En entretenant la communauté des croyants des divers problèmes qui agitent la société contemporaine prise dans le tourbillon de la vitesse et de la recherche effrénée du profit matériel immédiat, les oulémas se réfèrent assez souvent aux premiers temps de la religion musulmane. Ils rapportent sur ces époques des faits et événements susceptibles de servir de modèle dans la vie quotidienne, de source d’inspiration pouvant impulser diverses actions. Les récits sur la vie des Compagnons du Prophète (PSL) constituent l’une de ces références, corroborées par les travaux de chercheurs peu suspects à l’origine de sympathie envers ces personnages.
Dans cet esprit sont fréquemment évoqués les actes du Calife Oumar ibn Khattab, l’un des quatre compagnons à qui incomba la responsabilité d’assurer la conduite de la communauté musulmane après le Messager. Second Calife en titre, la personnalité d’Oumar a ainsi marqué assez profondément la conscience musulmane. Doué selon les docteurs de la foi d’une force de caractère peu commune et pratiquant lui-même les plus hautes vertus, il a fait prévaloir dans la communauté les grands idéaux de la religion. Il veillait personnellement au bien-être de la population et tenait à se rendre compte par lui-même des conditions de vie des fidèles. C’est ainsi qu’il lui arrivait de parcourir, souvent sans escorte et incognito, les rues de Médine d’oùil organisa l’administration des territoires musulmans. Il interrogeait les simples gens sur leurs préoccupations quotidiennes et s’en inspirait pour des dispositions tendant à alléger leurs soucis. Selon les érudits, ce guide spirituel et temporel fit prévaloir en toutes choses les principes d’équité et de solidarité, exigences majeures de l’islam. Aucune couche de la population, des plus hauts placés aux personnes tenues en état de sujétion, en passant par les enfants, n’était tenue à l’écart dans l’application de ces principes.
Malgré ses qualités reconnues, le Calife se vit interpellé un jour par un fidèle lui rappelant de craindre Dieu. « A Allah seul appartient tout ce qui est dans les cieux et sur la terre. “Craignez Allah !” » (4:131)
Loin de s’en offusquer, le commandeur des croyants approuvant sa démarche au grand étonnement de son entourage, souligna que tel était l’un des enseignements de la foi, selon les Ecritures, enjoignant aux fidèles dans la communauté de prescrire le bien, de rejeter le mal.
« Que soit issue de vous une communauté qui appelle au bien, ordonne le convenable, et interdit le blâmable. Car ce seront eux qui réussiront. » (3:104)
En évoquant cet épisode, les oulémas élargissent l’acception de la recommandation coranique au-delà de la conscience personnelle, à la conduite et la bonne gestion des affaires de la communauté. Pour eux le concept d’entité unique constituée par la communauté islamique ne peut être confinée à cette seule dimension morale, ni réduite à une simple vue de l’esprit.
L’interaction franche de ses différentes constituantes contribue à en assurer l’évolution dans l’harmonie. Le rappel en est exprimé en différents passages du Saint Coran, relayé par les commentaires des hadiths. « Aidez-vous plutôt les uns les autres à faire le bien, à vous rendre plus pieux envers le Seigneur et non à commettre le mal et perpétuer l’iniquité » (5:3).
A.K. CISSE
Source: Essor