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Forum de Bamako : AVANTAGES ET INCONVÉNIENTS DE LA MIGRATION

Éminents universitaires, chercheurs, anciens chefs de gouvernement, experts internationaux… ont planché sur les deux
aspects du phénomène migratoire au cours de la rencontre qui s’est ouverte hier

Phénomène récurrent avec son cortège de morts, la migration illégale est à l’origine de relations, de plus en plus, tendues entre notre continent et l’Europe, où des pays se barricadent pour contrer les flux migratoires. Cette situation a inspiré la Fondation du Forum de Bamako dans le choix du thème de sa 19è édition qui a débuté, hier au CICB : «Immigration : quelle dynamique entre l’Europe et l’Afrique ? Opportunité ou menace pour les pays d’accueil ? Nationalisme ou métissage ? Construire des ponts ou construire des murs ? Que faire ensemble ?».
A ces questions, d’éminents universitaires, chercheurs, anciens chefs de gouvernement, experts internationaux… ont apporté des éléments de réponse et proposé des éléments pour un nouveau paradigme sur la question migratoire.
La cérémonie d’ouverture des travaux a regroupé du monde. Outre le Premier ministre, Soumeylou Boubèye Maïga qui présidait l’événement, un parterre de personnalités avait répondu à l’invitation du président de la Fondation du Forum de Bamako, Abdoullah Coulibaly. On notait la présence des chefs d’institutions de la République, des ministres, des membres du corps diplomatique et d’organisations internationales.
Afrique et Europe : deux continents proches par la géographie et qui, pour cette raison, ont établi depuis la nuit des temps des relations multiformes. Qu’en sera-t-il de ces relations dans les années à venir ? Il n’y a pas de réponse univoque à cette question, mais plusieurs scenarios sont envisageables parmi lesquelles la circulation des capitaux et celle des hommes vont constituer des variables importantes. Pour l’heure, c’est sous l’angle de la mobilité des hommes que nos relations sont le plus problématiques. C’est cet aspect que la 19è édition du Forum de Bamako a choisi de privilégier. L’objectif  étant d’appréhender les enjeux des migrations internationales tant pour l’Afrique que pour l’Europe, d’analyser sans concession les dynamiques, de formuler des propositions pour relever le défi de la mise en œuvre d’une politique de partenariat responsable et gagnant-gagnant. De manière spécifique, la question qui retiendra l’attention du Forum est celle de savoir si l’on peut faire des migrations un instrument d’accélération du développement et non un pis-aller, voire une menace. Pour planter le décor, Abdoullah Coulibaly a fait un saut dans l’histoire, démontrant que le phénomène migratoire est «aussi ancien que l’humanité». Les recherches scientifiques l’attestent. A travers les âges et sur tous les continents, la migration n’a fait que s’amplifier, à tel point qu’au XXè siècle la Déclaration universelle des droits de l’Homme proclame que «toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un Etat ; que toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien et revenir dans son pays».

500 milliards Fcfa -Selon Abdoullah Coulibaly, «l’homme a besoin de migrer sous d’autres cieux». Il le fait pour des raisons multiples, à la quête d’un mieux-être ou pour fuir toutes sortes de persécutions d’ordre politique, religieux, économique. Mieux, a-t-il soutenu, le monde ne peut se passer de la dynamique migratoire, qui a des effets positifs surtout sur le plan économique. Les chiffres sont éloquents : la diaspora africaine envoie par an plus de 15.000 milliards de Fcfa en Afrique. Et s’agissant du cas spécifique de notre pays, les transferts de fonds atteignent 500 milliards Fcfa.
Malgré ces constats unanimes, a-t-il déploré, la circulation des humains est devenue un enjeu épineux, un sujet polémique notamment dans les pays d’accueil. Et de préciser que la réponse qui consiste à fortifier les frontières devant les ressortissants des pays pauvres est à l’origine «d’incroyables tragédies». Pour étayer ses propos, il a rappelé que les sources onusiennes font état d’une vingtaine de milliers de morts entre 1990 et 2012 aux frontières de l’Europe.
De quoi demain sera fait ?, s’est-il interrogé, convaincu que le «repli sur-soi» prôné par certains Européens ne saurait constituer la solution miracle.
La représente de la Banque mondiale, Mme Soukeyna Kane, a dénoncé la tragédie de la migration illégale, avant de mettre l’accent sur l’apport des migrants, comme au Mali où les transferts dépassent de loin le montant total de l’aide au développement.
Une affirmation appuyée par l’ambassadeur de la France au Mali, Joël Meyer, qui a salué la diaspora malienne pour sa contribution à l’économie du pays. Le patron de la MINUSMA, Annadif Mahamat Saheh, a également mis en exergue les bienfaits de la migration, une «source de richesses économiques depuis la nuit des temps».
Dans son intervention, le Premier ministre a fait savoir que la migration, au même titre que les questions de paix et de sécurité, est un des sujets prioritaires dans la gouvernance actuelle.
Selon Soumeylou Boubèye Maïga, la règle de tout temps a été la mobilité et non le confinement. «Alors pourquoi la migration suscite autant de débats, pourquoi cristallise-t-elle autant de peur et d’angoisse surtout dans les pays d’accueil ?», a-t-il questionné.
Par ailleurs, le chef du gouvernement a rappelé que l’année 2015 est considérée comme celle de la crise migratoire en Europe. Cette année-là, l’attention médiatique a surtout été portée sur les migrants d’Afrique subsaharienne, avec un cortège de drames en mer.
Cet afflux a profondément bouleversé la politique d’asile en Europe où, face à l’ampleur du phénomène, l’UE et le continent africain ont convenu au sommet de la Valette de travailler de concert à travers des interventions d’urgence. Ce partenariat a débouché notamment sur la création du Fonds fiduciaire d’urgence pour l’Afrique. Trois ans après, ce Fonds, qui a suscité tant d’espoir, semble manqué d’efficacité. La lutte contre les causes profondes du phénomène, premier axe du plan d’actions de la Valette, n’a à ce jour pu mobiliser les ressources nécessaires.
Aussi, le Premier ministre a rappelé que le Mali est au cœur de la question migratoire. C’est pourquoi notre pays a noué des partenariats bilatéraux et multilatéraux. Le gouvernement envisage d’adopter, très prochainement, les textes qui vont consacrer la création d’un Observatoire national de la migration. Il a aussi évoqué la Politique nationale de la migration, dont l’ambition est de faire comprendre à nos jeunes que leur eldorado se trouve d’abord au Mali.
Le Forum, qui se poursuivra jusqu’au 23 février, est structuré en six sessions plénières thématiques pour mieux gérer le temps, couvrir toutes les problématiques essentielles et mieux orienter les débats. Au cours de cette 19è édition, à la demande des partenaires, il est prévu des activités connexes comme le forum genre et développement, les diners débat, les projections de film, les plateaux TV.

Issa DEMBéLé

 

Source: Essor

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