Invité de France 24, l’imam Mahmoud Dicko constatant la situation périlleuse du pays depuis sa mosquée de Badalabougou, appelle les Maliens au dialogue national pour sortir le pays du K.O. Pour lui, il est impossible d’aller aux élections sans réunir tout le monde ; c’est-à-dire les forces politiques, la société civile et l’armée. Car pour lui, la tenue d’élections dans ces conditions plongera sans doute le pays dans une impasse. Pour sa part, l’Imam de Badalabougou coupe court aux rumeurs de sa prétendue candidature aux futures joutes électorales.
Lors de cet entretien sur visioconférence réalisé par France 24, l’imam Mahmoud Dicko a fait part de sa crainte, que la tenue d’élections dans ces conditions, conduise le pays à une impasse et appelle à un dialogue national d’où la raison de la publication de son Manifeste pour la Refondation du Mali. « Même si on est pas dans le gouffre, le Mali est désormais dans une situation qui n’est pas tellement souhaitable. Pour un observateur avisé, nous devons faire de telle sorte que la situation en l’état, ne puisse perdurer. Et c’est pourquoi j’ai publié ce manifeste pour lancer un appel, pour qu’on puisse tous se remettre ensemble. Peut-être que dans peu de temps, la communauté internationale va nous dire d’aller aux élections pendant que le tissu social est complètement abîmé et les forces politiques dispersées. Je pense que la situation mérite qu’on se mette ensemble pour voir ce qu’il faut faire avant les futures élections. C’est cela en réalité le sens que je donne à ce manifeste. Je pense que si nous allions aux élections dans ces conditions, ça va être difficile » estime l’influent Imam Dicko
L’Imam Mahmoud Dicko constate que le coup d’État contre l’ancien président Ibrahim Boubacar Keïta n’a pas amené la nécessaire réconciliation entre l’armée et le peuple. « Le coup d’Etat devrait être une occasion pour sceller une réconciliation entre l’armée et le peuple malien. Mais malheureusement il faut le constater, qu’il y a eu beaucoup de difficultés qui ont fait en sorte, qu’il y a encore des méfiances de part et d’autre, entre cette armée et la classe politique. Nous devons aujourd’hui restaurer cette confiance. On ne peut pas parler de réconciliation dans notre pays si on ne règle pas cette situation. Ça va commencer d’abord par la refondation et la moralisation de notre armée. Ensuite la réconciliation entre l’armée et son peuple. C’est à partir de là que nous pouvons ensemble bâtir quelque chose de salutaire pour l’avenir du Mali. » Dira-t-il
S’agissant du coup d’Etat contre l’ancien président Ibrahim Boubacar Keïta, il estime que le coup d’État est “un fait”, qu’il faut désormais regarder vers l’avenir et que tous les Maliens doivent prendre leur destin en main. « Je ne parlerai pas d’erreur ou du coup d’Etat car le coup d’Etat est aujourd’hui derrière nous, c’est un fait ! L’essentiel c’est de se mettre ensemble pour ne plus tomber dans des erreurs passées. J’ai publié ce manifeste pour alerter l’opinion nationale, voire internationale. Nous sommes dans un monde changeant avec un nouvel ordre mondial qui se dessine à l’horizon. Nous avons des partenaires avec des enjeux électoraux comme nous en 2022, il est temps que le peuple malien prenne son destin en main, pour que nous agissions pour nous, afin de trouver la solution. » A –t-il lancé
Concernant le dialogue avec les leaders djihadistes Amadou Koufa et Iyad Ag-Ghali, pour l’Imam Dicko, la victoire militaire contre les groupes appelés terroristes étant une chose impossible, le dialogue devient nécessaire avec ces derniers, afin que ce pays ne soit installer dans une guerre infinie. « Si on ne peut pas par le bout des armes arriver à bout de ces gens-là, car ceux qui nous aident aujourd’hui sont dans l’impasse. Mais qu’est-ce qu’il faut faire, on n’arrive pas à les vaincre militairement, on ne discute pas avec eux, ça veut dire qu’on va rester dans une guerre infinie. Alors là, c’est la République qui est en péril. Pas que Iyad et Kouffa seulement, les acteurs sont nombreux ! Les problèmes entre les différentes communautés sont là et qui nous assaillent et qui préoccupe plus qu’autre chose. Les gens qui ont vécu ensemble pendant des millénaires s’entre-déchirent aujourd’hui. C’est vraiment l’avenir de la nation qui est en péril. Il faut trouver une solution et je ne pense pas que ça soit au-dessus de nos moyens» S’indigne le principal artisan de la chute d’IBK.
Mahmoud Dicko nie toute ambition politique et réfute les suspicions d’agenda caché. Par ailleurs, il rejette les accusations de l’ancien président IBK selon lesquelles il souhaiterait installer une République islamique au Mali. Il affirme qu’il n’est pas là pour leur imposer quoi que ce soit et estime que c’est aux Maliens de faire leurs choix de société. « Je n’ai pas d’agenda caché ! Je l’ai dit ! Je n’ai pas d’ambition personnelle ! Ce qui me préoccupe aujourd’hui, c’est le sort de mon peuple ! » A rappelé l’Imam Mahmoud Dicko sur France 24. Pour être plus clair, l’Imam Dicko ajoutera que « Écoutez! Je le dis et je le redis au peuple malien moi, je n’ai aucune ambition présidentielle et je ne suis pas faiseur de Roi comme d’aucun le prétende. Le Roi, c’est Dieu qui le fait. Personne ne fait le Roi. C’est Dieu qui le fait. Je suis un citoyen malien. Je vis aujourd’hui une situation qui m’inquiète et ce que j’ai au fond de moi, je l’ai extériorisé pour le partager avec le maximum de malien pour que, les gens se mettent ensemble. Parce que, c’est ensemble seulement que l’on peut trouver la solution et c’est ensemble seulement que l’on peut relever le défi. »
Béchir Ben Haidara