Jeu de poupées russes en pleine savane avec Kafando comme Medvedev- président, dans la vanité du pouvoir et Zida comme Poutine- Premier ministre, dans la réalité du pouvoir. Deux semaines après sa révolution, le Burkina Faso, est-il en train de briser l’aspiration du changement contre les digues d’une double restauration. Première restauration ? C’est celle de la toute puissance de l’aile de l’armée qui fut le socle du pouvoir Compaoré.
Et seconde restauration : celle de l’ordre démocratique qui, dans le protocole continental, revient à récuser toute prise inconstitutionnelle de pouvoir, putsch ou auto-putsch comme le laisse penser le schéma ouagalais du jeudi noir où Compaoré sortit par les gouttières quand il la porte de l’Histoire pouvait lui sourire et pas plus tôt qu’en fin 2015. Ben Ali, Moubarak et d’autres ont eu les mêmes destins. Mais il n’y a pas que du déjà vu dans le feuilleton burkinabe qui a deux dimensions inédites, tragiques ou comiques. C’est d’abord la nouvelle jurisprudence africaine que l’auteur d’un putsch peut être Premier ministre. C’est ensuite qu’on peut diriger les premiers jours d’une transition sans jamais faire référence à la raison d’être d’une transition, c’est-à-dire le rétablissement de la pleine légalité constitutionnelle dans les délais fixés. Nulle part en effet, dans le discours d’investiture de Michel Kafando et dans l’adresse de Gilbert Zida à ses ministres, on ne trouve le mot élections qu’ils sont censés pourtant organiser dans un an. En revanche, la guerre contre la corruption, les passe-droits et les abus de justice est déclenchée. Et Sankara est réinvité à la table. On oublie que la jeunesse « révolutionnaire » de Ouaga n’a pas connu ce héros mythique et que celui-ci aurait été « dégagé » plus tôt que Compaoré s’il s’était opposé à la tyrannie Nike dont nos enfants nous poursuivent jusque dans nos placards.
Adam Thiam
Source: Lerepublicainmali