La Russie renforce progressivement sa présence en Afrique, avec un intérêt croissant pour la République centrafricaine. Depuis quelques années, la Russie a envoyé des instructeurs militaires civils du groupe paramilitaire Wagner en Centrafrique, établissant ainsi une influence significative sur les Forces armées centrafricaines (FACa) et menant une campagne anti-française dans le pays
L’annonce controversée d’une base militaire russe de 10 000 soldats en Centrafrique
La République centrafricaine a récemment suscité la controverse en annonçant son intention d’accueillir une base militaire russe pouvant abriter entre 5 000 et 10 000 soldats. L’ambassadeur centrafricain en Russie, Léon Dodonu-Punagaza, a déclaré que cette base permettrait de renforcer la coopération entre les deux pays et de garantir la sécurité nationale ainsi que celle de la région. Cette annonce a été perçue comme un nouvel exemple de l’influence croissante de la Russie en Afrique et d’un éloignement potentiel de la France.
Cette proposition a été critiquée par certains pays occidentaux, notamment la France, qui considèrent l’expansion russe en Afrique comme une menace pour la stabilité régionale. Les préoccupations portent sur le rôle des mercenaires de Wagner, qui ont déjà été accusés de violations des droits de l’homme dans d’autres pays africains. De plus, la présence d’une base militaire russe pourrait intensifier les rivalités géopolitiques et les tensions entre les grandes puissances, notamment la Russie et les pays occidentaux. La décision de la République centrafricaine d’accueillir une base russe soulève également des questions quant à son impact sur la souveraineté nationale et la dépendance économique envers la Russie. Certains experts estiment que cette décision pourrait renforcer la position du président Faustin-Archange Touadéra, mais également accroître les divisions internes et le mécontentement de la population. Cette annonce survient dans un contexte où la France a suspendu sa coopération militaire avec la République centrafricaine et retiré ses troupes du pays. La base militaire russe, si elle se concrétise, pourrait changer considérablement l’équilibre des forces dans la région et avoir des répercussions sur les dynamiques géopolitiques en Afrique centrale.
Il reste à voir comment cette proposition sera accueillie par la communauté internationale et comment elle affectera les relations entre la Russie, la France et d’autres acteurs régionaux. La République centrafricaine devra également prendre en compte les préoccupations concernant les droits de l’homme et la responsabilité des acteurs russes opérant sur son territoire. Cette décision aura certainement des conséquences à long terme sur la stabilité et la sécurité dans la région.
L’ascension de Wagner en Afrique francophone
Dans les anciennes colonies africaines, la Russie étend son influence politique, militaire et économique, tandis que la France, l’ancienne puissance coloniale, voit sa position vaciller. Le groupe paramilitaire Wagner, dirigé par Evgeniy Prigozhin, est devenu un acteur clé en Afrique, en particulier au Mali, en République centrafricaine et au Burkina Faso. Depuis son entrée en force au Mali et en République centrafricaine, Wagner a étendu ses activités à d’autres pays, tels que le Burkina Faso, le Mozambique et Madagascar. Ils offrent des services de sécurité, des conseils politiques, des campagnes de désinformation et des ventes d’armes, établissant ainsi une présence complète. Les mercenaires de Wagner sont souvent accusés de graves violations des droits de l’homme, suscitant des préoccupations parmi les institutions internationales, telles que les Nations unies.
Au Mali, la présence de Wagner a été perçue comme une alternative à l’intervention française. Lorsque l’opération militaire française au Mali, appelée opération Serval, a été lancée en 2013, elle était censée aider à lutter contre les groupes djihadistes qui avaient pris le contrôle du nord du pays. Cependant, la coopération ambiguë avec certains groupes armés locaux a conduit à la création d’États parallèles et à une instabilité croissante. Les accusations de complicité de la France dans cette situation ont alimenté le mécontentement de la population malienne et renforcé le sentiment anti-français. En conséquence, les partisans de Wagner ont agité des drapeaux russes lors des manifestations au Mali, exprimant ainsi leur soutien à l’alternative russe.
L’effondrement de l’influence française
Depuis l’échec de l’opération Serval au Mali, la France a perdu progressivement sa crédibilité en tant que garant de la sécurité dans la région du Sahel. Les alliances ambiguës avec certains groupes armés et les accusations de complicité dans la création d’États parallèles ont affaibli la position de la France. Les coups d’État récents au Mali et au Burkina Faso ont accentué le mécontentement de la population envers la présence française. En août 2022, la France a décidé de retirer ses troupes du Mali, mettant ainsi fin à l’opération Barkhane qui comptait jusqu’à 5 100 soldats français déployés dans la région.
Le retrait des troupes françaises a créé un vide de pouvoir et a ouvert la voie à l’expansion de l’influence russe. Les gouvernements maliens et burkinabè, confrontés à l’instabilité et au mécontentement populaire, ont cherché une alternative à la présence française. Ils se sont tournés vers la Russie et ont fait appel aux services de Wagner pour assurer la sécurité et la stabilité dans la région. Les mercenaires russes ont ainsi remplacé les forces françaises dans ces pays.
Les ambitions géopolitiques de la Russie en Afrique
La Russie voit en l’Afrique une opportunité de renforcer sa position sur la scène géopolitique mondiale. Les services de renseignement américains ont identifié les ambitions russes visant à créer une “confédération d’États anti-occidentaux en Afrique”. Moscou exploite les failles de sécurité et l’instabilité politique dans certains pays africains pour étendre son influence et accéder aux ressources naturelles lucratives de la région.
En République centrafricaine, où la France a retiré ses troupes en 2017, Wagner est devenu le principal mandataire russe. Le groupe assure la sécurité du gouvernement et facilite l’influence politique et diplomatique de la Russie. En échange, il bénéficie de contrats lucratifs et d’accès aux ressources minérales du pays. Des accusations de violations graves des droits de l’homme ont été portées contre les mercenaires de Wagner en République centrafricaine, notamment des exécutions sommaires, des actes de torture et des violences sexuelles.
Les conséquences régionales et internationales
La montée en puissance de Wagner en Afrique a des conséquences complexes pour la stabilité et la sécurité régionales. Les activités du groupe exacerbent les divisions internes, renforcent les mouvements sécessionnistes et alimentent les tensions ethniques et religieuses. De plus, la présence de mercenaires russes soulève des inquiétudes quant aux violations des droits de l’homme et à l’absence de responsabilité.
Sur le plan international, la Russie renforce son influence en contournant les canaux traditionnels de coopération et en offrant des services sans conditions démocratiques ou de respect des droits de l’homme. Cette approche attire certains pays africains qui considèrent l’Occident comme un partenaire peu fiable et exigeant. La campagne de désinformation menée par les acteurs russes, notamment dans les réseaux sociaux, amplifie les voix anti-françaises et nourrit les griefs existants.
Dans ce nouvel ordre géopolitique en Afrique, la France doit repenser sa stratégie pour maintenir son influence dans la région. La Russie, quant à elle, poursuit ses ambitions d’étendre son pouvoir et ses ressources en exploitant les failles de sécurité et l’instabilité politique en Afrique. Les conséquences de cette dynamique continueront de façonner l’avenir de la région et des relations internationales.
Source : air-cosmos.com