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Imam Dicko à propos de la marche du 5 juin: ‘‘le peuple va s’assumer’’ Adam Mallé

Des acteurs politiques et organisations de la société dont la CMAS de l’imam Mahmoud DICKO, organisent ce 5 juin une grande manifestation au monument de l’Indépendance pour réclamer le départ du président de la République, Ibrahim Boubacar KEÏTA. Dans les perspectives de cet événement, le parrain de la CMAS, l’imam Mahmoud DICKO, a fait une vidéo postée sur la page Facebook de son mouvement. Dans ce message, il lance un appel solennel à tous les Maliens, les invitant à se mobiliser de manière pacifique de Kayes à Kidal pour le succès de cette manifestation.   

Nous vous proposons l’intégralité de son intervention !

Je prie pour que la paix d’Allah soit sur notre pays. Après l’appel lancé pour la manifestation du vendredi 5 juin, nombreux sont les observateurs qui se demandent pourquoi je n’ai pas parlé.

Mais s’il plait à Dieu, ils auront leur réponse aujourd’hui. S’agissant des rumeurs qui circulent ces derniers temps sur ma situation personnelle, faisant croire souvent que j’ai été arrêté, qu’on m’a mis un sac sur la tête, des chaines ; ceci, cela… Je suis au courant de tout ce qui se dit. Mais ce que je peux dire aux gens, pour que les gens comprennent, l’arrestation d’une personne n’est pas forcément une mauvaise chose en soi. Mais il faut que ça soit pour une bonne raison. Certaines raisons peuvent constituer un motif de déshonneur pour ta personne, ta famille, tes partisans, voire le pays. 

Mais on peut être fier d’être arrêté si c’est pour la bonne cause. Il y a des hommes mille fois plus importants que moi qui ont connu la prison. C’est le cas des petits fils de notre Prophète (PSL). Certains ont été tués par de tierces personnes de la manière la plus cruelle. Le monde a connu tous ces événements. Des érudits, des imams ont été arrêtés. Pour donner un exemple ici chez nous, le Check Hamalla a été arrêté et déporté ainsi que certains de ses collaborateurs. Cela n’a pas pu mettre fin à l’islam, à son essor.

Donc, ce n’est nullement grave de se faire arrêter si c’est pour un motif valable. 

Il y a une figure africaine qui n’est pas musulmane, qui a fait 27 ans de prison et qui est devenue un héros célébré par le monde entier à sa sortie de prison. Ce n’est rien d’autre que le fait qu’il avait été arrêté par ce qu’il défendait la bonne cause. Il défendait l’honneur et la dignité humaine. Si un homme se soumet à Dieu, défend la religion, les valeurs sociétales, le pays, et si on l’arrête pour ce combat, cela n’a rien de gênant, de déshonorant.   

Je dis à tous ceux qui rependent ces rumeurs malveillantes que celui qui a peur d’être arrêté, ce n’est pas moi. Ce qui me préoccupe, c’est les chefs d’accusation. Il y a de ces choses pour lesquelles on n’aimerait jamais aller en prison. Car ça rabaisse pour le reste de sa vie. 

Mais, si ce n’est pas le cas, mais quand on t’arrête parce que tu défends ta religion, ton pays, il n’y a pas de mal en ça. Je viens de donner l’exemple de Check Hamalla, c’est un fait connu de tous, inscrit dans les annales de l’histoire. L’idée de la prison ne me fait nullement pas trembler.

En ce qui concerne l’appel du vendredi prochain, je voudrais que les gens comprennent. Nous sommes derrière cet appel et nous invitons les gens à se mobiliser pour cet appel. Chaque chose à son temps et beaucoup de choses se sont passées dans ce pays et qui doivent amener les gens à se mobiliser. 

Le seul droit qui nous était acquis dans ce pays, c’est notre liberté d’expression. Et on constate que cette liberté d’expression est aujourd’hui menacée. Alors, nous ne savons plus à quel Saint se vouer. 

On est obligé de dénoncer ce qui n’est pas bien, qui touche nos droits fondamentaux. Il n’y a rien de bon dans ce pays. Et si les actes sont mal posés, on est obligé de les dénoncer de manière crue. Il va falloir que les gens se parlent sincèrement et de bonne foi. Il faut éviter la démagogie. Le pays est au bord du gouffre. Les gens voient et entendent partout que ce sera un soulèvement. 

Mais, c’est quoi la révolte ? Qui a poussé les gens à la révolte ? 

Si ce n’est l’injustice, la mauvaise gouvernance, la violation des droits. 

Partout les droits sont foulés au sol, partout où il n’y a pas droiture, la gestion des affaires publiques. Est-ce qu’on doit en vouloir à ceux qui se révoltent dans ces genres de situations. On doit demander des comptes à ceux qui gouvernent ce pays. Car les gens ne se révoltent pas pour rien. Il est temps qu’on parle pour ce pays. Vous voyez, on est devenu aphone vis-à-vis de la situation. 

Aujourd’hui, on ne parle plus de Kidal, car c’est fini. Dans un passé récent, la question de Kidal était évoquée dans les chants de musique. Mais la situation s’est détériorée à tel point qu’on en parle plus, je peux le dire. En 2014, je suis allé à Kidal. À l’époque, il y avait un gouverneur à Kidal, tous les préfets des cercles de la région de Kidal étaient sur place. On a déjeuné ensemble dans la résidence du gouverneur et le drapeau du Mali flottait sur le toit.

Ce jour, il y avait plus de 400 éléments des FAMas, il y avait la police, tous les services techniques de l’État étaient représentés. Je peux dire qu’en 2014, il y avait le Mali à Kidal. Mais avec la gestion chaotique de cette question, on a tout perdu aujourd’hui. Je suis un témoin vivant de la gestion de la question de Kidal. Il faut qu’on rafraichisse la mémoire des gens pour qu’ils se rendent compte qu’on est tombé bas. Ce n’est pas de gaieté de cœur qu’on est en train de dénoncer la situation que nous vivons. Mais, il faut reconnaitre que ça ne va pas. 

La situation était aussi pire qu’il a fallu l’intervention du président mauritanien pour permettre au Mali de sauver la face. C’est le monde entier qui s’est impliqué dans la médiation. C’est tête baissée qu’on est arrivé à Alger pour signer ce qu’on nous impose. On a signé l’Accord parce qu’on perdu la guerre. Le document a été signé, il y a 5 ans de cela, mais aucun point n’a été appliqué de manière satisfaisante, à part la cessation des hostilités.

Aujourd’hui, nous avons perdu Kidal, il n’y a pas le drapeau du Mali à Kidal, la voix du Mali n’est pas écoutée. Les rebelles imposent leur loi là-bas. C’est dans ce contexte que nous sommes. 

En plus de Kidal, la crise s’est déplacée au centre du pays. On doit chercher à comprendre cette crise du centre. Il ne faut que les gens se transforment en spectateurs face à cette situation. 

La situation est telle qu’aujourd’hui quand on dénonce, tu es indexé, traité de va-t’en guerre alors que le pays est en train de s’effondrer.

On est en train de dresser les ethnies du centre du pays les unes contre les autres. Les gens font ce jeu, s’entretuent sans savoir pourquoi ils le font. 

Alors que la situation se détériore davantage, l’État reste en spectateur. Il commet une erreur politique grave, on nomme un Haut représentant du Chef de l’État pour le centre. Mais, tu t’imagines, dans un pays où il y a un ministre de la réconciliation, ministre de l’Administration ; dans la même région, il y a un gouverneur avec un préfet pour chaque cercle, cela veut dire que l’État est là. 

Il y a les autres composantes de l’État et de la société qui existent. Alors qu’il est possible de trouver des mécanismes locaux pour réconcilier les gens, le président se permet de nommer un Haut représentant. Comme s’il serait une autre entité capable de résoudre les problèmes en dehors des mécanismes existants. Donc, il consacre lui-même la partition du pays. 

Je le dis avec un pincement du cœur, mais il faut reconnaitre que le pays est mal gouverné. On ne gouverne pas un pays en opposant les gens les uns contre les autres. On ne peut pas entretenir la division et vouloir réconcilier ce pays. Le pays se trouve fragilisé. Toutes les composantes sont divisées, à commencer par les religieux. C’est ça leur méthode de gouvernance, et c’est ce qui est grave. Ce n’est pas une bonne méthode. On ne peut pas vouloir construire un pays en agissant ainsi, car il n’aura jamais la paix. 

Il va falloir, et il est temps qu’on se dise ces vérités. 

Avec le laxisme, la démagogie, la médisance, le dénigrement, on ne va pas jamais s’en sortir. Et le pays est en train de se rétrécir. On a plus que Bamako pour faire les affaires pendant que l’étau se resserre autour de nous. 

Malgré tout, si tu parles, on cherche les moyens de te faire taire, en montant des gens, contre toi, qui vont t’agresser verbalement, on t’intimide. 

Maintenant que toutes ces méthodes semblent montrer leurs limites, on passe à la méthode forte : la répression. Tous ceux qui parlent sont enlevés, avec une cagoule à la tête et des chaines aux pieds. Il s’agit de tout faire pour faire taire les gens. On ne peut pas accepter ça.

Je l’ai toujours dit, notre peuple n’est pas un peuple soumis. Nous ne sommes pas un peuple qui va vers la résignation et la soumission. Ce n’est pas ça le Mali.

Ils ont mis le grappin sur les ressources du pays. Et chaque fois que tu déranges, on cherche à te corrompre. On pense que le Malien n’a plus de dignité, de valeurs à défendre. On ne peut pas réduire le peuple à ça.

On a voté IBK en 2013 pour des valeurs qu’on croyait en lui : fermeté, droiture, patriotisme, etc.

Il a dit à la Grande mosquée de Bamako en direct à la télévision que si les imams et les leaders religieux ne lui disent pas la vérité, il ne les pardonnerait jamais pour ça. Après avoir pris cet engagement, il faut s’attendre qu’on lui dise la vérité crue sans trembler. C’était d’ailleurs le cas. 

Malgré cet engagement, ils ont pris en mal mon discours du 29 février 2020 parce que j’ai dénoncé l’affaire des blindés frelatés. En représailles, le régime d’IBK a dressé la justice contre moi, ordonnant mon arrestation. C’est ainsi que le procureur m’a invité dans son bureau pour m’entendre. Les dispositions étaient prises pour que du bureau du Procureur, on me conduise au Camp1. Mais j’avais l’information, je les attendais. Cet acte prouve qu’IBK a menti aux religieux. Je mets quiconque au défi de prouver que j’ai tenu des propos condamnables. Si on veut m’arrêter parce que j’ai dénoncé la gestion du pays, ça, je l’ai toujours fait et avec tous les régimes.

 

Les masques sont donc tombés, on veut empêcher les gens de parler et de dénoncer. Où est donc le sens de la démocratie si tous les droits sont bafoués, même le droit à la liberté d’expression ?

IBK a donc oublié ce qu’il a dit en 2008 à Ségou à l’endroit du président de l’époque (ATT) que ‘’quand on ne peut pas, on dégage’’. J’ai des extraits de son discours, on peut les faire écouter. À l’époque, il avait dressé un tableau noir de la gestion du président ATT avant de demander son départ. 

Il faut qu’il se rappelle de ça. Cet appel, il l’a lui-même lancé par le passé. Aujourd’hui, on ne peut accepter qu’on nous intimide, qu’on nous menace par ce qu’on a dit que ce même IBK a montré ses limites.

Pour ce vendredi 5 juin, j’invite les gens à sortir massivement pour se rendre au Monument de l’indépendance de manière pacifique. Je vous invite à venir à cette manifestation sans machette, sans couteau, sans hache. On ne va insulter personne, on n’a pas besoin de ça. Ils veulent nous faire passer pour des gens violents alors que ce n’est pas le cas. On va sortir pour dire ce qu’on pense de la gestion de ce pays. Désormais, le peuple va s’assumer. 

Pourquoi avoir peur que le peuple se mobilise pour dénoncer la gestion des affaires publiques ?

Une fois, je lui fais ai cette mise en garde à Koulouba, en ces termes. Je lui ai dit : ‘’Monsieur le président, il faut donner la parole au peuple avant que le peuple lui-même ne l’a prenne. Car, en ce moment, ça devient dangereux. On ne va pas aller à des actes qui vont déshonorer le pays. 

La manifestation va se dérouler dans calme et la sérénité, la compréhension mutuelle. 

J’invite tout le monde à cette manifestation. Mon appel s’adresse particulièrement aux commerçants, épine dorsale du pays. Ce que nous souhaitons, c’est que le vendredi prochain qu’il n’y ait pas de marché. On se retrouve là-bas pour la prière du vendredi que je vais moi-même diriger à la Place de l’indépendance. 

Cette manifestation n’a pas pour objectif de semer le trouble, de faire la violence, mais nous allons sortir en tant que peuple pour nous exprimer.  

Je demande aux autorités de respecter le peuple qui a le droit de s’exprimer de manière pacifique. En cas de comportement contraire, elles endosseront la responsabilité et ce n’est pas notre souhait. 

Par contre, j’invite chaque manifestant à se munir de son masque.

Je ne vais pas demander de sursoir à cette manifestation pour rien monde. Je ne ferais pas ça si Dieu le veut. J’ai déjà informé tous ceux à qui je dois demander l’autorisation pour le faire. Toutes les grandes personnalités et notables de ce pays ont été approchées. J’invite les familles fondatrices à s’associer à cette manifestation.

Grâce à Allah, tout va se passer dans le calme. Nous ne sommes pas des ennemis de ce pays. On ne va rien casser. La mauvaise gouvernance est souvent source de violence. Quand un pays n’est pas bien gouverné, ce pays est enclin à la violence, à la frustration des masses.  

Ce même appel vaut pour toutes les régions du Mali, de Kayes à Kidal. 

On est tous témoins que rien ne marche dans ce pays, pas d’école, l’économie est à terre, pas d’armée. On ne peut rester assis en attendant le pire. Ces dirigeants ne sont pas venus d’ailleurs, ce sont des Maliens comme nous, nos frères, nos sœurs, nos collaborateurs. 

Je comprends les gens, qui commencent à croire que le Chérif de Nioro parle un peu trop. Je leur demande de le comprendre. Il doit parler parce que c’est un cas de conscience. Car, rappelez-vous qu’il s’est mobilisé lui-même, sa famille, sa fortune, ses fidèles et partisans pour élire IBK.

Et s’il se fait qu’il (IBK) a déçu, le Chérif ne peut pas garder le silence face à cette situation. Il y a un cas de conscience. C’est ce qu’il m’a dit. Mais pas une volonté délibérée de faire du mal, de haïr le régime d’IBK.

Dans ce contexte, son silence serait coupable. Il a le sentiment d’avoir trompé les gens sur le compte du président IBK alors qu’il doit rendre compte à Allah sur la confiance placée en lui. 

De la même manière, je n’ai pas l’intention de trahir le peuple. Je ne vais jamais trahir la confiance placée en m’a personne.  

Cette affaire est une affaire de religion, de défense de nos valeurs sociétales.

Je prie Allah pour que la paix revienne dans notre pays. Que Dieu sauve le Mali.

Transcription libre Info-Matin

Source : INFO-MATIN

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