Par l’Arrêt n° 1/C/2025, le Conseil constitutionnel du Sénégal a déclaré contraire à la Constitution la Loi portant interprétation de l’amnistie, votée par l’Assemblée nationale suite à une proposition faite par le député Amadou Ba du PASTEF, la formation politique du Président de la République et du Premier ministre.
Faut rappeler que c’est le Président Macky Sall qui a fait voter cette loi vers la fin de son mandat afin de permettre la libération de plusieurs détenus politiques, dont …Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko !
Selon Ousmane Sonko, « cette décision du Conseil Constitutionnel constitue un véritable revers contre une certaine opposition, haineuse au point de vouloir assimiler l’exercice d’une liberté politique et civique de manifester à des crimes de sang et de torture ».
Pour le Groupe parlementaire Takku Wallu Sénégal, « le Conseil constitutionnel a fait une stricte application de la loi en déclarant inconstitutionnelle la loi dite interprétative ……Le Groupe parlementaire Takku Wallu Sénégal salue cette décision de haute portée historique et juridique, en ce qu’elle conforte l’Etat de droit et le respect de la loi », peut-on lire dans son communiqué.
L’homme politique sénégalais, Thierno Alassane Sall, estime que « le juge constitutionnel rappelle ainsi un principe élémentaire : la justice à deux vitesses est bannie par l’État de droit. Il est curieux que le régime PASTEF ait oublié si vite ce principe fondamental ».
De l’avis de l’ancien ministre malien de la Justice, Garde des sceaux, Me Mamadou Ismaïla Konaté, « le juge constitutionnel a rappelé deux principes cardinaux du droit pénal : d’une part, l’interdiction absolue de la rétroactivité des lois pénales sauf lorsqu’elles sont plus douces ; d’autre part, le refus que l’interprétation d’un texte nouveau puisse dénaturer le sens de la loi antérieure… En refusant de céder à la tentation du «droit d’occasion», le Conseil constitutionnel du Sénégal a réaffirmé son rôle de gardien de la norme fondamentale, et s’est hissé à la hauteur de sa mission. Il s’est grandi. Et, ce faisant, il a renforcé la confiance dans l’institution judiciaire, en Afrique comme ailleurs »
Pour Me Konaté, « la crédibilité d’une Cour de justice en Afrique ne se décrète pas : elle se conquiert, elle se construit, elle se démontre … elle réside dans sa capacité à s’extraire des contingences politiques, à s’élever au-dessus des intérêts partisans, et à rendre des décisions susceptibles de contrarier les gouvernants eux-mêmes, au nom de la légalité et de l’équité. Loin d’être un simple contrepouvoir, la juridiction constitutionnelle affirme sa légitimité en exerçant ce que l’on pourrait appeler un «devoir d’ingratitude institutionnelle » : cette vertu démocratique qui consiste à désobéir loyalement aux puissances établies, chaque fois que la Constitution ou les principes fondamentaux de l’État de droit l’exigent ».
Ainsi le juge constitutionnel du Sénégal vient de donner une leçon de vertu dans un continent africain où les cours ou conseils constitutionnels s’illustrent par l’inféodation aux princes du jour au détriment de leur mission régalienne. Ces juges en charge de veiller au respect de la loi fondamentale, qui sont prêts à tout en violation de leur serment, doivent s’inspirer du courage des membres du Conseil constitutionnel du Sénégal. Et ils ne doivent jamais oublier que l’histoire jugera chacun et les actes qu’il aura posés.
Par Chiaka Doumbia
Source: Le Challenger