Le ministre de l’Intérieur envisage que le sujet des quotas d’immigration soit abordé lors du débat annuel promis au Parlement dès septembre. Une idée pas nouvelle mais qui pose des difficultés d’application. Décryptage.
“L’immigration est un sujet majeur de préoccupation des Français… J’assume que n’importe qui ne puisse pas entrer sur notre territoire”, a affirmé Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur dans les colonnes du JDD paru dimanche. Il remet prudemment le sujet des quotas sur la table en proposant un débat à la rentrée au Parlement.
Que représente l’immigration officielle ?
La France a délivré 242 000 titres de séjour en 2017, soit 0,3% de sa population. Parmi ceux-ci 88 000 pour les étudiants, 91 000 au titre du regroupement familial, 40 000 au titre de l’asile, 28 000 pour motif économique. En 2018, et début 2019, le nombre de demande d’asile a augmenté de 22% : les déboutés des pays voisins tentent, en effet, leur chance en France où les procédures sont plus longues.
Qu’est ce qu’un quota d’immigration ?
Un nombre de délivrance de titres de séjour pour étrangers (non communautaires), fixé pour une année sur des critères votés par le Parlement et conformes à la Constitution.
L’asile n’est pas concerné
Christophe Castaner sépare bien “le respect des engagements internationaux de la France sur l’asile politique” et l’immigration pour d’autres raisons. Il n’y aura pas de quotas pour l’asile et les dossiers seront toujours examinés au cas par cas. Le ministre reconnaît que les procédures prennent encore trop de temps.
Les quotas : une idée pas nouvelle
L’idée a déjà été avancée par Nicolas Sarkozy en 2005 au ministère de l’Intérieur et lors de sa campagne 2007. Mais en 2009, dans un rapport sur le sujet, l’ancien président du Conseil constitutionnel Pierre Mazeau a écarté l’idée en ces termes : “Ce dispositif n’est pas utile à la maîtrise des flux de l’immigration professionnelle, est inefficace contre l’immigration irrégulière, et impossible à réaliser, d’un point de vue constitutionnel et conventionnel, pour l’immigration familiale.”
En clair, les quotas ne concerneraient pas non plus le regroupement familial qui reste la première source d’entrées.
Pourtant ça marche ailleurs…
Le Canada a fixé un quota pour 2019 à 330 000 titres de séjour, ce qui est considérable par rapport à la France. La Nouvelle-Zélande, l’Australie appliquent aussi cette méthode. Dans le cas du Canada, le quota correspond d’abord à des besoins économiques, donc sont pris en compte la formation, l’expérience professionnelle, la capacité à trouver un emploi. En Australie, c’est une immigration choisie via des critères économiques avant tout mais aussi de langue, de respect de valeurs.
Deux sujets à régler avant en France
Selon tous les spécialistes de la question, les deux sujets majeurs liés à l’immigration ne viennent pas de la gestion des entrées mais d’une part des reconduites des illégaux et d’autre part de l’intégration de ceux déjà installés.
Première question : “Que fait-on des illégaux que les pays d’origine ne veulent pas accepter ?” pointe un rapport parlementaire de 2011 qui citait notamment le Mali où des régions entières vivent des fonds transférés par les immigrés en Europe. Il y avait 15 000 reconduites en 2001. Il n’y en a pas plus sur les cinq dernières années en moyenne même si la hausse a été de 14% en 2018. A peine une expulsion sur neuf validée par la justice est réalisée.
Deuxième question : quels dispositifs éducatifs, sociaux et surtout en termes de logement pour favoriser l’intégration, l’acquisition des valeurs de la République, l’apprentissage de la langue française et éviter les communautarismes ? Cela concerne notamment les bénéficiaires du regroupement familial et ceux qui obtiennent le droit d’asile mais dorment quand même dans la rue.
Source: lalsace.Fr