Jours de deuil et inquiétudes sanitaires: Kinshasa pleure ses morts et prête assistance aux survivants après les inondations de la semaine dernière, sous la menace d’une épidémie de choléra.
Lundi et mardi ont été déclarés jours de deuil national, à la mémoire des 44 personnes décédées, par le président congolais Joseph Kabila.
« Je suis venu me rendre compte par moi-même des dégâts », a déclaré lundi son Premier ministre, Bruno Tshibala, les traits tirés derrière ses lunettes fumées dans les communes populaires de Bandal et Kitambo, au coeur de la mégapole de dix millions d’habitants.
Le Premier ministre et son épouse ont croisé sur leur chemin Elysée Kalomba, veuve d’une cinquantaine d’années, mère qui a perdu cinq enfants dans les inondations, selon son voisinage.
– Drame sous les yeux du voisin –
Le drame a eu lieu en son absence sous les yeux de son voisin, John Bompengo, photographe, qui affirme avoir sauvé un sixième enfant, une fillette de 14 ans.
« Vers deux heures de matin jeudi, j’ai été réveillé par un bruit assourdissant. J’ai accouru. Nous sommes montés sur la toiture que nous avons défoncée. Nous avons tiré la jeune fille qui a dit tout de suite : +Mes frères sont déjà décédés+ », raconte-t-il à l’AFP.
Avec des jeunes du quartier, il sortira les cinq corps.
Au loin, on aperçoit d’autres maisons aux toitures éventrées pour « sauver des gens pris en otage par les eaux », explique John Bompengo. L’eau est rapidement montée de deux mètres.
La mère éplorée, réconfortée par la femme du Premier ministre, a remercié entre deux sanglots « les autorités pour l’assistance » qu’elles disent apporter aux proches des victimes.
Depuis vendredi, les autorités locales et nationales ainsi que la télévision d’Etat, souvent moins bavardes sur de événements à chaud, communiquent régulièrement sur le bilan et l’assistance aux victimes.
Dimanche, le gouverneur de Kinshasa, André Kimbuta, a remis des enveloppe aux proches des victimes sous l’oeil des caméras de la RTNC.
« Nous avons remis l’équivalent en francs congolais de 2.000 dollars pour chaque personnes tuées », a affirmé à l’AFP une source proche du gouverneur.
Le coût des obsèques représente une charge pour les familles touchées, souvent modestes, qui s’étaient installées en zones inondables, faute de moyens pour aller ailleurs malgré les interdictions.
Cinq jours après, dans la maison des cinq enfants noyés, les lieux portent encore les traces de la tragédie: des ustensiles de cuisine, des habits, des meubles, des appareils électroménagers et des détritus trempent dans des eaux stagnantes, boueuses et verdâtres.
Des jeunes gens creusent des sillons pour canaliser les eaux boueuses, à mains nues. Partout, des excréments en suspension dégagent une odeur insupportable après la rupture des fosses septiques.
Les inondations interviennent alors que Kinshasa vit sous la menace d’une épidémie de choléra, avec 220 cas et 23 décès depuis novembre dernier.
« Avec l’épidémie de choléra, ces excréments en suspension peuvent être la source d’une plus grande contamination », redoute Julio Iponge, un infirmier d’une cinquantaine d’années, par ailleurs propriétaire de la propriété où les cinq enfants sont morts.
Quatre nouvelles personnes sont mortes dimanche dans de nouvelles pluies diluviennes qui ont frappé Mont-Ngafula, une autre commune populaire de la troisième plus grande ville d’Afrique, a indiqué à l’AFP une source proche du gouverneur.
AFP