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Koulikoro : « Nianan Koulou », patrimoine historique en voie de désacralisation ?

Le blogueur Abdoulahi Baba Darfa tire sur la sonnette d’alarme sur des comportements qu’il juge attentatoires au site de « Nianan Koulou », un patrimoine historique à Koulikoro.

 

Situé sur la rive gauche du fleuve Niger, à Koulikoro « au pied de la colline » en bamanakan), le « Nianan Koulou », massif montagneux, est un témoignage matériel du legs de l’empire du Mali. C’est en ce lieu que sont conservées les reliques de l’empereur du Sosso, Soumaoro Kanté, qui s’y était réfugié suite à sa défaite face à Soundiata Keita lors de la bataille de Kirina en 1235.

Ce lieu est devenu sacré et des gens viennent y faire des offrandes ou implorer le fétiche qu’est le « Nianan » par l’entremise de la famille Diarra ( chefferie coutumière de la ville), dépositaire du fétiche. Même si le fétiche a connu un déplacement répondant à des préoccupations stratégiques lors de la construction du camp Boubacar Sada Sy, situé à la face nord du site.

Protecteur, gage de fécondité et de prospérité

Ce site monumental est un cadre de transmission et d’éducation pour les habitants, qui y attachent une valeur symbolique. Les autochtones organisent, chaque année, une fête rituelle en son honneur afin de perpétuer une tradition séculaire, creuset de protection, de prospérité et de fécondité.

Il faut dire que ce bien culturel et naturel est un facteur d’intégration de toutes les couches sociales de Koulikoro. C’est  conscient de son envergure historique et culturelle que les autorités maliennes l’avaient classé dans l’inventaire du patrimoine national en 2001, et lui avaient donné un contour juridique lui permettant une sauvegarde impliquant sa pérennisation et sa valorisation suivant les générations d’âges. Aujourd’hui, nous constatons avec amertume des pratiques humaines susceptibles de faire perdre sa sacralité au site.

Désacralisation et ruine du monument 

Le site du « Nianan koulou » connait un phénomène d’occupation exponentielle de sa face ouest, jouxtant l’abattoir de la ville. En effet, les bouchers avaient étendu leurs installations d’abattage jusqu’aux extrémités du site qui abritait le fétiche sacré, le « Nianan ». Ces entreprises sont opérées généralement en connaissance des enjeux sociaux et culturels que recouvre ce patrimoine dans les mentalités populaires. L’extension de l’abattoir s’effectue sur le domaine du site pourtant  protégé par l’État.

De même, cela s’ajoute à l’incivisme des bouchers ne prenant pas d’initiatives pour  sensibiliser la corporation sur la portée culturelle de ce lieu mythique. Par ailleurs, le comité de gestion de l’abattoir n’envisage pas de sanctions contre ceux d’entre eux qui portent atteinte au site. L’abattoir de Koulikoro a été construit au pied du « Nianan Koulou » par les autorités elles-mêmes sur un terrain exigu et rocheux et, du coup, en face de la route principale, très fréquentée. « L’extension de l’abattoir vers le seuil du ‘’Nianan Koulou’’, très vénéré par les populations, nous a été reprochée. À cet effet, nous nous sommes adressés à qui de droit pour que soient placées des bornes. Mais jusque-là, nous attendons leur réaction », a témoigné un porte-parole des bouchers.

Concessions personnelles

En outre, les habitants de Koulikoro restent  dans l’inertie. Un autre phénomène attentatoire au site a trait aux concessions personnelles qui y poussent. Le rythme de leur implantation est rapide. Si cette situation perdure, le site perdra sa sacralité : « Nous avons toujours porté le Nianan dans nos cœurs, car il est l’image de la manifestation de l’adhésion commune de toute la population du Meguetan. Il est aussi le fétiche protecteur nous servant de rempart contre les intempéries, les famines, la stérilité et les maladies. C’est pourquoi, nous lui consacrons, chaque année, une soirée spéciale après l’hivernage. Je suis consterné d’assister aujourd’hui à la désacralisation du site, résultat de l’insouciance de certains d’entre nous », déclare un notable de la ville.

La Direction nationale du patrimoine cultuel ( DNPC), impuissante, observe ces manœuvres. « Depuis quelques années, mon service déploie des efforts considérables pour faire classer le ‘’Nianan Koulou’’ dans le patrimoine national du Mali, seul gage d’un arsenal de protection juridique dissuasive et préventive. C’est pourquoi nous attendons son classement par l’UNESCO dans le patrimoine mondial. Mais, cela ne saurait être concrétisé que par une prise de conscience à tous les niveaux tant local que national », confie Sidi Mohamed Koné, Directeur général adjoint de la DNPC.

Source : Benbere

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