Le Mali est malade de sa démocratie, ou du moins de ce qu’on a longtemps voulu faire passer pour tel. Depuis l’avènement du multipartisme, les formations politiques ont poussé comme des champignons, sans repères idéologiques clairs, sans programmes cohérents, et souvent sans autre ambition que celle d’occuper le terrain pour des intérêts personnels. Le résultat est là : une scène politique saturée, illisible, où plus de 200 partis coexistent sans conviction, sans crédibilité, et surtout sans impact réel sur la vie des citoyens.
Bamada.net-À l’occasion des concertations régionales sur la relecture de la Charte des partis politiques, une exigence forte s’est exprimée à travers tout le pays : mettre fin à ce désordre institutionnalisé. À Bamako comme dans les régions, les participants ont été unanimes pour réclamer un assainissement du paysage politique. Certaines propositions sont radicales : limiter à cinq le nombre de partis, imposer une caution dissuasive de 180 millions de FCFA, dissoudre tous les partis actuels pour repartir sur des bases saines.
Si ces recommandations choquent, c’est qu’elles disent tout haut ce que beaucoup pensent tout bas : le multipartisme à outrance est devenu une menace pour la stabilité et la cohésion du pays. Il ne garantit plus la démocratie, il l’étouffe. Il ne donne plus la parole au peuple, il la disperse dans une cacophonie de slogans creux.
À Lire Aussi :Relecture de la charte des partis politiques : Le COCPJF engage le débat avec les partis politiques et la société civile
À Lire Aussi :Relecture de la charte des partis politiques : Attention à la discrimination
Il est temps de reconnaître que le système actuel est arrivé au bout de sa logique. Loin d’encourager la pluralité d’idées, il favorise la fragmentation, la surenchère, et l’opportunisme politique. Loin de renforcer la représentativité, il affaiblit l’autorité des institutions. Et surtout, il éloigne les citoyens d’un espace politique qu’ils ne reconnaissent plus, tant il est confisqué par des élites déconnectées.
L’heure n’est plus à la tolérance passive. L’heure est à la refondation. Mais cette refondation doit être menée avec intelligence, sans tomber dans l’excès inverse : réduire le nombre de partis, oui — mais pas au prix d’un pluralisme étouffé. Imposer des conditions strictes, oui — mais sans exclure les voix porteuses d’alternatives authentiques.
Car le véritable défi n’est pas seulement de faire le ménage, mais de reconstruire une culture politique fondée sur l’éthique, le mérite et la vision pour le pays. Le multipartisme ne doit pas être une vitrine vide, mais un espace vivant où les idées se confrontent, où les projets s’élaborent, où l’intérêt général prime sur les calculs partisans.
Refonder, c’est aussi restaurer la confiance entre les citoyens et leurs représentants. Le Mali mérite mieux que cette jungle partisane. Il mérite un système politique à la hauteur de ses aspirations profondes.
NB : Toute reproduction, intégrale ou partielle, sans une autorisation explicite de notre part est strictement interdite. Cette action constitue une violation de nos droits d’auteur, et nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour faire respecter ces droits.
Moussa Keita
Source: Bamada.net