Au Mali, nous avons un talent particulier : celui de créer des institutions, de voter des lois, de mettre en place des fonds de gestion… mais sans jamais assurer leur bon fonctionnement. La dernière vérification du Bureau du Vérificateur Général (BVG) sur la Direction Générale des Eaux et Forêts (DGEF) en est une nouvelle illustration.
Bamada.net-Ce rapport met en lumière une situation préoccupante : des recommandations restées lettre morte, une gestion financière approximative et un suivi administratif plus que douteux. Pendant ce temps, nos forêts disparaissent, notre faune se réduit, et les responsables semblent toujours attendre qu’une nouvelle commission vienne leur rappeler ce qu’ils savent déjà.
Un patrimoine sous pression
Les chiffres sont accablants. Le Mali compte 112 forêts classées et périmètres protégés couvrant environ 1,3 million d’hectares. Mais combien sont réellement protégés ? Presque aucun. Déforestation incontrôlée, braconnage massif, exploitation abusive des ressources… La nature malienne subit une agression continue, et le Fonds d’Aménagement et de Protection des Forêts, censé agir en rempart, peine à remplir sa mission.
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En cause ? Une gestion administrative qui laisse à désirer. La moitié des recommandations émises par le BVG n’ont pas été appliquées. Pire, certains responsables ne prennent même pas la peine d’informer les soumissionnaires évincés des marchés publics. Un détail, diront certains ? Non, un symptôme du mal profond qui gangrène la gouvernance environnementale du pays.
Des efforts ou de la poudre aux yeux ?
Soyons honnêtes : à chaque scandale, on promet des réformes, des mesures correctives, un suivi rigoureux. Et puis, plus rien. Les dossiers s’empilent sur des bureaux poussiéreux pendant que la forêt brûle et que les espèces disparaissent.
À ce rythme, que restera-t-il des espaces protégés du Mali dans dix ans ? Un vague souvenir dans des rapports d’audit ? Une forêt classée n’a de valeur que si elle est réellement protégée. Un fonds de gestion n’a de sens que s’il est bien utilisé. Pour l’instant, nous en sommes loin.
Loin de moi l’idée de jeter la pierre à tous les acteurs de la protection de l’environnement. Certains se battent sur le terrain, malgré des moyens limités et des décisions souvent absurdes prises au sommet. Mais leur engagement ne suffira pas si ceux qui tiennent les rênes de la gestion des ressources naturelles continuent de détourner le regard.
Un sursaut est-il encore possible ?
La gestion durable de nos forêts et de notre faune ne doit pas être une simple case à cocher dans un programme gouvernemental. C’est une question de survie, pour nos communautés rurales, pour notre équilibre écologique et même pour notre économie.
Alors, faut-il encore un nouveau rapport accablant pour se réveiller ? Ou est-il enfin temps d’agir, avant qu’il ne soit trop tard ?
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Moussa Keita
Source: Bamada.net