Bamako le 02 Septembre 2018
Contexte
Dans la nuit du 26 Août, Paul Ismaël BORO a été arrêté chez lui par des hommes armés devant sa famille et amené vers une destination inconnue.
Par la suite, Moussa KIMBIRI subira le même traitement, au cours de la nuit du 27 au 28, dans son «GRIN», derrière l’ORTM vers 01 h.
Ils seront finalement déposés au service d’investigation judiciaire de la Gendarmerie, le mardi vers 19 heures, comme l’indiquait le communiqué du Ministre de la sécurité et de la Protection civile qui confirme que cela est l’œuvre de la Direction Générale de la Sécurité d’Etat.
Leurs avocats ont pu les rencontrer et les assister à partir du mercredi matin où ils seront informés des poursuites engagés à leur encontre.
Les poursuites sont engagées par le Parquet du Tribunal de Grande instance de la Commune III, notamment pour tentative de déstabilisation des Institutions de la République.
- Un professionnalisme de la part des Officiers de police judiciaire à saluer puisque tous leurs droits leur ont été notifiés dès leur arrivée et le droit d’assistance de leurs avocats respecté ;
- Des arrestations en dehors de tout circuit officiel de poursuite puisque non autorisées par un parquet, encore moins un juge d’Instruction ;
- Un mode d’arrestation peu ordinaire pour une affaire que la simple unité d’enquête du quartier aurait pu traiter ;
- Une détention au secret pendant plus de 24 heures sous un régime juridiquement absent du droit au Mali ;
- Un traitement inhumain et dégradant pendant la détention au secret frisant la torture.
Ces pratiques, nous pensions étaient d’un autre temps, nous pensions ces pratiques à jamais révolues au Mali.
C’est pourquoi nous n’acceptons pas que cela recommence.
Nous disons non à toute forme d’arbitraire ;
«Tous les Hommes naissent libres et égaux en droit»
La violation des dispositions de l’article 76 du CPP sur la garde à vue à partir du moment où les délais de la garde à vue ont expiré depuis vendredi.
La fin de la garde à vue a d’ailleurs été officiellement notifiée aux suspects et le PV a déjà été transmis au Parquet, donc ils ne sont plus détenus dans le régime de la Garde à vue.
Ce faisant, leur présence dans les locaux des services d’investigations judiciaires relève plus d’une séquestration que d’une détention légale, au sens juridique.
Les avocats ne demandent que le rétablissement de l’équilibre et le droit à une justice équitable.
Plus précisément, ils demandent la remise en liberté afin que cette affaire reçoive un traitement conforme au droit.
Sur le dossier lui-même
Toutes sortes de rumeurs ont couru, du financement de mercenaires Burkinabés à l’armement de manifestants lors d’une marche.
Il n’en est rien
La seule arme retrouvée avec Paul est son arme personnelle qui fait l’objet de toutes les autorisations légales.
Si d’autres armes ont pu être prétendument retrouvés, il est loisible aux autorités de poursuivre alors leurs détenteurs qui jouissent certainement jusqu’ici de toute leur liberté puisqu’aucune autre arrestation en dehors de Paul et Moussa n’a été annoncée.
Paul et Moussa ne sauraient en répondre donc ce sujet n’est pas à l’ordre du jour.
L’enseignement à tirer
Ces actes violent allègrement tous les accords auxquels le Mali a souscrit au niveau international, notamment le pacte International relatif aux droits civils et politiques, la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradant, la Charte africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, la Résolution de l’Union Africaine sur le Droit à un Procès équitable et à l’assistance judiciaire.
Les mêmes actes violent également toutes les lois de notre pays, notamment la Constitution ainsi que le code de procédure pénal.
Les actes posés nuisent gravement à l’image de notre pays.
La situation aurait pu dégénérer puisque tous les deux ont cru à une attaque de bandits au cours de leur enlèvement.
Plus grave, ils ont tous passé tout le temps de leur séquestration dans les locaux de la sécurité d’Etat menottés et cagoulés.
Moussa Kimbiri par exemple est resté les bras menottés dans le dos toute la durée de sa séquestration, l’empêchant ainsi de dormir.
Ces pratiques sont à bannir et doivent être condamnés par toutes les organisations de défense des Droits de l’Homme.
Le Collectif des Avocats
La rédaction