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Gouvernance : pressé par le FMI, le Cameroun mettra les sociétés d’État sous contrats de performance à fin 2024

Le ministre des Finances, Louis Paul Motazé (photo), a signé le 6 juillet 2022 une circulaire régissant les contrats de performance entre l’État et les établissements et entreprises publics. Ce document est assorti d’un chronogramme révélant qu’à compter du 1er janvier 2023, et ce jusqu’au 31 décembre 2024, tous les entreprises et établissements du portefeuille de l’État seront mis sous contrats de performance.

À travers la publication de cette circulaire, le gouvernement respecte ainsi un engagement pris devant le Fonds monétaire international (FMI), lors des négociations relatives au programme économique et financier triennal (2021-2024) actuellement en cours entre cette institution de Bretton Woods et l’État du Cameroun. « Ces contrats de performance doivent préciser les obligations de service public, les coûts unitaires (comme base de versement des subventions) et les indicateurs mesurables requis de volume de production et qualité de service », suggère d’ailleurs le Fonds dans un rapport officiel. En effet, pour le FMI, en plus de produire de « piètres résultats », les établissements et entreprises publics au Cameroun sont des gouffres à sous, dans la mesure où ils reçoivent régulièrement d’importantes subventions et de la trésorerie de l’État, sans obligation de résultat.

Le ministre Motazé souscrit d’ailleurs lui-même à ces griefs faits aux sociétés d’État, dans sa circulaire du 6 juillet 2022. « Dans le cadre de la poursuite de la mise en œuvre de la réforme des entreprises et établissements publics conduite par le gouvernement depuis 2017, en vue de la maîtrise du pilotage et de la gouvernance de ces entités publiques, il a été donné de constater la faible performance des établissements et entreprises publiques dans l’accomplissement de leurs missions statutaires et dans la génération de profits ; le poids important de ces structures sur les finances publiques, à travers des opérations d’apport de trésorerie, de subventions ou de recapitalisation par l’État ; les risques budgétaires pour l’État, dont la responsabilité pourrait être appelée du fait du passif global et de l’encours importants des engagements financiers de ces structures », écrit le ministre des Finances.

Une faible rentabilité financière

Afin d’inverser cette tendance, le gouvernement entend impulser une nouvelle dynamique à travers des contrats de performance, dont la stricte implémentation et une évaluation rigoureuse devront permettre à ces entités publiques « d’atteindre un niveau de performance souhaitable dans leurs secteurs d’activités respectifs, et occuper une place centrale dans l’impulsion du programme de développement du chef de l’État porté par les politiques publiques et mis en œuvre par le gouvernement », précise la circulaire sus-mentionnée.

A en croire aussi bien le gouvernement que le FMI, ces contrats de performance constituent la voie royale pour que les sociétés d’État deviennent rentables, et ne soient plus ce boulet que traîne actuellement l’État du Cameroun. Pour rappel, dans un document annexé à la loi de finances 2021, le gouvernement camerounais analyse la rentabilité économique de 38 entreprises publiques sur les 44 qui constituent son portefeuille (établissements publics non compris). « L’exercice 2019 est caractérisé par une détérioration de la rentabilité financière des entreprises publiques. En effet, le taux de rentabilité financière s’établit à -14,5%, soit 6,5 points de moins qu’en 2018. Depuis l’exercice 2017, cette rentabilité est plombée par la situation structurellement déficitaire de ces entreprises », apprend-on.

Endettement abyssal et charges exorbitantes

Afin d’expliquer la faible rentabilité des sociétés du portefeuille de l’État, le document sus-mentionné énumère cinq causes majeures. Il s’agit notamment de l’absence d’innovation technologique ; la présence dans l’outil de production des immobilisations non productives et non nécessaires à l’exploitation ; l’absence des économies d’échelle et une structure pléthorique des coûts, dont notamment la masse salariale qui constitue une composante majeure des charges de ces entreprises ; un besoin en fonds de roulement toujours important, lié au déséquilibre de la structure financière des entreprises publiques ; une stratégie marketing peu efficace et moribonde.

Parmi ces obstacles à la rentabilité des entreprises et établissements publics au Cameroun, l’explosion des charges de fonctionnement, et principalement de la masse salariale, préoccupe particulièrement la Commission technique de réhabilitation des entreprises du secteur public et parapublic (CTR). Selon le rapport 2020, de cet organisme spécialisé du ministère des Finances, à fin 2019, les seules charges des personnels dans 90% des entreprises publiques sont supérieures à 30% de leur chiffre d’affaires annuel. Dans certains cas, poursuit la CTR, ces charges sont « au-dessus de 70% » du chiffre d’affaires, toute chose qui « ne laisse pas de marge de manœuvre pour un fonctionnement optimal », en vue du financement des investissements et le remboursement des dettes de plus en plus importantes.

Du coup, souligne la CTR, en plus d’afficher une chute de leurs investissements de 67,4% entre 2018 et 2019, les entités du portefeuille de l’État sont lourdement endettées. Selon les pointages de la Caisse autonome d’amortissement (CAA), organisme en charge de la gestion de la dette publique, à fin mars 2022, la dette directe recensée des entreprises et établissements publics du pays est estimée à 862 milliards de FCFA, soit 3,4% du PIB. Elle se compose de 53,4% de dette extérieure et 46,6% de dette intérieure.

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