Les écoles privées du Mali ne sont pas restées en marge de la crise liée à la pandémie du Coronavirus. En effet, les enseignants réclament 4 mois de salaire aux promoteurs qui, eux, justifient le non-paiement des salaires par le fait que durant ces quatre mois, il n’y a pas eu de cours. Et au même moment, certains promoteurs d’école privée réclament aux parents d’élèves « des arriérées » sans avoir dispensé des cours, ni assuré le transport des élèves.
La fermeture des écoles par les plus hautes autorités, dans le cadre de la lutte contre la propagation de la pandémie du coronavirus, a entrainé d’énormes conséquences dans la gestion des écoles privées qui fonctionnent pour la plupart sur la base des frais scolaires des parents d’élèves.
Aujourd’hui, s’il y a un effort à féliciter dans le secteur de l’éducation, c’est au niveau du privé. Durant la grève des Syndicats des enseignants signataires du 15 octobre qui a paralysé le secteur public, les écoles privées ont pu continuer les cours. Toutefois, les enseignants des écoles privées subissent de plein fouet la crise de la Covid19 : « Les enseignants du privé vivaient dans des conditions très déplorables, mais avec le Coronavirus et la fermeture des écoles par l’Etat, la situation s’est juste aggravée. Imaginez quatre mois sans salaires pour les chefs de familles qui sont pour la plupart en location et qui ont en charge très souvent de grandes familles et des charges beaucoup plus importantes que l’on ne croit. Certains sont d’ailleurs actuellement en phase d’être déguerpis de leur location faute de non-paiement du loyer », dira Abdoulaye Fotigui Berthé, secrétaire général du Syndicat libre des enseignants des écoles privées du Mali (SYLEP-Mali).
Aussi, ajoute-a-t-il fait savoir, les promoteurs pour le moment se cachent derrière une loi du Code de travail, notamment les articles 34 et 35 qui stipulent qu’en cas de force majeure, l’employeur peut suspendre le contrat pendant trois mois sans salaire :
« Chez moi, au Lycée Moribougou de Boulkassombougou, les responsables ont averti sur le fait que nous sommes en chômage technique. Et que l’école ne pourrait pas nous payer. Il y a aussi le Lycée Mah Sylla de Doumazana. Mais ce n’est pas nous qui avons refusé de travailler. C’est une décision de l’Etat de fermer les écoles. Et l’Etat a payé en intégralité tous les frais de scolarité y compris les 4 mois de fermeture ».
Ces allocations qui tournent autour de 125 000 FCFA par élève et par an pour le niveau secondaire et un peu plus pour la formation professionnelle, sont une sorte de bourse que l’Etat octroie aux établissements semi-privés : « Et au moment où je vous parle nous avons des informations sûres que la plupart des écoles ont déjà perçu leurs frais scolaires et l’on s’est rendu compte qu’ils ont pris leurs argents, mais n’ont pas voulu payer les enseignants. Ce que nous déplorons c’est que la plupart de ces écoles privées existent depuis plus de 10 à 15 ans. Comment expliquer qu’avec seulement 4 mois de fermeture, elles n’arrivent pas à supporter les coups », se révolte-t-il.
Au niveau du fondamental, ce sont généralement les frais de scolarité que les parent paient qui permettent d’assurer le salaire :
« Ainsi puisque durant les 4 mois de fermeture, les parents n’ont pas payé les cotisations, les promoteurs eux aussi ne veulent pas donner les salaires des enseignants », a déclaré M. Berthé.
Pour cette Directrice d’une école fondamentale, le paiement de salaire est conditionné au travail : « le salaire signifie, le mérite d’un travail, quelqu’un qui n’a pas travaillé comment voulez-vous qu’on le paie ? »
Le Secrétaire général du Syndicat libre des enseignants des écoles privées du Mali indique que pour le secondaire, les promoteurs estiment que cet argent versé ne suffirait pas et qu’il fallait d’abord payer la location de l’école avec.
Par ailleurs, un économe d’un établissement de l’Académie d’enseignement (AE) de Kati explique que les allocations des lycées ne tombent pas tous en même temps.
« Chaque année, l’Etat verse pour certains lycées avant d’autres », explique-t-il.
En tout cas, il est de la responsabilité de l’Etat d’avoir un droit de regard sur la gestion des écoles privées au Mali. Toutefois, le secrétaire général du Syndicat regrette que ce sont les mêmes personnes qui sont à la base de ce scandale :
« A Faladiè, l’ancien député Boulkassoum Touré, l’ex-président de la Commission éducation de l’Assemblée nationale possède deux écoles privées ; Barthelemy Togo, l’ancien ministre de l’Education dispose d’une école à Kalaban sans compter celles de Mahamoud Ben Katra à Fombabougou ».
Il convient de noter qu’au Mali, les écoles privées se créent en fonction des affinités et des intérêts et tout le monde est devenu promoteur d’école privée au Mali. Cependant, il est de la responsabilité de tous les acteurs de l’éducation de trouver une véritable réponse à cette anarchie dans le secteur.
Andiè Adama DARA
Source: Bamakonews