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ÉDITORIALE : Ras Bath face à la justice, un procès en attente

Depuis le 28 mars 2023, Mohamed Youssouf Bathily, alias Ras Bath, croupit en prison, privé de liberté et soumis à une détention provisoire prolongée. La dernière décision du juge Moussa Diarra, du 1er cabinet d’instruction du Pôle national de lutte contre la cybercriminalité, prise le 18 mars 2025, vient encore rallonger son incarcération. Un choix judiciaire qui ne manque pas d’interroger sur l’état de la justice et des libertés au Mali.

Une justice implacable contre le chroniqueur

Bamada.net-Ras Bath, célèbre chroniqueur et activiste malien, est accusé de faits graves : « association de malfaiteurs », « atteinte au crédit de l’État et de ses institutions », et « crimes et délits à caractère racial, régionaliste ou religieux ». Ces charges s’appuient sur les articles 175, 147 et 57 du Code pénal, ainsi que sur les articles 55 et 56 de la loi n°2019-056 du 5 septembre 2019 portant répression de la cybercriminalité. Des infractions passibles de lourdes peines, allant de six mois à sept ans d’emprisonnement, assorties d’amendes pouvant atteindre 10 millions de francs CFA.

La rigueur avec laquelle la justice malienne poursuit Ras Bath pose question. Certes, nul ne saurait être au-dessus de la loi, mais le maintien en détention d’un détenu d’opinion dans un contexte où le pays traverse une crise socio-politique majeure laisse perplexe. Si la loi doit être appliquée avec fermeté, ne devrait-elle pas aussi être guidée par des impératifs d’apaisement et de justice équitable ?

Un dossier à l’ombre des considérations politiques ?

L’incarcération de Ras Bath intervient dans un climat marqué par des tensions politiques et sociales exacerbées. Son arrestation, survenue après des déclarations fracassantes sur la mort de l’ancien Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga, avait déjà suscité un vif émoi. L’accusation de « simulation d’infraction » ayant servi de base à son interpellation initiale s’est transformée en un dossier judiciaire plus lourd, où l’on peine à distinguer le droit de la politique.

 

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Alors que plusieurs voix s’élèvent pour réclamer la libération des détenus d’opinion, la prolongation de la détention de Ras Bath apparaît comme une décision hautement symbolique. En refusant d’accorder une liberté provisoire au chroniqueur, la justice malienne envoie un message clair : la rigueur judiciaire ne fléchira pas face aux pressions de l’opinion publique.

Une détention indéfinie ?

Dans son ordonnance, le juge Diarra justifie le maintien en détention provisoire par la nécessité de « préserver l’ordre public » et d’empêcher toute fuite. Mais jusqu’à quand ? L’absence de date pour un éventuel procès alimente les inquiétudes sur une justice qui semble privilégier la réclusion prolongée à une comparution devant une chambre de jugement. Une situation qui n’est pas sans rappeler d’autres affaires similaires où l’arrestation de figures publiques s’est transformée en une détention sans fin.

Le cas Ras Bath révèle ainsi les limites d’un système judiciaire où la détention provisoire est souvent utilisée comme une peine anticipée. Cette pratique, largement critiquée par les défenseurs des droits de l’homme, constitue un véritable problème dans un État de droit. Car si la justice doit sanctionner les délits, elle ne peut se substituer à une machine à broyer des voix dissidentes.

Un climat de méfiance et de frustration

À mesure que l’affaire Ras Bath s’enlise, la frustration grandit au sein de l’opinion publique. Ses partisans dénoncent une « cabale judiciaire » visant à museler l’activisme politique et médiatique au Mali. À cela s’ajoute le sentiment que la répression des voix dissidentes prend le pas sur des priorités plus urgentes, notamment la lutte contre l’insécurité et la crise économique qui secouent le pays.

Dans ce contexte, la prolongation de la détention du chroniqueur malien risque d’avoir des conséquences bien au-delà de son cas personnel. Elle participe à l’érosion de la confiance des citoyens dans leur justice et alimente un climat de suspicion généralisée. Une justice perçue comme sélective et instrumentalisée devient un facteur d’instabilité plutôt qu’un rempart contre l’arbitraire.

Quelle issue pour Ras Bath ?

Alors que Ras Bath entame bientôt sa troisième année de détention, une question demeure : jusqu’où ira cette affaire ? Un procès équitable est-il en vue, ou l’activiste devra-t-il encore attendre indéfiniment derrière les barreaux ?

Le dossier Ras Bath est désormais un test pour l’indépendance et l’impartialité de la justice malienne. En prolongeant sa détention, les autorités judiciaires prennent le risque d’attiser les tensions et de donner du grain à moudre à ceux qui dénoncent une instrumentalisation de la justice. Une situation qui, au final, ne profite ni à l’image du pays, ni à l’apaisement tant recherché.

 

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Ladji Djiga Sidibé

 

Source: Bamada.net

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