Serein, soucieux des autres et à cheval sur le respect mutuel, Gaoussou Kalilou Berthé dit Lalaby est un professeur en géomancie. Fils d’un grand marabout, il a parcouru le monde pour apprendre davantage la science qui lui vaut une certaine célébrité. Il partage aujourd’hui ses connaissances occultes avec des milliers d’apprenants. Maître-éducateur, Gaoussou Kalilou Berthé s’efforce d’enseigner à ses disciples les bonnes manières. A Sotuba en commune I du district de Bamako, son domicile refuse du monde. Très organisé dans son travail, il met tout le monde à l’aise. En dépit du nombre élevé des visiteurs, il évite les va-et-vient et le désordre. Dans l’entretien qu’il a bien voulu nous accorder, le maître-géomancien parle de ses débuts, ses combats et ses engagements.
Si le Professeur se présentait à nos lecteurs, que leur dirait-il ?
Je suis Gaoussou Kalilou Berthé, communément appelé Professeur Lallabi. Je suis né le 20 mai 1969 à Kougnana, à 45 Km de Koutiala. Je suis le fils de l’imam de mon village, décédé le 1er mars 2003, qu’on appelait ‘’Kougnana karamoko’’. J’évolue dans le domaine de la géomancie et je forme beaucoup de personnes à ce titre.
Vous êtes un géomancien et un grand maître aujourd’hui. Comment cela est-il arrivé ?
C’est le destin. Mon père était un maître-marabout. Naturellement, j’ai commencé dans son école. Je suis devenu maître après sa mort. Je ne peux pas dire que le savoir est un héritage. C’est parce que j’ai choisi de devenir comme lui que j’ai appris à ses côtés, sinon je pouvais choisir un autre chemin. Après, j’ai fait des recherches moi-même sous d’autres cieux.
Je vais vous raconter l’histoire de mon surnom, Lallabi. Mon père avait deux épouses, Lalla et Habi. Et c’est comme cela que le nom ‘’Lallabi’’ m’est venu, je suis fils de Lalla et de Habi. Un nom que j’ai choisi moi-même par amour pour mes deux mères.
D’aucuns disent que la géomancie ne nourrit pas son homme. Êtes-vous de cet avis ?
Oui et non. Parce que, quand on apprend la géomancie, normalement on sert les autres en s’oubliant soi-même. Ça ne peut pas nourrir. Donc, on doit faire autre chose, travailler et c’est la compétence en géomancie qui va aider à exceller dans ce travail.
Il faut associer la géomancie à autre chose pour qu’elle serve ! Par exemple, «si tu écris ‘’ADAMA’’ 918 fois pour en faire une eau bénite puis sur papier pour un gris-gris. Si tu mets ce gris-gris sur toi tout en te frottant avec cette eau bénite, tu auras de l’argent. Mais à condition que tu sois actif, cela ne s’obtient pas étant couché ».
Vous avez une école où vous enseignez la géomancie aux gens, une première au Mali. Pourquoi cette initiative ?
Je l’ai fait par amour et par compassion sinon, j’étais marabout avant la création de cette école. Je voyageais partout dans le monde pour exercer le métier de marabout. J’ai compris que je dois partager mon savoir avec les autres pour que tout le monde puisse en profiter. C’est dans cet esprit de partage que je l’ai fait. Aujourd’hui, il y a beaucoup d’élèves qui peuvent se débrouiller sans moi. J’ai toujours dit que chaque personne doit pouvoir au moins connaître quelque chose pour s’orienter. C’est après cela que l’on peut approcher un grand maître.
Depuis 2012, le Mali est dans un gouffre. Vous êtes détenteur de pouvoirs occultes. Que pouvez-vous faire pour le Mali ?
J’ai dit aux dirigeants du pays de chercher des experts qui vont faire un diagnostic du pays. Le savoir ne se limite pas seulement à la géomancie, il y a d’autres voies mystiques. Les dirigeants doivent mettre une équipe sur place, selon les compétences.
L’Etat malien doit former un groupe d’experts, composé de toutes les compétences dans tous les domaines de connaissances mystiques, des spécialistes en sécurité et autres et chacun va apporter son expertise sur les questions sécuritaires de la nation.
Ce sont des gens qu’on met en mission. Je n’ai pas été mis en mission, donc je ne fais rien ! Nous n’avons pas été approchés par les autorités. Nous sommes oubliés, même lors des décorations. Elles ne nous approchent que lorsqu’elles sont en quête de pouvoir. Une fois cette mission terminée, elles nous tournent le dos. Les dirigeants du pays doivent venir vers nous, nous consulter, nos avis comptent beaucoup et nous ferons ce que nous pouvons. J’ai plus de vingt mille adeptes à Bamako. Si ce n’est Haïdara, personne d’autre n’a une telle masse derrière lui. Quand on parle, les gens pensent qu’on cherche des clients. Je n’ai besoin de rien.
Au Mali, les gens sont tellement méchants et ne veulent pas se sentir que tout est devenu difficile. Quand on parle, on pense que c’est à cause de l’argent. Or, tout n’est pas argent.
La géomancie a des secrets. On dit souvent que les grands maîtres cachent ces secrets à leurs disciples. Qu’en dites-vous ?
Tu dois poser cette question aux disciples, ils sauront mieux t’édifier ! Je ne suis pas bien placé pour donner la réponse à cette question. Ils sont là partout, tu peux le leur demander.
L’actualité oblige. Le monde est secoué par le COVID-19. Que pouvez-vous faire pour apaiser les esprits ?
A mon avis, les gens doivent craindre plutôt le SIDA, la tuberculose, le diabète, etc. Qu’on assiste les orphelins plutôt que de craindre le Coronavirus, qu’on prône l’équité. C’est cela qui manque beaucoup au Mali. Chaque jour, ce sont des orphelins et des personnes démunies qui meurent faute d’assistance. Cela est pire que le COVID-19. Cette maladie est venue trouver tous ces maux ici. Mais je prie pour que Dieu protège le Mali de cette pandémie ! Je ne connais pas cette maladie a fortiori un quelconque remède.
Vous venez d’affirmer que vous avez du monde, donc une voix bien écoutée. Quel message avez-vous à l’endroit des dirigeants du pays ?
Dire la vérité dans ce pays peut conduire en prison. Donc je ne vais pas parler. Ce que je peux dire, c’est des souhaits de bonheur à nos dirigeants et le retour de la paix au Mali.
Un message à l’endroit de vos fidèles
A mes disciples tout comme aux autres, je demande de chercher le savoir, de le maîtriser et de s’en servir.
Propos recueillis par Drissa Togola
Le Challenger