action civilo-militaire est très novatrice pour l’UE”, souligne François-Xavier Pons, chef de mission. Mais “on sait bien que le développement permet d’obtenir des résultats sur le plan sécuritaire, en permettant de maintenir la loyauté des populations vis-à-vis de l’Etat”.

“Ce qui crée la confiance et empêche Al-Qaïda de recruter, c’est la continuité de l’administration”, renchérit un haut gradé mauritanien.

Les villageois d’Ouad Initi ont déjà fourni de précieux renseignements: en 2010, en signalant aux autorités l’infiltration d’individus suspects, ils ont permis de déjouer un attentat contre une caserne à Nema, capitale du sud-est mauritanien, qui accueille mercredi les célébrations de la fête nationale.

Dans cette zone désertique ponctuée de vastes dunes, il s’agit de pérenniser l’économie pastorale et de proposer des services de base sur les axes de transhumance pour éviter l’exode rural.

“Il y a une corrélation claire entre le pastoralisme, ses difficultés et le développement des activités illégales, de jihadisme dans la zone”, commente Abder Benderdouche, coopérant dans le domaine agricole. “Le pastoralisme irrigue tout le tissu économique régional. Et les zones saharo-sahéliennes constituent des réserves en viande pour la région. Ca vaut de l’or”, fait-il valoir.

– Sources de renseignement –

Durement frappée par les attentats jihadistes et les enlèvements d’étrangers dans les années 2000, la Mauritanie a engagé une politique volontariste: remise sur pied de l’armée, surveillance accrue du territoire et aide au développement des zones les plus reculées, en particulier aux abords des frontières avec le Mali.

L’Etat a “engagé des discussions avec des jeunes qui étaient perdus, s’étaient enrôlés dans le terrorisme”, a rappelé la semaine dernière le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz, se félicitant d’avoir “arrêté ces vagues de Mauritaniens qui quittaient le pays pour aller combattre dans les rangs des terroristes”.

Symbole de l’approche duale des autorités, le Groupement nomade (GN) mauritanien, qui compte des unités méharistes, a entamé sa remontée en puissance avec le soutien de l’UE, qui va financer l’achat de 250 dromadaires à son profit.

“Là où l’Etat n’a pas d’infrastructure, dans les coins reculés, enclavés, on vient porter assistance à la population dans le domaine sanitaire, dans l’éducation…”, explique à Nema le commandant du GN, le colonel Abderrahamane El Khalil.

Derrière lui, ses unités prennent part aux répétitions du grand défilé militaire de mercredi.

“Mes hommes peuvent aider à creuser un puits. Mais ils servent aussi à recueillir du renseignement, grâce à leur proximité avec la population”, souligne-t-il. A dos de dromadaire, ils peuvent parcourir jusqu’à 70 km par jour, en autonomie, pendant deux à quatre semaines.

L’implantation à 25 km de la frontière malienne d’un poste de commandement de la force conjointe antijihadiste du G5 Sahel va elle aussi s’accompagner d’un volet socio-économique.

A Nbeikit Lehouache, à deux heures de route et de piste sommaire de Nema, l’argent du projet permettra notamment à installer un hôpital mobile de campagne, qui servira au bataillon mauritanien de cette force, mais aussi à des habitants coupés du reste du monde, au coeur des sables.

“Ici, une boîte de Doliprane est accueillie avec joie. Imaginez un hôpital capable d’accomplir des actes chirurgicaux!”, s’enthousiasme François-Xavier Pons, de la mission européenne.

 

Source: slateafrique

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