Les enfants ont aussi des droits qu’il convient de préserver. C’est tout le sens de la célébration de la Journée internationale des droits des enfants le 20 novembre de chaque année. Dans sa résolution 44/25 du 20 novembre 1989, l’Assemblée générale des Nations unies adopte cette date en référence à la Convention internationale des droits des enfants. À cette occasion, de différentes manières, nous devons contribuer à l’épanouissement des enfants dans le monde. La question de l’utilisation du numérique par les enfants nous semble être assez problématique en ce 21e siècle pour la préservation de leurs droits.
Les Technologies de l’information et de la communication (TICs) ont façonné notre manière de voir le monde, de se comporter voire de se côtoyer. Le monde n’aurait pas pu être ce « village planétaire » faisant que nous sommes devenus des citoyens du monde sans l’appui de ces nouveaux outils. La quête de l’information, de la formation ou tout simplement communiquer avec les citoyens éloignés sur d’autres continents est devenue chose assez aisée en cette ère d’explosion numérique.
C’est dans ce contexte que Boureima Koné, animateur au niveau du programme PASS+ dans l’ONG CAEB à Kita, se félicite de cette explosion parce qu’il trouve qu’elle rend leur tâche plus facile. Les enfants peuvent facilement avoir accès à la documentation dont ils ont besoin pour le bon déroulement des cours en classe. Le numérique, précise M. Koné, constitue un véritable outil d’apprentissage, s’il est utilisé à bon escient.
Nous savons que toute la problématique liée à l’usage de ces nouvelles technologiques est la protection de la vie privée des individus et notamment des enfants. La question que nous devons nous poser aujourd’hui, face à cette explosion numérique, est : que reste-t-il de droit à nos enfants face à cette situation ? Il est regrettable de constater que beaucoup de droits des enfants sont violés sur le Net et notamment sur les réseaux sociaux.
S’il est admis par les conventions internationales que les enfants ont droit à une bonne éducation, à la santé, à la protection de leur vie, à une alimentation et un environnement sain, etc., il convient alors de faire remarquer qu’aujourd’hui, plus que jamais, beaucoup de ces droits sont violés suite à l’avènement du numérique. Cela, Ousmane Makaveli Traoré, blogueur malien et éducateur à Afrik Poll, le reconnait. « Le droit à la sécurité de leur personne, à une bonne éducation voire à la santé sont violés suite à l’usage du numérique », explique-t-il. Les images des enfants sont prises et postées sur les réseaux sociaux pendant qu’ils mènent des actes que nul n’aimerait voir étant adultes ou qui peut les poursuivre durant toute leur vie. À côté de ce fait, l’autre point de M. Traoré reste l’accès aux contenus sur le net.
À l’en croire, beaucoup de contenus sur le net doivent être interdits d’accès aux enfants jusqu’à un certain âge pour non seulement la sécurité de leur vie, mais aussi pour leur santé. Si jadis, les enfants pouvaient rester à l’écoute des parents ou tout simplement des vieilles personnes pour la réussite de leur éducation en leur faisant comprendre surtout des valeurs de leurs traditions, de nos jours, l’internet a remplacé les leçons des parents et des vielles-personnes. Chacun préfère être muni de son smartphone plutôt que d’être à l’écoute de paroles avilies. Ces points sont d’une vérité inébranlable qui ne peut laisser personne indifférent.
Notons aussi que le numérique peut constituer une menace pour le droit à la vie de nos enfants. Une fillette qui se voit nue sur les réseaux sociaux, publiée par son petit-ami l’ayant obligé à agir alors qu’elle n’en voulait, peut conduire au suicide.
Dans le rapport de 2017 de l’UNICEF intitulé « La situation des enfants dans le monde 2017 : Les enfants dans un monde numérique », on retrouve cet exemple : « Aux Philippines, une fillette de 8 ans contrainte de subir des actes sexuels diffusés en direct par un voisin qui gère un site pédopornographique. »
L’enfant identifie difficilement sur le net ce qui est bon pour lui et ce qui ne l’est pas. Trier les informations étant hors de ses capacités, ils prennent toutes les informations même les « fake news » comme de la vérité. Or, nous ne sommes pas sans savoir que les réseaux sociaux, notamment Facebook, se trouvent inondés ces derniers temps de fausses informations. Le libre accès des enfants à ces contenus viole leur droit à l’information. Ajoutons à tous ceux-ci, la question des enfants soldats de part et d’autre le monde. Il est généralement admis que les recrutements dans ces cellules djihadistes se font dans la plupart des cas via l’internet de plus en plus fréquenté par les enfants.
« […] La technologie numérique peut créer de nouvelles fractures qui empêchent les enfants de réaliser leur potentiel. Si nous n’intervenons pas maintenant pour tenir le rythme rapide des évolutions, les risques encourus en ligne pourraient rendre les enfants vulnérables plus susceptibles d’être exploités, maltraités, voire victimes de traite, et exposerait leur bien-être à des menaces plus subtiles », lit-on dans le rapport 2017 de l’UNICEF.
Le temps est à l’action pour sauver les enfants et partant le monde du drame de la naissance de société sans valeurs. Cette urgence, le blogueur Traoré l’a souligné en invitant nommément les parents d’élèves à l’action en veillant sur l’éducation de leurs enfants à travers un contrôle pointu des sites que fréquentent les enfants. Aux autorités en charge du numérique, il leur demande de poser des restrictions en ce qui concerne l’accès des enfants à certains sites dont le contenu ne peut leur servir à grande chose.
En tant qu’autorité scolaire, Diakaria Dembélé, directeur d’école fondamentale privée à Kabala (quartier périphérique de Bamako), dit avoir pris des mesures à son niveau. Dans son école, l’usage du téléphone se trouve interdit aux élèves. « Chaque élève surpris en train de manipuler le téléphone dans la cour de l’école est privé de son smartphone jusqu’aux vacances », nous confie-t-il. Comme justification de son agissement, il dit agir dans l’intérêt des enfants ainsi que des parents qui doivent, à ses dires, l’appuyer dans son action. Pourquoi ne pas appliquer ces genres de mesures dans toutes nos écoles comme le recommandent les règlements intérieurs ?
Outre ce cadre strictement scolaire, il convient de noter que des utilisateurs du numérique au Mali sont déjà à pied d’œuvre et ont même devancé les autorités en mettant en place « l’Initiative 111 », une initiative en vue de règlementer certains contenus sur les réseaux sociaux. Nous pensons qu’avec cette initiative, on pensera à la préservation des droits des enfants sur ces réseaux.
L’internet est certes important, mais il comporte, comme toute autre chose, des conséquences désastreuses, notamment sur les droits des enfants.
Fousseni TOGOLA
Source: Le Pays