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Élection présidentielle 2018 : Le goût du pouvoir à tout prix

L’actualité au Mali, dominée par la question du terrorisme et de l’insécurité, a occulté un sujet important qui n’a vraiment pas mérité toute l’attention requise, compte tenu de son enjeu dans un pays souvent présenté comme le maillon faible de la lutte contre les forces du mal dans la sous-région. Il s’agit bien entendu de la pléthore de candidatures à l’élection présidentielle à venir au Mali.

Pour un pays comme le Mali, cela laisse à désirer. Le pays qui était pourtant parti sur de bonnes bases démocratiques, glisse tout doucement vers une forme de déliquescence qui ne dit pas son nom. On a bien envie de se demander si c’est vraiment à une élection présidentielle que l’on va avec un tel nombre de candidats ou bien sommes-nous face à des élections de proximité, c’est-à-dire locales ?
Pourquoi cette envolée de candidatures pour une élection où des gens savent consciencieusement qu’ils n’ont aucune chance de percer ?
Cette pléthore ne risque-t-elle pas d’être un indicateur du basculement du Mali dans la catégorie des Etats dits voyous où, un réseau ou un cartel peut, avec sa puissance financière, parvenir à prendre le contrôle de tout un Etat ?
Tant d’interrogations essentielles autour de cette élection dont le déroulement et l’issue vont sans nul doute influer sur le devenir de l’Etat malien. Ceci dans un contexte marqué par une instabilité de plus en plus croissante dans nos pays due d’une part à une faiblesse des institutions et d’autre part, à une conséquence immédiate de cette faiblesse, notamment, la montée en puissance des groupes criminels en Afrique de l’Ouest.

La démocratie de façon basique, c’est la liberté accordée à tout individu de faire ce que bon lui semble sans toutefois sortir du cadre de ce qui est autorisé par loi. Du coup dans un espace démocratique, tout le monde a le droit d’être candidat et c’est au nom de cette liberté que dans notre pays, on risque de se retrouver avec un nombre assez important de candidatures pour une seule place, le fauteuil présidentiel qui donne droit à l’exercice de la fonction la plus haute et la plus exigeante d’un Etat.

Certains seront tentés de nous faire croire qu’il s’agit là d’un signe de dynamisme et de vitalité du système démocratique malien ; une démocratie qui met au même pied d’égalité tous les citoyens et offre à chacun les mêmes chances pour se réaliser.
Oui, c’est une argumentation qui est recevable et nous l’épousons et la validons, mais avec bien entendu avec retenue. Car l’enjeu et l’importance d’une élection présidentielle est plus grand que les petits calculs qui motivent n’importe quel quidam à vouloir y tenter sa chance. La profusion des candidatures au Mali doit interpeller tout le monde. Pour une fonction aussi haute que prestigieuse, il faut craindre que le nombre élevé de candidats ne soit un indicateur d’une panne dans le système démocratique malien. Avec plus de 10 candidats, cette élection devient presqu’une foire d’empoigne, un véritable bordel où le peuple sans repère et abandonné à lui-même, risque de se lasser de tout ce spectacle. Plus de 10 candidatures supposent 10 programmes de société différents …. De la quantité, naît la satiété.

Si la Cour Constitutionnelle validait tous ces dossiers ?

 

Comment le peuple malien peu instruits, pourra-t-il se retrouver sur une liste électorale d’une longueur inqualifiable ? En temps normal, 10 candidats, c’est largement de trop. Le plus souvent en Afrique, plusieurs milliers de votes sont annulés parce que mal effectués. Avec maintenant 10, 20, 30 voire 40 candidats sur la liste, je vous laisse imaginer le désordre. Convenons qu’avec une telle élection, on voudrait juste donner la possibilité à des criminels de prendre le contrôle de tout un pays.
Souvenons-nous de ce qui s’était passé du Burkina Faso, et cela nous conforte dans notre raisonnement. Dr Adal Rhoubeid, candidat à la présidentielle nigérienne de 2016, n’a-t-il pas été interpellé par la gendarmerie nationale du Burkina Faso, après avoir été vu sur des caméras de surveillance, discutant avec les djihadistes qui ont frappé à Ouaga ? Voilà le genre de risque que nous courons aussi à force d’être légers dans nos législations, à force d’être moins exigeants sur le profil des candidats, à force d’appliquer à l’aveuglette certains principes sans chercher à les calquer sur les réalités de nos milieux. On fait ainsi le lit à des criminels, des plaisantins, des bandits, des terroristes à la tête de nos grandes institutions.
Mathurin Nago, universitaire et homme politique béninois n’a-t-il pas raison quand il s’indigne: «On n’a pas besoin d’être des centaines à briguer un fauteuil présidentiel. Ce n’est pas un banc. Je suis inquiet et relativement déçu de voir que certains compatriotes ne comprennent pas le caractère important et sacré de la fonction présidentielle.

N’importe qui se lève et veut être président. J’ai eu l’occasion de vivre l’expérience avec un compatriote qui est resté longtemps à l’étranger ; il est venu me voir un jour pour dire qu’il veut être candidat. Je lui ai répondu qu’il devrait commencer par les niveaux inférieurs de responsabilité pour se faire davantage connaître par le peuple et pour savoir si ce dernier a besoin de lui ou pas.   La fonction présidentielle est une fonction qui a besoin d’être apprise à travers une progression dans les apprentissages et les expériences à différents niveaux de responsabilité sociopolitique. On ne se lève pas du jour au lendemain pour être Président.

C’est vrai, il y a certains qui brûlent les étapes. Peut-être qu’ils ont des capacités qui leur permettent de brûler certaines étapes. Mais quand j’observe certaines candidatures, j’ai l’impression que ces gens ne sont pas conscients du caractère sacré et noble, mais aussi harassant et exigeant de la fonction. Quelque chose me dit que c’est surtout au Bénin que l’on observe cette banalisation de la fonction présidentielle. » ?

Bien dit mais il se trompe, car le cas est en train de vouloir se répéter chez nous au Mali, pour la présidentielle à venir.
Dans une démocratie qui fonctionne normalement comme on en voit un peu en Occident, il y a des mécanismes institutionnels qui font qu’il est très difficile de se retrouver dans un processus électoral avec un nombre de candidats à deux chiffres.
Appelez ça comme vous voulez mais avec un tel effectif, on ne va pas pour désigner un président. On va au contraire pour donner la caution à des individus soutenus et financés peut-être par des groupes de criminels et mafieux.
Les Maliens ont du pain sur la planche et il va falloir travailler sérieusement à une meilleure compréhension de la démocratie pour mieux la pratiquer.

 

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