Les promesses de financements du dernier programme proposé par le G5 Sahel ont dépassé les attentes. Objectif : au-delà d’une présence militaire, le développement de la région.
Les bailleurs de fonds et partenaires internationaux du G5 Sahel ont dépassé les attentes. Jeudi à Nouakchott ils ont en effet promis des aides de 2,4 milliards d’euros, soit « 127 % de l’objectif de mobilisation initial », selon un communiqué publié dans la soirée à l’issue d’une conférence des donateurs dans la capitale mauritanienne et consulté par l’AFP. Ces fonds sont destinés mettre en œuvre, à terme, une quarantaine de projets de développement axés sur la lutte contre le djihadisme.
« Ces engagements de nos partenaires couvrent largement les besoins globaux du programme d’investissement prioritaire (PIP) », a commenté devant la presse le président en exercice du G5 Sahel, le Nigérien Mahamadou Issoufou. Avant cette conférence, le G5 avait estimé à 1,9 milliard d’euros les fonds nécessaires pour financer son Programme d’investissements prioritaires (PIP) pour la période 2019-2021, qui vise en particulier les régions frontalières où les djihadistes tirent parti des carences des États pour s’implanter. En construisant des écoles, des centres de soins ou en offrant un accès à l’eau, les gouvernements espèrent fidéliser des populations déshéritées susceptibles sinon de céder aux sirènes djihadistes.
Repenser le développement de la région
L’Union européenne et la France mettront le plus la main au portefeuille. L’UE a ajouté 122 millions d’euros « d’argent frais », portant sa participation à 800 millions d’euros, selon le commissaire à la Coopération internationale et au Développement, Neven Mimica. Paris, qui avait déjà engagé 280 millions d’euros, a également promis une rallonge de 220 millions. De cette manière, « la France […] investira 500 millions au profit des priorités » du G5 Sahel, a souligné le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian. L’Arabie saoudite a également annoncé une aide de 100 millions de dollars pour le PIP, ainsi que 50 millions de dollars pour la force conjointe antijihadiste du G5 Sahel. Les cinq pays membres de l’organisation, parmi les plus pauvres du monde, avaient déjà annoncé qu’ils prendraient 13 % des besoins à leur propre charge.
« La sécurité avait pris le dessus sur le développement au sein du G5 Sahel », relevait récemment une source diplomatique française, en référence à la force conjointe, réactivée en 2017. « Notre souhait, c’est d’asseoir vigoureusement le second pilier stratégique et décisif de notre action commune, le développement économique et social du G5 Sahel », a souligné jeudi Mahamadou Issoufou. Dans un rapport publié mercredi, Action contre la faim (ACF), Oxfam et Save The Children ont toutefois alerté sur les risques du « lien entre sécurité et développement ». Selon ces trois ONG, « il est inquiétant de voir que la réponse se focalise sur le développement économique, sans prendre autant en compte les griefs légitimes de la population autour des problèmes de gouvernance, d’inégalités, de distribution des richesses et de justice de genre ».
Un programme en trois priorités
Les groupes djihadistes, en grande partie chassés du nord du Mali par l’intervention militaire lancée par la France en 2013, ont depuis regagné du terrain, en particulier dans le centre du pays, et le phénomène s’étend au Burkina Faso et au Niger voisins, se mêlant souvent à des conflits intercommunautaires. Cette dégradation de la situation a conduit le G5 Sahel à réactiver son projet de force conjointe. En plus d’un an et demi, cette force a mené une dizaine d’opérations avec l’appui direct de l’opération française Barkhane, sans réel impact sur le terrain où elle n’a pas encore croisé le fer avec les djihadistes.
La pauvreté et les changements climatiques qui réduisent l’accès aux ressources naturelles alimentent aussi les tensions intercommunautaires. Les forces armées sont par ailleurs régulièrement accusées d’exactions. Dans ce contexte, le G5 Sahel a défini un « programme de développement d’urgence » axé sur trois priorités : l’hydraulique, la gestion des conflits intercommunautaires et la sécurité intérieure. L’accent est mis sur le nord du Burkina Faso, le centre du Mali, la région des Hodh en Mauritanie ainsi que celles de Tillabéri au Niger et Kanem au Tchad.
Dans l’après-midi, M. Le Drian s’est rendu à 600 kilomètres au sud-est de Nouakchott pour visiter deux projets financés par l’Agence française de développement (AFD) qui s’inscrivent dans cette logique du G5 Sahel : une centrale solaire et thermique, inaugurée en avril, et un centre de santé maternelle.
Le Point Afrique