Le journalisme est un métier noble et délicat. Ainsi, le journaliste se présente comme un pilier de la démocratie. C’est pourquoi, le 3 mai a été instituée Journée internationale pour magnifier les braves soldats de l’information qui, souvent au prix de leur vie, se battent pour le rayonnement de la vérité. Le thème 2022 porte sur : « Le journalisme sous l’emprise du numérique ». Depuis 2016, cette journée rappelle aux journalistes maliens leur confrère Birama Touré, jusque-là introuvable et dont la disparition demeure un mystère.
Chaque Journée internationale représente une occasion d’informer le public sur des thèmes liés à des enjeux majeurs comme les droits fondamentaux, le développement durable ou la santé. Ces journées sont aussi l’occasion pour le système des Nations Unies, les pouvoirs publics et la société civile d’organiser des activités de sensibilisation et de mobiliser des ressources. A cet égard, le thème « Le journalisme sous l’emprise du numérique » vise à mettre en lumière les multiples façons par lesquelles les développements récents en matière surveillance par des acteurs étatiques et non étatiques, ainsi que la collecte du big data et l’intelligence artificielle (IA) ont un impact sur le journalisme, la liberté d’expression et la vie privée. En effet, la rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression a présenté en mai 2019 des conclusions et des préoccupations sur la surveillance et les droits de l’Homme, notant que « la surveillance des individus – souvent des journalistes, des militants, des figures de l’opposition, des critiques et d’autres personnes exerçant leur droit à la liberté d’expression – s’est avérée conduire à des détentions arbitraires, parfois à la torture et éventuellement à des exécutions extrajudiciaires ». C’est pourquoi, selon Reporters sans frontières (RSF), le journaliste Birama Touré porté disparu depuis 6 ans est très probablement mort. RSF estime que le journaliste malien est très probablement mort des suites des sévices infligés lors de sa détention au secret dans les locaux des services de renseignement en 2016. Depuis, la presse malienne attend que la justice du pays fasse tout sans relâche pour faire toute la lumière sur cette affaire. Il y a quelques mois, l’arrestation et l’inculpation de l’ex-directeur de la puissante Sureté d’Etat (SE), Général Moussa Diawara, avait suscité beaucoup d’espoir pour la manifestation de la vérité. Mais depuis lors, l’affaire est toujours pendante. Aucun jugement n’a été décidé. De ce fait, beaucoup d’observateurs sont restés sur leur faim. D’aucuns ont même déclaré qu’il ne s’agit qu’une façon de protéger le Général Diawara. Le temps passe et les espoirs s’effritent. C’est pourquoi, en cette édition 2022 de la célébration de la journée mondiale de la presse, la vérité attendra dans l’affaire Birama Touré. Pour rappel, le 29 janvier 2016, Birama Touré disparaît à moto dans la nuit noire de Bamako. Il venait de déclarer son mariage à la mairie et avait passé l’après-midi avec sa famille. Aucun de ses proches ne l’a jamais revu. Au moment de sa disparition, Birama Touré enquêtait sur deux sujets concernant Karim Keïta, fils du défunt président IBK. Il avait commencé à se renseigner sur une liaison qu’aurait entretenue ce dernier avec la femme de l’un de ses amis. Il s’intéressait également à une vaste affaire de contrats d’armement qui auraient donné lieu à des détournements d’argent très importants. En juillet 2021, le juge d’instruction du dossier a lancé un mandat d’arrêt contre Karim Keïta, désormais réfugié en Côte d’Ivoire depuis le renversement de son père par un coup d’État. À ce jour, le mandat n’a toujours pas été exécuté par les autorités ivoiriennes. Il existe désormais un faisceau d’éléments et de témoignages concordants qui orientent cette enquête vers un crime très grave, celui de la disparition forcée voire de la mort précédée d’actes de torture de ce journaliste. Mais six ans après sa disparition, le corps n’a toujours pas été retrouvé, des suspects sont toujours en liberté, des témoins clés sont décédés et le contexte politique et sécuritaire malien demeure très fragile. Ceci fait peser des risques importants sur l’aboutissement de l’enquête. Il est impératif que la justice malienne poursuive ses efforts et se donne les moyens de faire toute la lumière sur cette affaire.” Le Mali occupe en 2022 la 111è sur 180 au Classement mondial de la liberté de la presse 2021 récemment publié par RSF. En 2021, notre pays occupait la 99è place. Si la Norvège se classe 1ère de ce classement mondial, il faut souligner que la Corée du Nord ferme la marche à la 180è place.
Jean Goïta
Source: la lettre du Peuple