Le Mali vient de perdre l’un de ses artistes les plus prometteurs, Abdoulaye Macalou alias Lord Makaveli, dans des circonstances qui nous interpellent tous. Au-delà de la douleur légitime et de l’émotion collective, c’est l’image d’une société en quête de repères, souvent tentée par la violence, qui se reflète dans ce drame survenu à Bacodjicoroni ACI.
Bamada.net-Ce mercredi noir, un malentendu, une peur collective et une vengeance improvisée ont arraché la vie à un jeune homme de 23 ans. Pas un voyou. Pas un criminel. Un artiste. Un frère. Une voix. Un symbole d’espoir pour toute une jeunesse.
Le Contrôleur Général Issa Bill Traoré, Directeur régional de la Police du district de Bamako, l’a clairement exprimé au micro de l’ORTM : Lord Makaveli n’a pas volontairement percuté la vieille dame. C’est dans un moment de panique, alors qu’il fuyait une foule menaçante, qu’il a involontairement causé un accident tragique. La suite, nous la connaissons : un lynchage sauvage, des vidéos circulant comme du feu sur la poudre, et une société entière sidérée par sa propre brutalité.
À Lire Aussi : Affaire de la mairie de Konsinka: comment le gouverneur de Kayes a échappé au lynchage
À Lire Aussi : Tabacoro logements sociaux : Un homme échappe à un lynchage
Chez Bamada.net, nous refusons de normaliser cette violence.
Nous refusons que la justice se résume à une ruelle, des cris et des coups mortels.
La justice populaire n’est pas la justice
Que personne n’oublie : le droit existe. Les institutions sont là. La colère, la peur, l’indignation ne peuvent justifier qu’un groupe d’individus s’érige en tribunal, en bourreau, en fossoyeur. Aujourd’hui c’était Lord Makaveli. Demain, qui ? Un voisin ? Un inconnu ? Un enfant ?
La justice populaire est une menace pour chacun de nous.
Il faut le dire sans détour : nous glissons dangereusement vers une société où les rumeurs condamnent plus vite que les juges, où la foule juge plus fort que les lois, et où la vie humaine perd toute valeur au nom d’une vengeance immédiate.
Lord Makaveli : un cri, un combat, une perte
Lord Makaveli n’était pas qu’un rappeur. Il était un porte-voix. À travers ses textes, il dénonçait l’injustice, la pauvreté, l’oubli. Il rêvait d’un Mali debout, éveillé, juste. Il incarnait cette jeunesse lucide, talentueuse, prête à affronter la vie par l’art et la parole.
Il méritait mieux.
Il méritait de grandir, de créer, de vieillir entouré des siens. Il méritait notre protection, pas notre silence.
Une réponse collective, citoyenne et politique
Bamada.net appelle les autorités à aller jusqu’au bout de l’enquête, sans complaisance. Tous les auteurs et complices de ce meurtre doivent répondre de leurs actes. Pas pour venger Lord Makaveli, mais pour protéger l’idée même de justice dans notre pays.
Nous appelons également à un travail collectif d’éducation citoyenne. L’école, les médias, les leaders religieux et coutumiers doivent porter un message clair : rien ne justifie la barbarie. Il faut reconstruire le lien de confiance entre la population et l’appareil judiciaire. Tant que ce lien sera brisé, la foule croira qu’elle peut tout se permettre.
Notre responsabilité, à Bamada.net
En tant que média, nous avons le devoir de nommer les choses, de dénoncer la dérive, de rappeler l’humanité. Nous continuerons à donner la parole aux victimes, à suivre de près les enquêtes, et à porter les aspirations de cette jeunesse qui refuse la fatalité.
Que cette tragédie soit un réveil, pas une répétition.
Que la mémoire de Lord Makaveli devienne un engagement, pas un oubli.
NB : Toute reproduction, intégrale ou partielle, sans une autorisation explicite de notre part est strictement interdite. Cette action constitue une violation de nos droits d’auteur, et nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour faire respecter ces droits.
Fatoumata Bintou Y
Source: Bamada.net