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Ibrahim Maiga : « Le Mali est encore dans la tourmente »

Il y a 10 ans débutait la crise sécuritaire au Nord du Mali dans la région de Ménaka, qui s’est par la suite étendue à Kidal et au fil des années métastasé vers le centre du pays. Retour dans cet entretien avec Ibrahim Maïga, représentant Sahel de l’institut néerlandais pour la démocratie et le multipartisme (NMID), sur l’évolution de cette crise et ses implications une décennie après.

 

Aujourd’hui quel bilan global peut-on faire de cette crise?

Ce qu’on peut retenir c’est qu’il a eu une multiplication des groupes armés, de 2012 à aujourd’hui, même si entre temps il y a une fusion d’un certain nombre de groupes armés qui donnent aujourd’hui lieu à une coalition qu’est le JNIM. Il y a aussi eu une extension de l’insécurité. Il faut également indiquer la présence internationale qui s’est considérablement accrue au cours de la dernière décennie. En 10 ans, le bilan de cette présence est malheureusement très contrasté et mitigé. Le Mali est aujourd’hui encore dans la tourmente.

Cette crise persiste malgré la signature d’un Accord pour la paix en 2015. Comment expliquez la lenteur dans la mise en œuvre de cet Accord ?

Cet accord a été signé au forceps, dans une ambiance un peu défaitiste pour le gouvernement malien et les FAMa. Le principal obstacle dans sa mise en œuvre demeure politique. Aujourd’hui le discours est encore plus dur chez les partisans des autorités de la transition qui estiment que cet accord doit tout simplement être renégocié et revu de fond en comble et que son application en l’état consacrerait la partition du pays. Je pense aussi que c’est un accord qui n’a pas bénéficié d’un portage politique. Depuis sa signature on a vu très peu d’acteurs de la classe politique le défendre.

On assiste depuis quelques semaines à de violents combats dans la région de Ménaka entre l’EIGS et le MSA. Quel est l’enjeu au centre de ces affrontements ?

Je pense que ces affrontements s’inscrivent dans la longue conflictualité qui s’est établi dans cette zone frontalière. L’EIGS est composé de toutes les communautés de la zone mais à y voir de plus près on a le sentiment qu’il y a, au-delà des querelles d’ordre idéologique entre le MSA et l’Etat islamique, des dynamiques plus locales au cœur de la conflictualité. Je fais référence à un certain nombre de divergences entre d’un côté les Daoussak qui constituent le fer de lance du MSA et de l’autre la communauté peul Tolebe du côté du Niger. Ces deux communautés ont souvent été opposées autour de la gestion et de l’accès aux ressources naturelles et sur des questions de transhumance d’animaux entre autres. Les affrontements entre le MSA et l’EIGS tirent en partie leur source de cette opposition.

Mohamed Kénouvi

 Source : Journal du Mali

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