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Incubateurs : Ces coachs pour entrepreneurs en herbe

Leurs précieux conseils éclairent le chemin des porteurs d’idées depuis le projet jusqu’à l’élaboration du business plan en passant par la validation

Selon les projections du Bureau international du travail, dans les prochaines années, la population active du Mali devrait croître de 2,9% à 3% par an. Face à cette situation, notre pays doit impérativement créer des sources d’emploi pour les milliers de jeunes qui arriveront sur le marché du travail. Pour faire face à ce défi, les autorités ont urgemment mis en place des structures de promotion, d’aide et de financement de l’entrepreneuriat jeune. Mais, des solutions peinent à donner des résultats probants contre le chômage. Pourquoi ? Qu’est-ce qu’un incubateur ? Quels sont ses objectifs et ses missions, ses avantages et ses inconvénients?
Un incubateur est, avant tout, une structure d’accompagnement des jeunes porteurs de projets, appelés start-up, définit Seydou Sy, promoteur de l’incubateur JokkoLabs. La start-up, elle, est une jeune entreprise qui exploite un domaine innovant et prometteur à travers les outils technologiques évolutifs. Son principal moyen de financement est la levée de fonds auprès des investisseurs (banques, particuliers, entrepreneurs, commerçants etc.). L’objectif de Jokkolabs, selon son directeur, est de soutenir l’éclosion d’un entrepreneuriat dynamique au Mali. La mission principale d’un incubateur est d’accompagner les créateurs d’entreprise dans leur projet à travers le partage d’expériences, le conseil des mentors et la disponibilité de locaux (salle de réunion avec Internet, informatique, bureautique…).
Il convient de noter que l’échec des politiques en matière d’entrepreneuriat réside dans le fait que les fonds sont détournés en plus de l’incohérence des stratégies et des critères de sélection trop exigeants. Par ailleurs, beaucoup de bénéficiaires utilisent l’aide à des fins personnelles sans rien produire de concret. Il faut aussi noter que les jeunes ne sont pas bien préparés pour faire face aux obstacles de l’entrepreneuriat. En fait, le système consiste juste à sélectionner des personnes pour leur attribuer des fonds, oubliant que ces jeunes doivent aussi être bien formés sur les notions d’entrepreneuriat, de comptabilité, de marketing, de communication et de développement personnel, etc.

C’est dans le souci de combler ces lacunes que les incubateurs ont fait leur apparition. Il existe deux types d’incubateurs. Il y a ceux qui font de l’accompagnement accéléré et qui dure généralement six mois. Il concerne les projets déjà créés, mais qui ont besoin d’être poussés. Il y a aussi les incubateurs qui font de l’accompagnement d’idées nouvelles de projet. Il concerne les débutants et peut durer jusqu’à un an, voire plus, explique Seydou Sy. Cette durée s’explique par le fait que l’accompagnement commence de la simple idée de projet jusqu’à son aboutissement complet. Ce travail passe par l’analyse du projet, la validation, l’élaboration de son business modèle et du business plan.
Le jeune entrepreneur web, Ibrahima Cissé, promoteur de Ibracilinks, une start-up spécialisée dans l’hébergement web, pense que de plus en plus les incubateurs s’éloignent de leur mission première qui est d’assister, pas à pas, les porteurs de projets. Par ailleurs, un incubateur ne peut à 100% garantir la réussite totale de tous les projets dans un écosystème qui varie, estiment les spécialistes. Chez Impact Hub, l’incubation comporte le renforcement des capacités managériales et des aptitudes à construire un produit, le tout basé sur une formation qui utilise la méthode LEAN (validation itérative des hypothèses) très usitée dans différents écosystèmes avec des résultats probants, le coaching individuel et personnalisé de chaque entrepreneur, l’appui à la gestion, le mentorat, la mise en relation et l’accompagnement à la levée de fonds.

Pour les jeunes qui ont du mal à trouver des idées d’entreprise, Seydou Sy répond. Il suffit de regarder autour de soi. Chaque difficulté vécue par les gens dans les quartiers, les maisons, en ville, dans les entreprises est une idée de projet. Et ce sont ces idées que cherchent les incubateurs pour les nourrir, souligne-t-il.
Pour animer un incubateur, il faut avoir des compétences en technologie, en finance, en informatique, etc. Chez Jokkolabs par exemple, la structure dispose d’un expert en technologie et d’un financier. Un expert en business développeur devrait être recruté prochainement. Du côté de Impact Hub, un réseau d’experts et de structures partenaires est mis en place afin d’accompagner les jeunes. Ce réseau de partenaires est composé du Projet d’appui à la compétitivité agro-industrielle au Mali (), du Comité national de recherche agricole (CNRA), de l’Agence de l’environnement et du développement durable (AEDD) et d’Orabank. Ce qui permet à Impact Hub d’avoir accès à un réseau d’experts composé d’agronomes, d’ingénieurs, de développeurs informatiques, de spécialistes en commerce et relations internationales, des experts environnementalistes.

L’entrepreneur web Ibrahim Cissé, lui, déplore le fait que dans beaucoup d’incubateurs, les compétences nécessaires manquent pour mieux assister les jeunes. « Comment se fait-il que celui qui parle de l’entrepreneuriat n’a lui-même rien créé en la matière ? » D’après lui, les animateurs d’un incubateur doivent être des exemples qui ont créé eux-mêmes des start-ups reconnues, afin d’influencer les jeunes comme Jack Ma, fondateur du site e-commerce mondial chinois Alibaba ou le jeune Mark Juckerberg de Facebook. Mais Ibrahim Cissé qui a fait ses études supérieures en Inde avoue être bien incubé chez Impact Hub. Il affirme que ce passage lui a permis de comprendre les bases de l’entrepreneuriat. Selon lui, l’écosystème indien est beaucoup plus structuré que celui du Mali. En Inde, poursuit-il, ce sont les incubateurs qui courtisent les start-ups. Or, au Mali, c’est le contraire, explique le DG de Ibracilinks.

Fatoumata Diawara, directrice générale de Akdicorp, une entreprise informatique, spécialisée dans le développement d’applications intelligentes estime aussi que les incubateurs aident les jeunes à pouvoir structurer leurs projets. « Les conseils m’ont permis de mieux développer mon application « ekenaya » de géolocalisation des cliniques et des centres de santé », affirme t-elle. En effet, en plus de la liste des cliniques et centres de santés, l’application « ekeneya » dresse les noms et les prix des médicaments pris en charge par l’Assurance maladie obligatoire (AMO). Pour permettre aux jeunes de s’aventurer dans l’entrepreneuriat, Fatoumata Diawara souhaite la multiplication des initiatives originales et séduisantes.
Autre réalité : beaucoup de jeunes se méfient des incubateurs par peur de se faire piquer son projet ou de se faire rejeter, estiment certains, mais le responsable de Jokkalabs affirme n’avoir pas constaté au Mali un cas où des projets ont été piqués à leurs porteurs par un incubateur.
Les incubateurs, s’ils jouent réellement leur rôle, sont des sources d’inspiration pour les jeunes voulant entreprendre. L’accompagnement, la mise à disposition des moyens techniques et matériels importants, les conseils apportés par des spécialistes reconnus et la recherche de financement sont des avantages de l’incubation. Une politique de sélection trop lourde, biaisée et complexe ne donnant pas un accès massif aux jeunes pour approfondir leurs idées, est l’un des inconvénients majeurs des incubateurs.

Amadou B. MAÏGA

Source: L’Essor-Mali

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