Entamée lundi dernier, la série des rencontres avec les forces vives de la nation sur l’avant-projet de la Charte nationale pour la paix et la réconciliation nationale s’est poursuivie hier jeudi au CICB. Le but de l’exercice étant inclusivité. Pour cette étape, la Commission nationale d’élaboration avait appelé le monde universitaire. Pour ces acteurs, les problèmes ont pour noms : manque d’application des textes, manque de suivi, manque de leadership, etc. Pour changer la donne, ils préconisent un changement de mentalité.
«Il faut interroger la dimension spirituelle de l’homme Malien. On est enfermé dans nos égoïsmes», critique un intervenant.
Dans son mot de bienvenue, le président de la Commission nationale d’élaboration de l’Avant-Projet de Charte nationale pour la paix et la réconciliation nationale, Ousmane Issoufi MAIGA dit Pinochet, a salué une participation de qualité des universitaires.
Pinochet a souligné que nous avons hérité le Mali de nos ancêtres et que nous devons le rendre meilleurs pour les générations futures.
Dans leurs interventions, les participants ont évoqué des préoccupations qui touchent tous les secteurs vitaux du pays.
Selon l’ancienne ministre Alwata Aichata SAHI, nous sommes confrontés à un problème de mise en œuvre des recommandations issues des différents foras et autres états généraux.
Car, dit-elle, au Mali, nous avons les meilleurs plans, mais force est de constater que nous sommes toujours à la traîne.
Comment appeler les gens à changer de comportement ? S’est-elle interrogée, avant de répondre qu’il faut mettre l’accent sur la qualité du Malien.
«Nous sommes sur la bonne voie, celle de la participation active de tout le monde. Et que tout le monde se dise, le Mali c’est moi», a estimé le DG de l’IPR de Katibougou, Lassine SOUMANO.
Selon le Pr Bokary DIALLO, pour parvenir à la paix et à la réconciliation, il faut combattre l’injustice, la médiocrité et l’impunité qu’il appelle ‘’IMI’’.
De son côté, le Pr Oumar CAMARA a constaté que malgré l’enseignement de l’éducation civique et morale à l’école, nos enfants manquent de civisme. Selon lui, cette situation s’explique par les effets de la mondialisation qu’il présente comme étant une nouvelle méthode de la recolonisation.
De son avis, il faut mettre l’accent sur l’enseignement de la culture traditionnelle africaine dans nos écoles.
«Tant qu’on s’arrête à l’homme, au saupoudrage, à cette démocratie qui a été une catastrophe, à cette décentralisation qui a été une catastrophe, on ne s’en sortira pas. Il faut aller au-delà et interroger la spiritualité de l’homme Malien », a souligné l’un des universitaires.
Pour cet anthropologue, il y a une crise très profonde de nos personnalités et que nous sommes enfermés dans nos égoïsmes.
«Ce sont eux nos ennemis et cette question pose un problème de foi», a-t-il conclu.
Pour le général Yamoussa CAMARA, les populations ont l’obligation de signaler les cas suspects qu’ils constatent autour d’eux.
Pour lui, l’option militaire intervient dans une crise en dernier recours.
«C’est quand toutes les ressorts de la nation ont montré leurs limites que l’armée intervient en dernier ressort», a-t-il tranché.
De ses explications, il ressort que l’armée peut imposer la paix pendant un moment, mais une paix durable, dit-il, s’acquière dans les esprits de tous les citoyens.
Car, ceux qui sont vaincus se préparent toujours pour revenir.
Il s’est dit convaincu que la victoire militaire ne remplace pas la solution politique qui appelle à l’implication de toutes les forces vives de la nation.
Aussi, il a réaffirmé l’engagement du Chef de l’Etat de faire en sorte que les Maliens eux-mêmes s’approprient le processus de paix.
Ainsi, le Dialogue inter-maliens a, dit-il, eu lieu sur l’ensemble du territoire national et dans les missions diplomatiques et consulaires du Mali. L’une de ses principales résolutions a porté sur l’élaboration d’une Charte pour la Paix et la Réconciliation nationale.
La Charte, a-t-il expliqué, doit constituer un document de référence pour toutes initiatives, actions et activités qui concourent à la sécurité, à la paix, à la réconciliation nationale, à la cohésion sociale et au vivre-ensemble au Mali.
La mise en œuvre des textes et le suivi de la gouvernance posent problème dans notre pays. Selon lui, la paix n’est pas que seulement les victoires de l’armée.
L’armée a beau réalisé des victoires, les choses ne changeront tant que les hommes politiques et la société civile ne se remettent pas en cause, parce c’est eux qui doivent construire la paix.
«Il ne s’agit pas seulement de signer des Accords, mais il faut les appliquer».
«A chaque 200 mètres, il y a une mosquée à Bamako, mais est-ce que cela a résolu nos problèmes ? A-t-il interpellé les religieux.
La priorité se résume aux problèmes de l’école, de santé, aux problèmes de valeurs sociétales. Il faut qu’on retourne au Mali Koro avec nos valeurs. Si notre pays nous appelle, nous allons répondre.
Je suis convaincu qu’on trouvera des solutions», a-t-il conclu.
Par Abdoulaye OUATTARA