Un an après l’élection-choc du 8 novembre 2016, Donald Trump a cassé tous les codes de la présidence américaine.
Sa base se réjouit, ses détracteurs se désolent, tandis que le reste du monde observe cette expérience politique inédite, oscillant entre curiosité, perplexité et consternation.
Que ce soit dans le Bureau ovale, à la Trump Tower de New York ou à bord d’Air Force One, les mots et les gestes de l’homme d’affaires de 71 ans traduisent une frustration dans l’exercice du pouvoir.
Porté à la tête de la première puissance mondiale sur un discours “anti-élites”, celui qui promettait à l’Amérique de lui rendre sa grandeur peine à rassembler et à faire aboutir ses réformes annoncées, même s’il peut mettre en avant de bons indicateurs économiques (croissance et emploi).
Sous la lumière crue du poste le plus exposé au monde, le 45e président de l’histoire distribue les coups sans retenue et se recroqueville sur une chaîne de télévision, Fox News, qu’il regarde en boucle et à qui il accorde désormais la quasi-totalité de ses interviews.
Donald J. Trump, qui occupe le premier mandat électif de sa vie, donne souvent l’impression de refuser de troquer son costume de candidat pour celui de président.
L’homme qui assurait pouvoir être “plus présidentiel” que tous ses prédécesseurs (à l’exception d’Abraham Lincoln), décoche chaque matin une salve de tweets au ton souvent vengeur. Sur la scène internationale, ses adversaires comme ses alliés s’interrogent sur la valeur à accorder aux messages de @realDonaldTrump.
L’enquête du procureur spécial Robert Mueller sur l’interférence russe dans la campagne empoisonne sa présidence et crée un climat de fébrilité à la Maison Blanche.
– Fidèle à ses promesses –
Pour ses soutiens, le promoteur immobilier de New York est fidèle à sa promesse de secouer Washington et de mettre “L’Amérique d’abord” au coeur de son action. Il tient tête “aux médias et aux bureaucrates qui vont trop loin”, souligne Eric Beach, stratège républicain.
Mais un an après son élection et dix mois après sa prise de fonction, il est le président le moins aimé de l’histoire moderne des Etats-Unis.
Selon le dernier sondage Gallup, sa cote de popularité est au plus bas depuis sa prise de fonction, à 33%. Un chiffre très en-deçà de ses cinq prédécesseurs – démocrates ou républicains – au même stade.
Prenant le contre-pied systématique de Barack Obama, il revendique son style abrasif et sans filtre au nom d’un échange direct avec l’Amérique “oubliée” qui l’a porté au pouvoir. Celle notamment des blancs emportés par le tourbillon de la mondialisation dont il su, durant la campagne, capter les peurs et les angoisses.
“J’ai hérité d’une immense pagaille”, répète-t-il, soucieux de marquer le contraste avec ses prédécesseurs auxquels il ne fait que très rarement référence et qu’il ne sollicite jamais.
Tantôt naïf, tantôt roublard, Donald Trump a avoué, au fil des mois, découvrir la difficulté de la tâche.
Celui qui s’était auto-proclamé, dans un livre devenu best-seller, maître dans “L’art du deal”, peine à trouver le ton juste avec le Congrès, dont les deux chambres sont pourtant aux mains de son parti.
Multipliant les maladresses, les coups de menton et les violentes prises de bec avec les élus de tout bords qu’il affuble de surnoms moqueurs, son action est bloquée, de l’immigration à l’assurance-maladie.
– ‘Zigzague’ –
“Ce président zigzague en permanence, c’est impossible de gouverner”, se lamente le sénateur démocrate Chuck Schumer.
Que ce soit contre le chef des républicains au Sénat, un juge de Hawaï, les agences de renseignement, une élue locale de Porto-Rico ou les médias “fake news”, Donald Trump est constamment à l’offensive.
“Il est en guerre avec presque tout le monde (…) Il présente aux Américains un nouvel ennemi chaque semaine”, souligne Julian Zelizer, professeur à l’université de Princeton.
Sa porte-parole, Sarah Huckabee-Sanders, défend ce style iconoclaste: “Les habitants de ce pays n’ont pas élu quelqu’un de faible. Il ont voulu quelqu’un de fort qui, quand il est attaqué, sait riposter”.
Au-delà de son bilan, qui reste largement à écrire – sur fond de dérégulation à tout-va et de promesses de baisses d’impôts qui contribuent à faire flamber la bourse – nombre de voix s’élèvent pour dire leur vive inquiétude sur l’évolution de la fonction présidentielle.
L’ex-président George W. Bush a mis en garde contre un repli identitaire et isolationniste et la montée en puissance des théories du complot. Deux sénateurs républicains ont dénoncé un président adepte des “contre-vérités” et “dangereux pour la démocratie”
“Les actes et les mots de Trump pourraient avoir un impact énorme sur l’une des institutions les plus importantes de notre démocratie”, estime Julian Zelizer. “Le plus grand danger est peut-être que nous ne soyons plus choqués par quoi que ce soit”.
(©AFP / 02 novembre 2017 11h48)