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La designer automobile Saran Diakité Kaba, une femme aux commandes

Paris – “Il faut que les femmes puissent faire ce qui leur donne envie de se lever le matin”, martèle en souriant Saran Diakité Kaba, une designer qui conçoit des postes de conduite automobile chez PSA et rêve de parité dans ce monde d’hommes.

A 39 ans, elle dirige une équipe internationale de plus de 300 personnes au sein du deuxième constructeur européen (marques Peugeot, Citroën, Opel…), une situation plutôt rare dans une industrie où moins de 20% des postes sont occupés par des femmes. Encore moins quand il s’agit de postes à responsabilité.

Cette mère de deux enfants assure ne pas trop aimer parler d’elle. Elle est pourtant sous les projecteurs depuis qu’elle a été élue “femme de l’année” en 2017 par l’association Wave qui promeut la mixité dans la filière automobile.

Les médias l’ont sollicitée, mais pas seulement. “J’ai été contactée par beaucoup de femmes qui ont eu besoin d’échanger avec moi sur leur propre condition“, confie-t-elle lors d’une interview avec l’AFP sur le site PSA de Vélizy, au sud-ouest de Paris.

Elle y travaille au développement des “cockpits” automobiles, un secteur important pour PSA dont l’innovation des blocs d’instrumentation des récents Peugeot 3008 et DS7 Crossback a été saluée par la presse spécialisée.

Cheveux courts et épaisses lunettes rondes, Saran Diakité Kaba sourit généreusement. Sa gestuelle et ses regards reflètent sa force de caractère.

– ‘Regard scanner’ –

Personnellement, je n’ai jamais eu droit à des remarques sexistes“, explique-t-elle. “Je représente une autre minorité visible qui subit d’autres types de remarques… Là, on parle des femmes, on pourrait parler des noirs aussi. Je suis une femme. Je suis noire (…) Des remarques racistes on en a tous, depuis la plus tendre enfance, c’est comme ça, on vit avec.

Elle raconte ainsi “le regard scanner” qu’elle a affronté lors de divers entretiens d’embauche, mais “pas chez PSA“, où elle est entrée en 2011.

La méfiance des recruteurs se retourne généralement en sa faveur. Comme l’impression de départ qu’ils ont d’elle est “très faible, forcément ils sont agréablement surpris après“, souligne Saran Diakité Kaba, consciente d’avoir “un portfolio intéressant“.

Pour elle, faire partie d’une minorité ne veut pas dire se soumettre. “Le sentiment de domination, c’est quelque chose de très intérieur. Si on ne veut pas se laisser dominer, il suffit de sortir de ce schéma-là et de décider soi-même de ne pas être dominée“, affirme-t-elle.

Son père ingénieur, originaire de Guinée, et sa mère, enseignante, originaire de la Guyane française, lui ont donné “une éducation pas orientée par le genre“.

– Danse et arts martiaux –

J’ai fait du foot et des arts martiaux. Mais j’ai fait aussi du patinage artistique et de la danse. Je n’ai jamais été fascinée par l’automobile“, raconte-t-elle. Elle est en revanche motarde et fustige le sexisme encore véhiculé par les rayons de jouets des magasins.

Saran Diakité Kaba, qui a grandi entre la France métropolitaine et l’Amazonie, n’est pas du genre à se laisser enfermer dans les schémas des autres. Adolescente, elle choisit de passer un bac littéraire, avec option Arts – “au grand dam de mes parents qui voulaient absolument que je fasse un bac scientifique“, dit-elle.

Ensuite, j’ai fait une école de design industriel“, l’Ecole nationale supérieure de création industrielle (ENSCI), au grand dam de mon père qui voulait que je fasse Polytechnique, comme lui”, l’une des plus prestigieuses “grandes écoles” françaises.

Cette musicienne, ancienne élève au conservatoire d’Argenteuil près de Paris, qui a fait du piano, du chant, et aime composer, a travaillé durant ses études pour payer son loyer. Elle crée son entreprise dans le domaine du design sonore et compte parmi ses clients des compagnies de danse, de théâtre, des défilés de mode… Avant de tout quitter durant quelques mois pour rejoindre un campement scientifique qui étudie les baleines à bosse, sur une île du détroit de Magellan, en Patagonie.

Après sept années passées dans différentes agences de design, elle rejoint finalement PSA.

Aujourd’hui, elle souhaite que les jeunes femmes s’orientent davantage vers les filières industrielles, où elles sont recherchées. “Les fonctions techniques n’ont pas de genre“, assure-t-elle.

PSA, qui compte seulement 18,6% de femmes dans ses effectifs, multiplie les initiatives pour se féminiser. “Dans l’automobile, il y a autant d’acheteuses que d’acheteurs, il faut que l’entreprise ressemble à ses clients. Des équipes mixtes assurent plus de performance“, assure Xavier Guisse, en charge de la responsabilité sociale du groupe.

 

Source: lexpress.fr

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