Les scandales financiers qui font trembler le régime en place, notamment le dossier de l’achat d’un second avion présidentiel, étaient au cœur des échanges entre l’opposition et le président IBK la semaine dernière. Tiébilé Dramé et ses camarades ont demandé des comptes sur les aspects douteux de l’acquisition de cet avion ainsi que sur le contrat d’armement dont a bénéficié la société Guo Star. En plus de l’opposition, des voix s’élèvent partout pour demander au chef de l’Etat de s’expliquer. Mais IBK a catégoriquement refusé de parler de ses affaires, en déclarant notamment qu’il est prêt à refaire la même chose, « si c’était à refaire ».
Pour l’opposition, la mauvaise gouvernance et la corruption sont au cœur de l’Etat depuis l’arrivée d’IBK au pouvoir. Et Soumaïla Cissé de dire que «chaque acte posé se révèle catastrophique et mène le pays dans l’impasse». C’était peu avant de rencontrer IBK la semaine dernière comme l’opposition a l’habitude de rappeler à l’ordre le pouvoir, à en croire le président de l’URD.
Les cris de l’opposition ont-ils été entendus? Pas sûr, si l’on tient compte de l’agacement de Soumaïla a récemment fait montre. Rien qu’au sujet des négociations d’Alger, il a estimé que le président de la République a préféré déléguer à un pays voisin le soin de «faire enrichir par l’expertise de ses techniciens » une prétendue feuille de route destinée aux négociations inter-maliennes.
IBK était également attendu de pieds fermes par les opposants au sujet des micmacs autour de l’achat du second aéronef présidentiel et des contrats d’armements. Tiébilé Dramé ne pouvait pas ne pas en parler lors de la rencontre et IBK ne pouvait point se débiner. A la demande du président du Parena souhaitant que le chef de l’Etat s’adresse à la nation, ce fut plutôt un refus catégorique de la part du chef d’Etat. «Je ne la ferai pas, mon frère. Je ne suis pas à la barre», s’exprimait IBK.
Néanmoins, le président Keïta a donné raison, mais seulement à demi-mot, à son adversaire du Parena. Des erreurs ont été commises, a-t-il reconnu, expliquant que la justice se charge du reste.
Autres inquiétudes de l’opposition, la possibilité que le Mali devienne un Etat mafieux. Pour cause, les méthodes utilisées par ceux qui ont spolié l’Etat à travers les marchés incriminés. Dans une déclaration, le Parena avait fait le lien entre les paradis fiscaux situés aux Caraïbes et le blanchiment d’argent. Au cœur de ce nébuleux système, Michel Tomi, un ami du président IBK poursuivi en France pour corruption d’agent public étranger.
Quel que soit le parti d’opposition, tous abondent dans le même sens quand il s’agit de parler de la gouvernance sous IBK. Modibo Sidibé aussi avait fait savoir son désaccord avec les choix d’IBK en matière de négociation: Alger, d’accord mais pas au détriment de la cohésion séculaire qui a régi la société malienne depuis longtemps.
Les critiques de l’opposition font échos même dans le camp du président IBK. Comment comprendre la sortie de Boulkassoum Haïdara? Ce responsable de la majorité présidentielle a surpris plus d’un en regardant la vérité en face pour dire qu’il y a des problèmes autour d’IBK. Sa prise de position n’était pas un lâchage, mais une tentative de sauver ce qui peut l’être de la réputation qui a valu son soutien au président.
Dans sa réponse sèche « si c’était à refaire, je le referai », à Tiébilé Dramé, IBK a voulu tout simplement envoyer un message (je ne regrette rien ?) à l’opinion malienne au sujet des magouilles qui ont valu au pays des brouilles avec certains de ses partenaires économiques dont la Banque mondiale et le FMI. Hors, l’opposition voudrait voir rapidement des sanctions contre ceux des proches d’IBK mouillés jusqu’au cou dans les magouilles entourant les marchés du second avion présidentiel et du contrat d’armement.
Soumaïla T. Diarra