Une portion du pont Morandi, à Gênes, s’est effondrée mardi matin. Le bilan provisoire s’élève à au moins 35 morts. Le point complet.
• Que s’est-il passé?
Le drame s’est déroulé mardi en fin de matinée, sous une pluie battante. À Gènes, dans un énorme grondement, qui a fait craindre aux riverains un tremblement de terre, le pont dit Morandi, du nom de son concepteur, s’est effondré sur plus de 200 mètres, entraînant une trentaine de voitures et plusieurs poids lourds. Environ 35 véhicules et quelques camions ont basculé dans le vide et des blocs du viaduc se sont abattus sur une voie ferrée, des bâtiments et une rivière se situant à cinquante mètres en contrebas. Plus de 400 personnes ont été évacuées des bâtiments situés aux alentours ou en dessous du pont autoroutier, ont annoncé les autorités de la ville.
Selon des experts, le pont Morandi, long de 1,18 km, ouvrage en béton de la fin des années 1960, a connu des problèmes structurels dès sa construction et faisait l’objet d’un coûteux entretien, lié en particulier aux fissures et à la dégradation du béton. Giovanni Toti, gouverneur de la province de Ligurie, dont Gênes est le chef-lieu, a pour sa part estimé que les travaux d’entretien du viaduc avaient été «insuffisants».
Des dizaines de victimes et peu de survivants
Le ministre de l’Intérieur Matteo Salvini, en déplacement en Sicile mardi soir, a parlé d’au moins une trentaine de morts et de nombreux blessés graves. Mercredi matin, des médias italiens citant des sources au sein du ministère de l’Intérieur, évoquent un bilan encore provisoire de 35 morts, dont trois enfants âgés de 8 à 12 ans. Les secouristes ont également évacué 16 blessés, dont 12 se trouvaient dans un état grave.
Dans un amas impressionnant de tôles et de béton, des centaines de secouristes continuent de fouiller les décombres du viaduc, à la recherche de survivants. «L’espoir ne cesse jamais, nous avons déjà sauvé une dizaine de personnes sous les décombres, on va travailler 24 heures sur 24 jusqu’à ce que la dernière victime soit secourue», assurait mardi soir un responsable des pompiers, Emanuele Giffi. «Il y a des bâtiments qui ont été touchés mais il semble que toutes les victimes se trouvaient sur le pont». Quelque 300 pompiers s’activent sur place, avec des chiens renifleurs, pour tenter de localiser des survivants.
• Après l’émotion, la polémique
Très vite, le choc a fait place à la colère. «Je ferai tout pour avoir les noms et les prénoms des responsables passés et présents. Il est inacceptable de mourir comme ça en Italie», a lancé le ministre de l’Intérieur, Matteo Salvini. «Ils devront payer, payer tout et payer cher». Le gouvernement antisystème au pouvoir depuis le mois de juin à Rome s’est immédiatement dit conforté dans l’idée que l’Italie devait dépenser davantage pour ses infrastructures, quitte à ne pas respecter les règles budgétaires fixées par l’Union européenne. «Nous devrions nous demander si le respect de ces limites (de déficit budgétaire) est plus important que la sécurité des Italiens. De toute évidence ce n’est pas le cas», a déclaré Matteo Salvini.
Le ministre des Transports, Danilo Toninelli, a promis à la télévision que toute la lumière serait faite sur les causes du drame. «Ce genre de tragédie ne peut pas se produire dans un pays civilisé», a-t-il tonné. Le ministre a promis que les responsables de l’accident devraient «rendre des comptes», en particulier si l’enquête démontre un défaut d’entretien de l’édifice. «La maintenance passe avant tout», a-t-il insisté, ajoutant qu’elle relevait de la responsabilité de son opérateur et que le gouvernement se constituerait partie civile si le drame donne lieu à un procès. Le secrétaire d’État aux Transports, Edoardo Rixi, issu comme Salvini de la Ligue (extrême droite), a renchéri sur le même thème: «Les habitants de Gênes empruntent ce pont deux fois par jour. Nous ne pouvons pas vivre avec des infrastructures construites dans les années 1950 ou 1960», a-t-il tonné sur la chaîne SkyNews24.
• L’opérateur se défend
L’opérateur de l’A10, Autostrade per Italia, a rappelé pour sa part que d’importants travaux de rénovation avaient été menés sur le viaduc en 2016. Parlant d’un accident «imprévisible», son directeur pour la région de Gênes, Stefano Marigliani, a assuré que le pont était «constamment surveillé, bien au-delà des exigences légales» et qu’il n’y avait «aucune raison de penser qu’il était dangereux».
Autostrade a aussi indiqué dans un communiqué que des travaux étaient en cours pour consolider ses fondations mais Angelo Borelli, de la Protection civile, a dit ne pas être au courant de tels travaux. L’opérateur a également dit qu’il allait aider les enquêteurs à déterminer les causes de l’accident et qu’il était en train d’évaluer comment reconstruire le pont. Le titre d’Atlantia, maison mère d’Autostrade, a perdu jusqu’à 10% à la Bourse de Milan après l’accident, avant d’effacer la moitié de ses pertes à la clôture
D Dembélé avec
le Figaro