La Délégation spéciale de la mairie du district de Bamako vient de rappeler le blocage total des cérémonies privées dans les rues… Mais, le rôle d’une municipalité ne se limite pas à interdire, mais aussi à proposer.
Dans un communiqué publié le 12 mai 2025, la délégation spéciale de la mairie du district de Bamako tape du poing sur la table : désormais, l’occupation totale des rues pour les cérémonies privées (mariages, baptêmes, funérailles…) est interdite. Motif invoqué : trouble à l’ordre public et entrave à la circulation. Une décision appuyée sur le Code pénal, certes. Mais une décision en décalage total avec la réalité quotidienne des Bamakois.
Que propose la mairie en contrepartie ? Rien. Pas un mot sur des espaces disponibles. Pas une mesure d’accompagnement. Une autorité qui interdit sans proposer, c’est une autorité qui se dérobe. Car il faut oser le dire : les espaces publics où les familles organisaient autrefois leurs cérémonies ont été bradés, vendus par morcellement, puis transformés en maisons, garages, dépôts ou commerces. Et la mairie le sait.
Alors aujourd’hui, on interdit les rues. Mais où aller ? Doit-on transporter les cérémonies de mariage ou les funérailles à des kilomètres de chez soi, faute de lieux accessibles ? Le président de la délégation spéciale de la mairie du district de Bamako pense-t-il réellement que la population dispose de moyens pour louer des salles privées dans une ville où la précarité gagne du terrain ?
La rue comme dernier refuge populaire
A Bamako, les cérémonies ne sont pas seulement des fêtes ou des rassemblements. Ce sont des expressions culturelles, communautaires, sociales. Les rues sont devenues, faute d’alternatives, le dernier espace de solidarité populaire. Les interdire sans proposer d’autres options, c’est mépriser cette réalité.
Le rôle d’une municipalité ne se limite pas à interdire. Elle doit organiser, accompagner, planifier. Elle doit rendre possible la vie collective, pas l’étouffer sous des textes de loi appliqués sans discernement.
Il est urgent que la délégation spéciale de Bamako sorte de sa logique punitive et se tourne vers des solutions. Qu’elle identifie et aménage des espaces publics dédiés aux cérémonies. Qu’elle engage un dialogue avec les quartiers. Et surtout, qu’elle cesse de faire peser sur les populations les conséquences d’une mauvaise gestion passée de l’espace urbain.
Les Bamakois ne sont pas contre le respect de la loi. Mais ils attendent que leurs réalités soient prises en compte. Interdire sans alternative, c’est gouverner contre son peuple. Et cela, aucun texte ne peut le justifier.
Le rôle d’une municipalité ne se limite pas à interdire. Elle doit organiser, accompagner, planifier. Elle doit rendre possible la vie collective, pas l’étouffer sous des textes de loi appliqués sans discernement.
Djibril Diallo
Source : arc en ciel