Donald Trump a surpris tout Washington vendredi en menaçant de mettre son veto à la loi de financement de l’Etat fédéral adoptée par le Congrès, au risque d’une nouvelle fermeture des administrations, sous prétexte qu’elle n’inclut pas de compromis sur l’immigration.
Jouant sur les nerfs de la classe politique, il a annoncé une conférence de presse à 13H00 (18H00 GMT), sans en dire plus sur ses intentions.
La menace de veto, en contradiction frontale avec la position annoncée la veille par son directeur du Bugdet qui assurait la main sur le coeur que le président signerait le texte, est venue renforcer encore l’impression de chaos régnant à la Maison Blanche.
« Les Américains ont besoin de leadership à la Maison Blanche, pas de plus de chaos volontaire », a dit le sénateur démocrate Richard Blumenthal sur Twitter.
Jeudi, la valse des postes s’est poursuivie au sein de l’équipe rapprochée du locataire de la Maison Blanche avec le limogeage du conseiller à la sécurité nationale, le général H.R. McMaster, et son remplacement par le « faucon » et analyste de Fox News John Bolton.
Si Donald Trump mettait sa menace à exécution, l’Etat fédéral fermerait partiellement vendredi à minuit, la troisième fermeture depuis le début de l’année.
« J’envisage un VETO de la loi de dépenses en raison du fait que les plus de 800.000 bénéficiaires de DACA ont été complètement abandonnés par les démocrates (même pas cités dans la loi) et que le MUR FRONTALIER, dont nous avons désespérément besoin pour notre défense nationale n’est pas totalement financé », a tweeté le dirigeant.
Daca est un programme de permis de séjour temporaires pour de jeunes clandestins, créé par Barack Obama et supprimé en septembre dernier par l’actuel président, qui avait mis au défi le Congrès de voter une réforme migratoire à la place. Mais majorité et opposition n’ont jamais pu trouver un terrain d’entente.
Un veto ne peut être surmonté que par un nouveau vote de la Chambre des représentants et du Sénat, à une majorité de deux tiers.
Outre l’improbabilité politique d’élaborer en quelques heures un compromis que les élus n’ont pas été capables de trouver en plusieurs mois, un obstacle pratique se pose: la plupart des élus ont quitté la capitale fédérale jeudi soir ou s’apprêtaient à le faire vendredi matin, pour deux semaines de congés. Des dizaines d’entre eux assistent par ailleurs vendredi matin aux obsèques d’une élue dans l’Etat de New York.
La loi de finances en question a été négociée pendant des semaines par la majorité républicaine et l’opposition démocrate, dans la douleur, chaque camp ayant dû céder sur la plupart de ses revendications.
D’un montant de près de 1.300 milliards, dont 700 pour la seule Défense, elle doit financer l’Etat fédéral jusqu’à la fin de l’année budgétaire en cours, soit jusqu’au 30 septembre.
– ‘La réponse est oui’ –
Le milliardaire, les républicains et les démocrates (qui disposent d’une minorité de blocage au Sénat) ont longtemps tenté de trouver un compromis pour régulariser des centaines de milliers de jeunes clandestins, en échange de réformes migratoires et du financement de la construction du haut mur en béton promis par Donald Trump à la frontière mexicaine.
Mais leurs positions sont restées inconciliables.
In fine, le dirigeant n’a obtenu que 1,6 milliard pour construire des clôtures ou en rénover quelques dizaines de kilomètres, loin des 25 milliards qu’il avait un temps réclamés. Et les négociateurs démocrates n’ont rien décroché pour les « Dreamers », les rêveurs, comme sont appelés les clandestins arrivés enfants aux Etats-Unis.
C’est l’une des raisons pour lesquelles 77 des 192 élus démocrates de la Chambre avaient voté contre le texte jeudi. De leur côté, 90 des 238 représentants républicains s’étaient également opposés, furieux de la hausse des dépenses actée dans la loi.
Le groupe des conservateurs du Freedom Caucus a d’ailleurs encouragé le président à mettre son veto afin de provoquer une réécriture de la loi.
Au Sénat, le vote a été de 65 voix en faveur du compromis, et 32 contre.
« Est-ce que le président signera cette loi ? La réponse est oui », avait indiqué Mick Mulvaney, directeur du budget à la Maison Blanche, lors d’un point de presse jeudi. « Est-ce parfait ? Non. Est-ce exactement ce que nous demandions? Non », avait-il ajouté.
Le tweet a provoqué la consternation d’élus démocrates, qui accusaient le locataire de la Maison Blanche d’hypocrisie.
« N’oublions pas que c’est vous qui avez mis fin à Daca et torpillé tout compromis. C’est de votre faute », a répondu le démocrate Tim Ryan.
AFP